Iddo Bar Shaï
Un grand merci à Iddo Bar-Shaï d'avoir répondu
très longuement aux questions de pianobleu.com et à Philippe
Rougier d'avoir assuré la traduction pour la réalisation
de cette page .
Biographie commentée
Iddo Bar-Shaï est né le 1 février 1977 à Afula
en Israël (près de la ville où il habite, Nazareth
Illit). A sa connaissance, il n'y avait pas de musicien professionnel
dans sa famille mais son grand père maternel jouait bien du piano
et rêvait même de devenir pianiste ..." Comme il
vivait à Berlin à l'époque de la montée
du nazisme, cela a détruit ce rêve parmi d'autres lorsqu'il
a fui l'Allemagne et a été emporté dans une vie
turbulente. Ma mère a joué du piano quelques années
pendant son enfance. Plus tard quand elle était enceinte de moi,
elle a eu envie de s'y remettre et a acheté un piano. Elle se
rappelle que sa grossesse fut une période joyeuse de retour au
piano et que je réagissais quand elle jouait. Quand elle répétait
une musique que j'aimais, je donnais des coups de pieds vigoureux pour
exprimer ma satisfaction (et je réagissais aux mêmes morceaux
après ma naissance !) C'est probablement alors que le dialogue
a commencé ".
Il y a donc toujours eu un piano dans sa maison, celui-ci faisait
partie intégrante, naturelle et évidente de sa vie et
des sons de son enfance : "Il y avait aussi les disques favoris
qu'on écoutait toujours. Ma mère jouait du piano mais
c'est ma soeur, plus âgée que moi de trois ans qui a commencé
à m'apprendre et a décidé d'être mon petit
maître. Après chacune de ses leçons elle pratiquait
sur moi ses talents d'enseignante
de sorte que si j'ai officiellement
commencé à prendre des leçons à l'âge
de sept ans, en fait j'avais déjà une certaine connaissance
du piano, je me sentais naturellement bien sur cet instrument et j'avais
quelques notions de base grâce aux " aspirations pédagogiques
" de ma soeur
De fait, l'imitation des sons et le toucher
sont extrêmement importants quand on fait découvrir la
musique aux enfants. On doit pouvoir avoir accès à la
musique, elle doit être disponible de façon naturelle et
ne pas être le résultat de la décision de quelqu'un
d'autre. Cela est très important à mon avis. C'est comme
un bébé exposé à sa langue maternelle et
dans ce cas encore plus important pour la dimension intuitive et l'accessibilité
de ce langage."
Il prend ses premières leçons avec un professionnel
à l'âge de sept ans avec Mme Ariela Horvat d'origine hongroise,
avec qui il a étudié pendant trois ans :"L'esprit
de ces leçons était très bon, elle mettait l'accent
sur la découverte et le plaisir de la musique
Je travaillais
d'abord un quart d'heure avant la leçon hebdomadaire, ce qui
semblait suffisant puisque mon professeur était très satisfait
de mon travail et de mes progrès
(c'était un secret
entre ma mère et moi pour ne pas me dénoncer
) mais
petit à petit j'ai été choisi pour diverses représentations
et j'ai dû prendre plus de responsabilités." .
On lui a ensuite offert une bourse qui lui a permis d'aller à
Haifa chez un professeur plus expérimenté, Mme
Bracha Ornan-Margalit :" Sa sur, la pianiste Israela Margalit,
était mariée à Lorin Maazel. Elle était
beaucoup plus exigeante
C'était un grand changement à
l'âge de dix ans ! C'était un excellent professeur aux
connaissances très étendues - donc une base solide pour
les études suivantes
Nous avions une forte relation personnelle
qui a continué par la suite et je chéris encore tout ce
qu'elle m'a donné dans ces années de développement
si critiques et je lui en suis reconnaissant. J'ai étudié
avec elle jusqu'à 18 ans"
Remarqué dès son jeune âge, Iddo Bar-Shaï
bénéficie à onze ans du soutien de la bourse de
la Fondation Culturelle Amérique-Israël : "C'était
et c'est encore la fondation la plus importante en Israël pour
les musiciens de talent ; elle est active depuis plusieurs générations
Parmi ceux qui ont obtenu la bourse dans leurs jeunes années
figurent Itzhak Perlman, Daniel Barenboim, Pinchas Zukerman et Shlomo
Mintz. Cette fondation soutient de jeunes artistes (j'ai été
un des plus jeunes à recevoir la bourse) jusqu'à l'âge
d'étudier à l'Université ou à l'Académie
en Israël ou ailleurs. Pour moi, cela a eu une importance très
marquée à plusieurs égards. D'abord c'était
la reconnaissance par les autorités d'Israël de mes réalisations,
de mon talent et de mon potentiel ; c'était aussi une aide financière
qui m'a permis de prendre les leçons nécessaires. Dix
ans plus tard, j'ai gagné le premier prix du concours organisé
par cette Fondation (le concours Aviv qui est le concours national le
plus important et prestigieux pour tous les instrumentistes de talent
et destiné aux lauréats de cette fondation)."
C'est à l'âge de 12 ans qu'il effectue ses premiers pas
de solistes avec orchestre : "Mon premier concert avec orchestre
fut dans le 23e concerto de Mozart K. 488 en la majeur, un concerto
encore proche de mon cur et probablement mon préféré
entre tous. Sans aucun doute, le second mouvement est le sommet de ce
qu'on a écrit de plus sublime. Je me rappelle bien la première
répétition - la toute première fois que j'ai joué
avec un orchestre. Ces notes que j'entendais et imaginais prenaient
vie, une vie réelle, physique et proche venant des groupes d'instrumentistes
qui m'entouraient
C'était presque comme une drogue, la
joie pure d'une nouvelle découverte si difficile à décrire
que quand j'ai fini de jouer et me suis levé, j'ai perdu l'équilibre
et j'ai failli tomber comme si j'étais saoul ! Ce fut une sensation
inoubliable. Même si l'orchestre n'était pas excellent
et que maintenant je l'entendrais d'une oreille différente, alors
c'était idéal. L'impression de " première
fois " comme s'il était le meilleur du monde - au moins."
A
dix-huit ans Iddo Bar-Shai commencent des études supérieures
à l'université de Tel Aviv avec pour maître Pnina
Salzman avec laquelle il confie avoir eu une relation tout à
fait extraordinaire, ce qui a été le changement le plus
significatif de sa vie. Il a d'ailleurs nombreux souvenirs à
évoquer à ce sujet :" J'ai la chance que le destin
ait eu la grâce de me faire rencontrer Mme Pnina Salzman à
18 ans, avec la décision inévitable d'étudier avec
elle. Ce furent presque douze ans passés avec elle, à
l'Académie de Tel Aviv d'abord, ensuite je n'ai jamais cessé
de prendre des leçons avec elle ou d'aller la voir dans une relation
qui est devenue de plus en plus étroite avec les années.
Elle a été beaucoup plus qu'un professeur pour moi. Elle
était un mentor, un guide, une source d'inspiration aux conseils
précieux, et par-dessus tout une âme sur. C'était
une relation très intense aux multiples facettes, comme par exemple
de longues conversations téléphoniques tard dans la nuit
(nous aimions tous les deux ces coups de téléphone de
minuit). Je pourrais donner toute une interview au sujet de cette relation
particulière
Pnina m'est si chère que quand elle
est morte il y a deux ans, ce fut un moment terrible et une perte terrible.
Je lui dédie le nouveau disque que je viens d'enregistrer des
mazurkas de Chopin. La dédicace est une phrase de Faust de Goethe
que nous aimions tous les deux [ "Si je dis à l'instant
qui passe : Attarde, tu es si beau !"]et qui exprime ma profonde
gratitude pour tout ce qu'elle ma donné. Elle a été
un jalon dans ma vie et, au-delà de ce qu'elle m'a donné,
je peux dire avec certitude qu'elle m'a changé de la manière
la plus profonde - une chose que l'on peut rarement dire de quelqu'un
d'autre dans une vie.
Elle était évidemment un professeur merveilleux mais aussi
une grande pianiste dont l'histoire est fascinante. En fait, elle n'a
commencé à enseigner que dans une phase avancée
de sa vie, à la soixantaine si je ne me trompe. Cependant elle
avait un rare talent dans ce domaine, combinaison exceptionnelle de
ses capacités pédagogiques, qu'elle avait absorbées
probablement auprès de ses grands maîtres, jointes à
son propre talent naturel, et à son expérience de grande
pianiste. Malheureusement elle n'est pas assez connue dans le monde
pour diverses raisons, mais on peut découvrir son art dans ses
enregistrements récemment publiés par " Doremi ".
Elle a commencé ses études de piano à huit ans
dans les années 1930 avec Cortot à l'Ecole Normale de
Musique, dans la même classe que Dinu Lipatti ! Elle a aussi reçu
les leçons privées de Cortot. Parmi ses autres professeurs
il y eut Magda Tagliaferro, Arthur Rubinstein, Schnabel, Landowska et
Ignaz Friedman. Elle était ainsi comme l'encyclopédie
musicale d'une époque très différente. Grâce
à ses études à un très jeune âge et
à sa mémoire phénoménale, c'était
comme de regarder à travers une fenêtre un monde disparu
en partie.
Il y a donc des moments en sa présence dont je me rappelle bien
: expériences formatrices, remarques éclairantes ou amusantes
(l'humour jouait un grand rôle dans son enseignement), inspiration
provenant de ses démonstrations exceptionnelles. D'une façon
générale, je peux dire que toutes ces années avec
elles ont été une magnifique expérience inoubliable,
un cadeau que je chérirai à jamais."
Iddo Bar-Shaï a aussi joué devant d'autres professeurs
et pianistes lors de classes de maître pendant ses premières
années d'études, principalement au Centre Musical de Jérusalem
qui faisait venir de très célèbres musiciens, ce
qui a, dit-il, été une excellente occasion de connaître
leur art, ainsi que plus tard pendant ses études à l'université.
L'un d'eux l'a particulièrement marqué : Alexis Weissenberg..."
C'est à l'âge de 18 ans que j'ai joué pour la première
fois pour Alexis Weissenberg. Ce fut une rencontre avec un pianiste
que j'admirais depuis des années, ce qui a rendu cette rencontre
passionnante pour moi. A partir de là a commencé une relation
particulière qui signifiait beaucoup pour moi. Le contact fut
immédiat entre nous deux. J'étais ravi et honoré
qu'il aimât ce qu'il entendait. Il m'a invité immédiatement
aux classes de maître qu'il donnait à Engelberg en Suisse
quelques mois plus tard. J'y suis retourné cinq fois, mais ce
ne sont pas les seules fois que j'ai étudié avec lui.
Ce lien personnel l'a conduit à m'inviter aimablement chez lui
pour des cours privés. C'était un geste très généreux
dont je suis encore profondément touché. Nous avions de
longues conversations sur la musique mais pas seulement (bien qu'il
n'y ait pas à faire de séparation
la musique décrit
notre vie et tout notre flux de pensées et vice versa).
Alexis est une personne noble, un grand maître et musicien et
un véritable intellectuel. Les conversations avec lui, tout comme
ses conseils musicaux, m'ont rendu dépositaire de choses que
je n'avais jamais connues ou rencontrées avant et cela aussi
fut une rencontre extrêmement significative dans ma vie. Il était
toujours heureux de m'aider, de me donner de bons conseils dans les
années qui ont suivi et de me fournir de chaleureuses recommandations
qui furent très utiles. Par chance, j'ai rencontré Pnina
et Alexis à la même époque et ils se connaissaient
très bien et avaient une relation spéciale depuis qu'Alexis
adolescent était arrivé en Palestine, avant la création
de l'Etat d'Israël. Pnina était déjà établie
comme la pianiste la plus connue du pays et quand elle l'a entendu pour
la première fois elle a été étonnée
par son grand talent qui la fit le reconnaître comme un des plus
grands pianistes dès son jeune âge. Elle m'a dit que son
jeu à cette époque lui rappelait le style et la stature
de Horowitz, pianiste qu'elle admirait au plus haut point.
Alexis mentionnait et remerciait toujours Pnina parce que sa première
tournée avait été organisée suite aux recommandations
de Pnina. Ils étaient évidemment heureux de savoir que
je prenais des leçons avec eux deux à cause de leur admiration
mutuelle".
Iddo
Bar-Shaï affirme son plaisir à recevoir ainsi de bons conseils
d'autres pianistes ou musiciens en général :" Ils
sont précieux. J'espère aussi pouvoir compter sur les
opinions et différents points de vue de bons amis ou de nouvelles
connaissances. Dès mon jeune âge j'ai pris des leçons
avec d'autres professeurs ou des pianistes bien connus dont j'ai toujours
tiré avantage, ce qui m'a permis de définir mon langage
musical, que ce soit en le renforçant ou en le remettant en question.
Cependant, on peut apprendre des expériences de chacun si l'on
sait quels outils utiliser et ce qu'il vaut la peine d'en retenir. C'est
une expérience indispensable et plus on est confronté
à une variété d'écoles et de directions,
plus il sera facile de clarifier son propre langage musical, à
mon avis. J'ai pris de nombreuses leçons mémorables avec
des pianistes comme : Murray Perahia, Andras Schiff, Stephen Kovacevich,
Menahem Pressler, Leon Fleisher, Joseph Kalichstein, Dmitri Bashkirov,
Claude Frank, Jerome Lowenthal, Charles Rosen, Peter Frankl et Peter
Feuchtwanger. "
Quant à savoir ce qui l'a décidé à devenir
pianiste professionnel et s'il avait éventuellement envisagé
une autre activité Iddo Bar-Shaï répond : "
Je ne crois pas que quelqu'un ait choisi pour moi. Ce fut un processus
naturel avec un grand amour de la musique et au fur et à mesure
que les études qui l'accompagnaient devenaient plus sérieuses,
j'ai découvert que ce langage décrit et définit
les choses de la manière la plus proche et la plus touchante
pour moi, et il est naturel pour moi de me définir par elle et
à travers elle. Je ne la considère pas toujours comme
une "profession" bien que c'en soit une et qu'elle demande
à être traitée en tant que telle ... Pnina Salzman
me racontait toujours en plaisantant que Magda Tagliaferro lui avait
dit avec humour dans les moments difficiles "C'est pas un métier
!" C'est certainement un mode de vie avec des "lunettes"
très spéciales pour voir le monde. Cependant ce ne sont
pas des lunettes qui limitent la vue mais au contraire ouvrent des possibilités
pour voir plus profondément l'intérieur des choses ...
l'entremêlement de l'intellect avec les dimensions impulsives,
sensuelles et émotionnelles en musique m'ont toujours fasciné.
Bien sûr j'ai découvert beaucoup d'autres domaines qui
m'intéressent. Au lycée, j'étais en section Mathématiques
et Physique, que j'adorais. Bien sûr les autres arts me fascinaient,
surtout les Beaux Arts et le monde du cinéma qui reste encore
ma passion aussi. A propos de passion, je crois que chocolatier doit
être un bon métier aussi, non ?"
Peut-être a-t-on perdu l'occasion de déguster de fameux
chocolats mais pour ce qui concerne le piano, le talent d'Iddo Bar-Shaï
ravit aujourd'hui nombreuses oreilles, un talent confirmé par
nombreux prix : Iddo Bar-Shai est lauréat de premiers prix de
nombreux concours tels que le concours « Jeune Artiste »
de la Radio Israélienne en 1997, le concours Chopin de Tel-Aviv
en 1998, le Concours Aviv 1999 (le principal concours israélien
pour jeunes musiciens) et le concours « Peter Jay Sharp
prix Vendôme » en 2000. et pour ce qui est du disque, il
a participé à l'album consacre aux « Lauréats
du Concours Aviv 99 », enregistré et produit par le Centre
Musical de Jérusalem et paru en 2000. Il a enregistré
sur CD sous le label « Mirare » ses interprétations
des sonates pour piano de Haydn ce qui lui a valu les éloges
de la presse et il vient de sortir en novembre 2008 sous ce même
label, un disque de Mazurkas de Chopin.
Depuis son premier concert avec orchestre, il s'est produit en tant
que soliste , accompagnant des orchestres comme : l'Orchestre Philharmonique
d'Israël, l'Orchestre Symphonique de Jérusalem Radio
Israélienne, l'Orchestre Philharmonique de Plovdiv, l'Orchestre
de Chambre d'Israël, l'Orchestre Symphonique de Haïfa , l'Orchestre
Camerata d'Israël ainsi que nombreux autres orchestres.
Ouvert à toutes les formations offertes par son instrument, Iddo
Bar-Shaï joue régulièrement avec différents
ensembles de musique de chambre parmi lesquels le Quatuor Ysaÿe,
le Quatuor Aviv et le quatuor Ebène.
Iddo Bar-Shai a participé à nombreux festivals : Festival
& Académie de Verbier, et au programme du Steans Institute
au festival de Ravinia (USA), Festival International de Piano de La
Roque d'Anthéron en France. Il a également joué
à La Baule aux les « Moments Musicaux de lHermitage
- Barrière », à la « La Folle Journée
» à Nantes, Lisbonne, et Tokyo ainsi qu'au festival de
La Grange de Meslay et nombreux autres ... Parmi ses prochains concerts
à venir il confie que lui tient particulièrement à
coeur : "Mon début au Théâtre des Champs
Elysées avec l'Ensemble Orchestral de Paris et le maestro Jesus
Lopez Cobos le 7 avril 2009 où je jouerai le concerto de Mozart
N°19 K.459 en fa majeur. Je suis heureux de jouer là pour
la première fois, tout en pensant quel dommage que mon grand
père ne soit plus vivant pour être avec moi, lui qui est
arrivé jeune homme à Paris il y a 70 ans ; il y a vécu
quelque temps et a très probablement entendu des concerts dans
cette salle avant d'émigrer en Palestine."
Son répertoire, son interprétation...
Chopin
dont Iddo Bar-Shaï vient d'enregistrer les mazurkas occupe une
place très spéciale pour lui :"Il est évidemment
un des grands compositeurs dont nous avons la chance d'interpréter
les oeuvres. Il a défini un langage propre à lui. Ses
innovations, sa créativité et les sommets d'inspiration
qu'il a atteints le mettent clairement parmi les vrais grands génies
de la musique.". Il s'est d'ailleurs plus largement exprimé
sur son attachement à ce compositeur lors des questions concernant
plus précisément son récent disque(voir plus bas)
Mais la liste des compositeurs qu'il aime est en fait très
longue :"J'ai toujours été ouvert et éclectique
dans mes goûts (y compris bien sûr pour les styles qui ne
sont pas de la musique classique). A toutes les époques il y
a eu de grands compositeurs de génie, sincères et qui
dévoilent une vérité qui touche nos coeurs. Beaucoup
me ravissent, même si leurs approches et leurs idéaux sont
différents les uns des autres, en accord avec l'esprit de leurs
temps ou leurs personnalités très différentes.
Mais je considère que c'est un grand privilège de pouvoir
nous relier à eux et jouir de leur art, tant comme auditeur que
comme interprète (Il me plaît de jouer les oeuvres de différents
styles et de différentes époque et je trouve un peu étrange
que certains se concentrent sur une seule période). Je peux ici
mentionner quelques uns de mes compositeurs préférés
parmi beaucoup d'autres : Mozart, J.S.Bach, F. Couperin, Haydn, Janacek,
Schumann, Scriabine, Brahms, Mahler, Scarlatti, Beethoven, Debussy,
Albéniz, Sibelius ... "
Iddo Bar-Shaï aime tout autant jouer seul, qu'en musique de chambre
ou avec orchestre : " Chaque expérience est différente
et en chacune il y a un plaisir différent. Il est vrai qu'en
musique de chambre, le plaisir est le plus complet puisque qu'il est
double : de belles musiques et la rencontre et le dialogue intime avec
des collègues sur scène. Cela est extraordinaire et exprime
le plus profondément le but de la musique - collaboration et
partage - avec le public, et les uns avec les autres. Le répertoire
est magnifique et c'est quelque chose que je suis toujours heureux de
faire. J'ai souvent joué dans des concerts de musique de chambre
car il y a une excellente tradition dans mon pays ; c'est une part intégrante
de l'éducation musicale qui a créé d'excellents
ensembles de musique de chambre.
Avec les concertos, l'expérience est assez différente
; sous certains aspects elle élargit celle de la musique de chambre,
et dans d'autres cas elle la contredit. Cela dépend bien sûr
de la musique en elle-même. D'une façon générale
j'aime beaucoup jouer les concertos et mon grand amour va aux concertos
de Mozart, à la fois pour la musique sublime et parce qu'on y
trouve tous les éléments possibles, à la fois ceux
de la musique de chambre et ceux des opéras et autres.
En règle générale, le plaisir et le fait de jouer
en concert ne vont pas ensemble pour moi. Les concerts sont pour moi
des expériences fortes qui me remuent. Quand le dialogue réussit
avec le public, que je sens que j'ai réussi à transmettre
l'esprit du compositeur et que surviennent une identification et une
catharsis
cette inspiration dont personne ne sait quand elle
arrivera
alors ce sont les moments les plus beaux, des moments
de grâce céleste. Le mot " plaisir " n'exprime
pas cette notion.
Dans un récital, la palette d'émotions est plus large.
Malgré toute la tension que cela comporte, le récital
est la forme à laquelle je me sens le plus lié car il
y a là quelque chose de très fort qui convient à
mon caractère qui fait que je me donne totalement, même
si cela engendre des moments difficiles. "
Quant au secret de son interprétation, souvent appréciée
pour sa maturité, sa richesse de sons et sa sensibilité,
peut-être réside-t-il dans sa quête de Vérité
mais aussi qu'il soit un romantique dans l'âme : "Il est
bien sûr important pour moi d'être fidèle à
la partition et au caractère que le compositeur donne à
chaque phrase et à la vérité qui se trouve derrière.
Mais cela ne veut pas dire qu'il est impossible de laisser de la liberté
à l'imagination pour chercher cette vérité
Cependant je crois en une Vérité derrière les choses,
quoique impossible à atteindre (c'est l'idéal auquel on
devrait toujours aspirer). Sous cet aspect, je suis un démocrate,
en acceptant différentes approches d'interprétation ;
mais je ne suis pas du tout démocrate à propos de l'idée
que les choses qui sont à la base d'une oeuvre ou des intentions
d'un compositeur sont vouées à changer dans un esprit
de nouveauté, modernité, mode etc.
Il faut toujours
différencier les deux et je trouve que c'est souvent une source
d'incompréhension. Après tout, je suis un romantique dans
l'âme puisque je ne crois pas que les idéaux puissent jamais
se réaliser. Le Matériel va avec le Spirituel et la combinaison
et la tension entre les deux avec son effet cathartique est ce qui crée
l'inspiration. L'idéal d'une interprétation est le lien
le plus sincère (et aussi le plus émotionnel) avec l'intention
du compositeur au moment où il l'a écrite en partageant
avec nous un message auquel nous répondons au delà du
temps et de l'espace. Je me sens donc une grande responsabilité
quand je joue une oeuvre et je dois sentir que je m'y suis suffisamment
dédié avant de présenter l'interprétation
aux autres."
Ecouter
Nouveau
Paru en 2013
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FRANCOIS COUPERIN ( 1668 - 1733 )
Les Ombres Errantes
IDDO BAR SHAI , piano
Le pianiste Iddo Bar-Shaï aime la musique de François
Couperin depuis nombreuses années, ainsi lors d'un entretien
paru sur ce site il y a cinq ans, il mentionnait ce compositeur
comme l'un de ses préférés. Les longues réponses
qu'il a bien voulu donner à un nouvel entretien , à
lire ci-dessous, pour la sortie de ce disque, montre combien il
admire et est touché par cette musique ainsi dit-il pour
résumer ..."par-dessus tout, il y a toujours dans
sa musique un immense sentiment de la beauté et une grande
profondeur émotionnelle et intellectuelle (ainsi qu'un
aspect très mélancolique) et l'on peut comprendre
beaucoup sur son approche de la musique grâce à ses
propres écrits dans les préfaces de ses livres.
Pour citer une phrase importante de la préface du premier
livre qu'il a publié (le premier des quatre livres de Pièces
de Clavecin) : "J'avouerai de bonne foi que j'aime beaucoup
mieux ce qui me touche que ce qui me surprend "...cliquez
ici pour lire la suite et écouter un extrait
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Chopin
Mazurkas
Iddo Bar-Shaï
Après un disque de Sonates Haydn, le pianiste Iddo Bar-Shaï
consacre un nouvel enregistrement, toujours sous le label Mirare,
à Chopin, un compositeur qui le touche particulièrement
comme le montre ses réponses plus précisément
au sujet de ce disque. Il a choisi ici un programme exclusif d'une
sélection de mazurkas interprétées dans un
ordre quasi chronologique, car il considère comme un journal
de la vie du compositeur ces pièces que Chopin écrivit
tout au long de sa carrière et qui sont le plus intimement
reliées à la Pologne et à son histoire. Certes
les Polonaises le sont aussi mais si ces dernières ont
un caractère vigoureux et héroïque, les mazurkas
sont plus nuancées et plus délicates.
Un caractère qui convient particulièrement bien
à Iddo Bar-Shaï qui en exprime avec talent la grande
poésie par son jeu sensible et d'une extrême délicatesse
sans pour autant manquer de vigueur quand nécessaire car
les mazurkas diffèrent les unes des autres et certaines
d'entre elles sont entrecoupées de cris et d'éclats
de nervosité... Iddo Bar-Shaï fascine avant tout par
son talent pianistique à faire passer l'émotion
de ses pièces par une sonorité où la douceur
ouatée règne en maîtresse et la passion qu'il
exprime lorsqu'il en parle montre aussi combien cet univers lui
sied à merveille, lisez plutôt cet entretien ! ...cliquez
ici
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Iddo Bar-Shaï
Sonates de Haydn
Dans un précédent disque du label Mirare réalisé
à l'occasion du festival international de piano La Roque
d'Anthéron un extrait de son enregistrement de la Sonate
38 de Haydn avait permis de découvrir le talentueux pianiste
Israélien Iddo Bar Shaï, invité à ce
festival. C'est ici le programme complet de quatre sonates et
l'andante et variations en fa mineur qui permet d'apprécier
plus pleinement la qualité de son jeu. Les deux premières
sonates qu'Iddo Bar Shaï a choisies, si elles ne font pas
partie des premières compositions de Haydn sont issues
de la toute première édition imprimée de
ses oeuvres, voulue et supervisée par lui en 1774....cliquez
ici pour lire la page consacrée à ce disque
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