Célimène Daudet
Merci à Célimène Daudet d'avoir répondu
aux questions de Piano bleu pour la réalisation de cette page.
Biographie commentée
Célimène
Daudet est née à Aix-en-Provence d'une mère haïtienne
et d'un père français. ses parents sont universitaires
et il n'y a aucun musicien professionnel ou amateur dans sa famille.
La musique a cependant toujours été très présente
pendant son enfance : "Mes parents sont très mélomanes
et lorsque j'étais enfant il y avait toujours de la musique à
la maison, aussi bien de la musique classique que du jazz. Je revois
ma mère, passionnée d'opéra, chantant à
tue-tête les airs les plus célèbres
de l'air
de la Reine de la Nuit
Casta Diva ! "
Elle a commencé le piano vers l'âge de 10 ans..."
A cette époque je vivais à l'Ile Maurice et j'ai voulu
prendre des leçons de piano pour imiter ma mère qui avait
décidé de suivre quelques cours. Je garde peu de souvenirs
de ce premier contact avec l'instrument pour la bonne raison que mon
professeur (une des seules de l'ile), une chinoise aux ongles rouges
et très longs ( !) , m'a surtout initiée aux premières
notions de solfège et de théorie musicale et tout cela
dans le système anglo-saxon ! Mes cours de piano ou plutôt
de théorie étaient une activité parmi d'autres,
principalement sportives. "
En revenant en France l'année suivante, Célimène
Daudet a souhaité continuer le piano ou plutôt commencer
vraiment le piano explique-t-elle : " Mes premiers véritables
débuts se sont faits au Conservatoire d'Aix-en-Provence où
je suis rentrée dans la classe de Michel Bourdoncle. Il était
jeune professeur plein d'enthousiasme et d'énergie et excellent
musicien passionné. Il donnait envie de jouer ! Je crois que
ma toute première motivation était l'envie de bien faire
et de lui faire plaisir ! Dès les premières leçons
il me parlait du son, de l'importance de faire chanter le piano. Je
pense que la première approche de l'instrument peut être
déterminante et j'ai eu de la chance que cet amour du beau son
ait été placé parmi les priorités dans mon
apprentissage. Progressivement le piano a pris une place très
importante dans ma vie, il m'est devenu nécessaire, sans que
je m'explique vraiment pourquoi. Je me souviens tout particulièrement
d'une audition de classe lors de laquelle j'ai joué la 2ème
suite française de Bach et où un déclic s'est produit
: j'avais passé un cap et je me suis peu à peu autorisée
à me rêver pianiste plus tard, sans vraiment savoir au
fond ce que cela impliquait
"
Son parcours à Aix a été assez rapide et Michel
Bourdoncle poussait beaucoup Célimène Daudet à
progresser : "Il y avait toujours des occasions de jouer en
public, de s'accompagner les uns les autres dans un mouvement de concerto
Je déchiffrais beaucoup de répertoire, pas toujours celui
que j'étais censée travailler, et des choses parfois bien
trop difficiles mais mon appétit était insatiable
J'écoutais beaucoup de CD (notamment des coffrets entier de Claudio
Arrau : Beethoven, Brahms, Liszt). Les symphonies de Brahms également
que je " dirigeais " en me projetant en ombre chinoise sur
un mur de ma chambre !! A Aix j'ai pu jouer mon premier concerto avec
orchestre : le cinquième de Beethoven et je garde le souvenir
d'un moment fort et exaltant, aussi bien les premières répétitions
avec l'orchestre que le concert en lui-même. "
A la fin de ses études au Conservatoire d'Aix, sa famille ayant
ensuite déménagé à Paris pour des raisons
professionnelles Célimène Daudet reçoit lenseignement
dOlivier Gardon au CNR de Paris ..." Je suis rentrée
au CNR de Paris un peu " par hasard " car je ne connaissais
pas Olivier Gardon. J'ai le souvenir de cours exigeants entourée
d'autres élèves venus aussi de province. Je me sentais
un peu perdue dans la masse de jeunes pianistes et tout autant perdue
dans l'anonymat parisien ! Au cours de ces années Olivier Gardon
m'a invitée à participer à l'Académie de
Villecroze (une résidence pour jeunes musiciens dans le Var)
dans un cadre magnifique avec d'excellentes conditions de travail :
ce bain musical, les échanges riches avec les autres résidents
et les cours dans une toute autre ambiance m'ont fait beaucoup de bien."
Elle a ensuite travaillé un an avec Denis Pascal au CNR de Rueil-Malmaison..."Je
connaissais sa réputation de musicien et de pédagogue,
disciple de Sebok. Cette année dans sa classe fut décisive
; mon approche du piano, mon travail quotidien et ma lecture des uvres
changèrent radicalement ou en tout cas évoluèrent
énormément et les remises en question furent tout autant
douloureuses que palpitantes. Il est difficile de parler de la richesse
de son enseignement en quelques mots mais j'ai été surtout
marquée par le travail d'écoute et de conscience harmonique
associés à une approche pianistique respectant le corps,
la prise de conscience physique de la pulsation, des carrures et l'importance
de respirer pour faire aussi respirer la musique et donner du sens au
texte et aux phrases musicales. Pour moi Denis Pascal va au delà
de transmettre ce qu'il sait, il met sur la voie d'un travail sur soi
qui bouleverse. Je lui dois beaucoup."
En 1999, Célimène Daudet est reçue au CNSMD de
Lyon dans la classe de Géry Moutier..."Je garde un excellent
souvenir de mes années passées au CNSMD de Lyon. J'y ai
fait beaucoup de rencontres et y ai noué de belles et fortes
amitiés. Le cadre du CNSMD de Lyon est à lui seul propice
aux échanges et aux rencontres ! Géry Moutier a été
un professeur marquant également : à chaque cours nous
devions présenter une uvre " aboutie ", et proposer
des options d'interprétation. Ces moments étaient intenses
et parfois angoissants car je sentais bien qu'il me fallait assumer
des choix, une vision
Finalement il nous apprenait peu à
peu à quitter notre statut d'élève. Géry
Moutier me poussait à la réflexion et sa conception de
la musique et de l'art en général est extrêmement
riche et alimentée par une immense culture. Les références
à la littérature, à la peinture étaient
fréquentes et donnaient envie d'apprendre. Je crois comprendre
maintenant qu'il lançait des pistes pendant les cours, à
exploiter et croiser avec d'autres expériences, à faire
mûrir sur le long terme. Il ne fallait pas attendre de sa part
des cours "académiques " avec des solutions formatées
et identiques pour chacun. C'est même aujourd'hui que tout cela
prend sens et que certains cours qui ont donc eu lieu dix ans plus tôt
résonnent en moi !"
Célimène Daudet confie avoir su assez tôt qu'elle
voulait être pianiste mais sans savoir vraiment ce que cela impliquerait
: "Je le vivais comme une sorte de rêve, d'autant plus
que j'étais la première musicienne de ma famille (à
ma connaissance) et que mon parcours se faisait donc sans plan particulier
et sans précipitation. J'ai suivi une scolarité tout à
fait normale jusqu'au bac, j'était en section littéraire
et je me passionnais aussi pour la littérature et la philosophie
à tel point que j'ai un moment hésité à
suivre une hypokhâgne au Lycée Louis le Grand dans lequel
j'avais été reçue. Mais j'avais profondément
envie de me consacrer à la musique et jusque là je n'avais
pas encore eu l'occasion de le faire. Je me souviens très bien
de cette période de choix : le plaisir, la sensation d'être
en accord avec moi-même et paradoxalement un sentiment d'inquiétude
et de vertige. J'ai eu la chance d'être bien guidée et
conseillée, de " tomber entre de bonnes mains " en
quelque sorte."Mais j'ai toujours été passionnée
par la littérature et la philosophie, je lis beaucoup et j'imagine
que dans une autre vie j'aurais pu exercer un métier réunissant
ces passions ou par exemple être écrivain
un vieux
rêve aussi !"
Pendant
ses études, elle a également la chance de recevoir les
conseils, lors de master-classes, de Roger Muraro, Jacques Rouvier,
Fazil Say, Vladimir Mendelssohn, Luis Claret et Bernard dAscoli...
"Je pense que chacune des master-classes que j'ai suivie
m'a fait évoluer sur le plan musical. Certaines étaient
ponctuelles comme avec Fazil Say par exemple ou Luis Claret en musique
de chambre et donc le travail ne pouvait pas être le même
que lors de master-classes dans le cadre d'une académie où
l'échange se fait sur plusieurs jours. Dans le premier cas, j'ai
été parfois frappée par une vision radicalement
nouvelle des uvres, qui donne à réfléchir
: je prenais alors conscience encore plus fortement des multitudes de
possibilités d'interprétation. Cela ouvre les yeux et
les oreilles et c'est parfois un électrochoc !
Avec Bernard d'Ascoli, j'ai eu une expérience tout à fait
différente. Je l'ai rencontré en 2005, alors qu'en réalité
je ne pensais plus vraiment prendre de cours. Je pense qu'il a senti
cela et m'a poussée à une exigence plus grande sans jamais
m'imposer quoi que ce soit. Ces cours se sont révélés
être des échanges précieux
Il a mis le doigt
sur des préoccupations qui me travaillaient justement à
ce moment-là: encore une fois le travail autour du son, du legato,
comment " faire parler ", " faire chanter " le piano.
J'ai senti que nous appartenions en quelque sorte à la même
" famille musicale " et il m'a aidée à assumer
mes choix musicaux, ma propre " voix " musicale et à
rester la plus fidèle possible au texte, en ne cédant
jamais à la moindre tentation de facilité, en étant
toujours dans une quête d'authenticité et de recherche
de profondeur d'expression musicale. Je le vois encore de temps en temps
lorsque j'ai envie de roder un programme par exemple, car je fais une
confiance absolue à ses conseils et à ses oreilles.
J'ai également eu la chance de rencontrer Anne Queffélec
récemment et j'ai pu travailler à plusieurs reprises avec
elle. Là encore ses conseils m'ont beaucoup apporté :
elle sait parler de la musique, alors qu'il semble parfois si difficile
d'y mettre des mots. Son exigence est sans faille : la fidélité
la plus absolue possible au texte, sans artifices, sans déformation
Rien n'est laissé au hasard, chaque note, chaque silence doit
avoir un sens, une place et trouver son équilibre dans la phrase
musicale. J'ai trouvé chez elle un amour du verbe, du langage,
de la littérature allié à une très grande
intelligence et élégance musicale qu'elle sait transmettre
avec joie.
De manière générale j'essaye de toujours me confronter
aux oreilles d'autres musiciens à un moment donné de mon
travail ; les nôtres peuvent être un peu trompées
par nos propres sensations, et parfois nos névroses, nos doutes
et même nos idéaux! "
Elle obtient en 2003 le DNESM (diplôme national détudes
supérieures musicales) du CNSMD de Lyon. Sa passion pour la musique
de chambre la conduit par la suite à rejoindre la classe du violoniste
Jean Mouillère au CNSMD de Paris afin dapprofondir le travail
du répertoire pour violon et piano...."J'avais également
fait énormément de musique de chambre au CNSMD de Lyon,
lu beaucoup de répertoire avec des amis (de la sonate , du trio,
quatuor, deux pianos
). Dès le début de mon cursus
j'ai formé un duo avec un violoniste avec qui j'ai joué
pendant 6 ans. Cette formation tient toujours une place importante dans
ma vie de pianiste même si mes partenaires ont changé au
fil du temps. Le répertoire est immense et d'une richesse incroyable
et la place que tient chaque instrument dans cette formation relève
d'un équilibre fragile mais passionnant à construire.Après
mon prix au CNSMD de Lyon j'ai rejoint la classe de musique de chambre
de Jean Mouillère au CNSMD de Paris pour une année en
sonate avec le violoniste Philippe Villafranca avec qui j'avais formé
un duo à Lyon. Nous voulions travailler plus sérieusement
le répertoire pour piano et violon et préparer des concours
de musique de chambre. C'est ce que nous avons fait au cours de cette
année là en bénéficiant de la grande expérience
de Jean Mouillère et de sa personnalité aussi riche que
fantaisiste ! "
Célimène Daudet a obtenu multiples récompenses
: en 1999, elle est finaliste du 2ème Concours International
Jean Françaix et se voit attribuer le prix spécial du
jury pour la meilleure interprétation de loeuvre de Jean
Françaix. Au sein de sa formation avec le violoniste Philippe
Villafranca elle est lauréate du Concours International "Musiques
dEnsemble" de la FNAPEC (2001) et du Forum International
de Normandie (2003). Elle remporte également un prix au concours
international de Val dIsère en 2008 et le premier prix
du Concours International Pro Musicis en 2010..."Il y a énormément
de concours à l'heure actuelle et certains d'entre eux peuvent
initier une carrière ou propulser un jeune musicien. Les récompenses
que j'ai reçues m'ont apportées quelques concerts
Mais ensuite c'était à moi de savoir rebondir. Je dirais
plutôt que les concours que j'ai pu passer étaient plus
un moyen de me dépasser et de me mesurer à moi-même,
de progresser. Cela a pu être un bon moteur et une occasion de
rencontrer d'autres musiciens aussi bien parmi les candidats que les
membres du jury
Certains pianistes sont très à l'aise
dans ce type de situation et arrivent à s'y exprimer mais au
fond, je ne suis une bête à concours et l'idée que
la musique puisse faire l'objet d'une compétition me séduit
peu
La pression engendrée par ce type d'épreuve
peut avoir pour effet de fragiliser un jeune musicien. L'idée
de performance me paraît peu appropriée à notre
métier et peut créer chez certains une envie de correspondre
à un idéal, à une norme, et aller jusqu'à
figer une interprétation. Je crois que ce qui fait la richesse
du monde musical, c'est justement la diversité des personnalités.
Et une personnalité se construit aussi à travers ses doutes
et ses fragilités, c'est ce qui peut peut-être en faire
sa grâce et sa sensibilité."
Petite
escapade dans son parcours : en 2006, Célimène Daudet
a bénéficié du soutien du Banff Centre au Canada
où elle fait partie des artistes en résidence, ce qui
lui permet de donner plusieurs concerts au Canada et denregistrer
un disque promotionnel..."J'avais beaucoup entendu parler du
Banff Centre au Canada, comme d'un endroit loin de tout, une sorte de
"retraite musicale". J'avais envie de quitter le monde très
étudiant des académies traditionnelles comme j'avais pu
en suivre jusque là, et cette structure correspondait parfaitement
à ce besoin en accueillant des artistes déjà professionnels
aux profils très variés. J'ai pu bénéficier
d'une bourse du Banff Centre après étude de mon dossier.
J'ai passé plusieurs semaines dans cet endroit unique : un centre
d'art perdu au milieu des rocheuses de l'ouest canadien où les
conditions d'accueil et de travail sont fantastiques. Chaque musicien
a un studio de travail 24h sur 24, afin de mener à bien un projet
personnel, comme préparer un enregistrement ou un concours ou
tout simplement se consacrer pleinement à son instrument sans
aucune autre préoccupation. C'est seulement quand on en revient
qu'on réalise à quel point il est rare et luxueux d'avoir
absolument tout son temps pour s'immerger totalement dans son travail.
J'ai rencontré des artistes de tout bord là-bas venus
du monde entier avec des démarches tout à fait différentes
: tout type d'instrumentistes, d'autres pianistes mais aussi des compositeurs,
et même des photographes
J'y ai donné des concerts,
enregistré un disque promotionnel et suivi des master classes.
Je retiendrais surtout une master classe de musique de chambre avec
le clarinettiste Chen Halevi, un musicien incroyablement inspiré
et habité qui poussait à se dépasser
"
Célimène Daudet est invitée à plusieurs
reprises à donner des récitals en Russie, aussi bien à
Moscou que dans les prestigieuses salles des Philharmonies de Rostov-sur-le-Don
et de Nijni-Novgorod. Elle se produit également en Allemagne
grâce au soutien de lAJAM, à Malte notamment au Théâtre
National (teatru Manoel) et au Palais Présidentiel où
elle est invitée à donner un récital par le Président
de la République de Malte, en Algérie et aux Etats-Unis
(New York, Minneapolis, Kansas City, Nashville, Washington)..."Lorsque
j'ai l'occasion de voyager pour des concerts, c'est toujours une belle
aventure même si le temps manque souvent pour s'immerger vraiment
dans un pays étranger. Les publics sont différents d'un
pays à l'autre, en fonction de leurs cultures, de leur façon
d'exprimer ouvertement ou moins leur enthousiasme ou encore de leur
habitude à aller au concert
Mais chaque voyage reste une
occasion de découverte et c'est aussi ce qui fait la richesse
de ce métier.
J'ai beaucoup aimé aller jouer en Russie ou je suis allée
plusieurs fois, invitée par l'Ambassade de France. Les russes
sont très connaisseurs, la musique classique fait partie de leur
quotidien (il y a un piano dans quasiment tous les foyers !) et le public
est très jeune. J'y ai senti une vraie qualité d'écoute
et une grande exaltation que j'ai retrouvées au Conservatoire
de Rostov et à l'école des Arts où j'ai eu l'occasion
de donner également des cours. "
En France, Célimène Daudet a joué sur la scène
de festivals tels que "Les Nuits Pianistiques", le cycle "Jeunes
Interprètes, Premières Armes" des Invalides, le Festival
du Prieuré de Chirens, soirée "jeunes talents"
à la Roque dAnthéron, mais aussi à lOpéra
National de Lyon, au Musée Debussy, à lAmphithéâtre
Richelieu de la Sorbonne, à lEmbarcadère à
Lyon, à lUnesco ainsi que dans de nombreuses villes françaises.
Elle a également joué avec les Solistes de Lyon sous la
direction de Bernard Tétu, avec lOrchestre de chambre dAix-en-Provence,
lOrchestre de lOpéra de Toulon....
Interrogée sur son meilleur et éventuel pire souvenir
de concert , Célimène Daudet confie : "Je garde
un très bon souvenir d'un récital récent à
Aix-en-Provence où je n'avais pas joué depuis longtemps
et où se trouvaient dans la salle tous mes amis d'enfance et
anciens professeurs. J'étais très émue de jouer
pour eux et me sentais portée par toutes ces énergies
réunies et bienveillantes. Le pire souvenir de concert s'est
en fait révélé être un moment très
drôle et pour le moins inattendu : je suis allée jouée
dans un festival de musique de chambre en Algérie en sonate piano
violon. Peu après les premières notes le public s'est
levé pour applaudir, manifester son enthousiasme pendant la musique
qui semblait leur procurer beaucoup de joie et d'excitation
Nous
avons été totalement désarçonnés
par une réaction aussi éloignée de nos codes traditionnels
du concert ! Sans d'autre choix que de nous laisser prendre au jeu,
nous avons poursuivi le concert dans cette ambiance festive totalement
délirante et extravertie !"
Actualité décembre 2011 : Célimène
Daudet : elle donnera un concert public enregistré pour
l'émission "Lettres intimes" sur France Musique, le
samedi 17 décembre à 15h. Entrée libre dans la
limite des places disponibles.
Au programme: Sonate posthume de Ravel et 3ème sonate d'Enesco
avec le violoniste Guillaume Latour. Leur duo a gagné le Prix
International Pro Musicis 2010... L'émission sera diffusée
le 1er janvier à 18h.
Célimène Daudet joueraégalement l'Art de la Fugue
de J.S Bach les 5 et 6 janvier à 20h30 à la Comète,
Scène Nationale de Châlons-en-Champagne.
- Et enfin, en sonate avec Guillaume Latour, elle sera le 8 janvier
à 17h à l'Eglise Américaine à Paris dans
un programme Ravel, Debussy, Enesco
Son répertoire, son interprétation...
Pour
le choix de son répertoire, Célimène Daudet fonctionne
plutôt au coup de cur, comme si certaines uvres s'imposaient
à elle : 'Je déchiffre des partitions sans forcément
les travailler vraiment jusqu'à ce que l'une d'entre elles me
devienne indispensable au point que j'aie envie de la côtoyer
quotidiennement et de m'immerger dans ce monde-là. Parfois je
tourne autour d'une uvre pendant des années avant de m'y
plonger ; c'est par exemple le cas du prélude Choral et fugue
de Franck, que j'ai enregistré récemment et qui revenait
régulièrement sur mon pupitre depuis bientôt 15
ans ! C'est ce qui me fait penser qu'il y a un temps pour tout et pour
des rencontres avec certaines uvres en particulier : notre propre
évolution, notre cheminement personnel peut entrer en résonnance
à un moment donné avec l'univers d'un compositeur.
"
Il y a cependant des compositeurs avec lesquels elle confie avoir passé
plus de temps que d'autres : Bach, Debussy, Brahms, Scriabine..."
Leurs différents univers me fascinent mais il y en a d'autres
dans lesquels je m'immerge de plus en plus comme Liszt par exemple ou
encore Mozart. J'ai une tendresse infinie pour Schubert que j'espère
pouvoir programmer bientôt, aussi bien les impromptus que les
sonates ou encore les lieder ! Mais la liste serait bien trop longue
car j'aime avant tout la diversité. Et pour moi se plonger dans
l'univers d'un compositeur c'est essayer de découvrir sa musique
dans son ensemble et pas uniquement l'uvre pour piano à
laquelle je m'attelle. Depuis quelques années, j'aime aussi aborder
et faire découvrir au public des pièces de compositeurs
parfois méconnus ; je joue depuis peu la musique pour violon
et piano du compositeur Lucien Durosoir, et je commence à me
pencher sur sa sonate pour piano seul."
Son répertoire de musique de chambre est également varié
puisque elle forme un duo depuis plus de cinq ans avec le violoniste
Guillaume Latour. :"Nous avons remporté en décembre
dernier le Prix Pro Musicis qui nous permet de nous produire dans plusieurs
salles de concerts (récemment la salle Cortot et prochainement
l'Opéra d'Avignon ainsi que d'autres projets pour 2012-2013).
Nous aurons aussi une série de concerts aux USA au printemps
2012"
Elle joue également en musique de chambre ponctuellement avec
d'autres musiciens dans le cadre de festivals par exemple. "C'est
l'occasion de rencontrer des personnalités nouvelles et de découvrir
du répertoire mais le travail est différent dans ce cas.
Il exige des facultés d'adaptation, d'écoute et de rapidité
dans le travail. Dans ces moments où les uvres sont donc
montées très vite avec des partenaires avec lesquels on
joue parfois pour la première fois, la concentration et l'écoute
sont souvent intenses pendant le concert et la conscience de la fragilité
de l'instant peut procurer des sensations fortes !
J'ai eu l'occasion de jouer à plusieurs reprises avec des chanteurs
également et j'adorerais aborder plus régulièrement
le répertoire du lied et de la mélodie. En réalité,
j'aime plutôt l'idée de former un ensemble avec d'autres
musiciens afin d'effectuer un travail à long terme qui me paraît
plus constructif
"
Célimène
Daudet a eu l'occasion de jouer avec quelques orchestres ( Les Solistes
de Lyon, Orchestre de chambre d'Aix en Provence, Orchestre de l'Opéra
de Toulon) des concertos de Mozart et Beethoven..." Je suis
une inconditionnelle des concertos de Mozart et je joue d'ailleurs cet
été le n°12 K 414 avec l'orchestre du Festival de
La Seyne sur mer. Les occasions de jouer avec orchestre sont rares et
il faut en profiter quand cela se produit ! "
Tous ces moments sur scène sont nécessaires à son
équilibre et se nourrissent les uns des autres ajoute-t-elle
..." Notre grande chance est d'avoir un répertoire d'une
infinie richesse et ce quelque que soit la formation. Et j'aime plutôt
l'idée d'être musicienne avant tout , ce qui signifie pour
moi aller au-delà des cloisonnements entre soliste, chambriste
ou accompagnateur. Dans un concerto de Mozart par exemple ne sommes-nous
pas tout cela à la fois ?
La musique de chambre dont je ne pourrais pas me passer permet un partage
et un échange qui stimulent l'imagination et rompt avec la solitude
du récital, qui, quant à lui, expose totalement mais induit
pourtant une introspection totale et une sorte de mise à nu.
La responsabilité d'un récital solo est parfois lourde
à porter et la solitude des avant et des après concert
n'est pas toujours réjouissante. Les doutes après les
récitals solo sont parfois déstabilisants même quand
a priori tout s'est bien passé car j'ai alors moins d'objectivité
et de recul que lorsque j'ai joué avec d'autres musiciens.
Jouer avec orchestre est galvanisant, la sensation d'être portée
par la masse orchestrale est assez excitante mais j'ai un faible pour
les concertos dans lesquels l'orchestre et le soliste forment presque
un ensemble de musique de chambre et où le piano dialogue vraiment
avec l'orchestre."
Titulaire du certificat daptitude, Célimène Daudet
est par ailleurs professeur depuis 2005 au CRR de Toulon, et a été
invitée par lAmbassade de France à donner plusieurs
master-classes en Russie. .."Ma manière d'appréhender
l'enseignement évolue en permanence. Je trouve passionnant d'accompagner
des élèves tout au long de leur parcours : de la découverte
de la musique aux premiers pas vers un avenir professionnel. Mais c'est
aussi une lourde responsabilité ; savoir guider, transmettre,
tout en permettant à une personnalité de s'épanouir,
susciter la curiosité, apprendre l'amour de l'exigence et du
dépassement de soi. Enseigner m'a beaucoup appris sur moi-même
; pouvoir transmettre et expliquer ce que l'on ressent nécessite
d'être très au clair avec soi-même et d'avoir précisé
certaines notions tout en étant aussi capable de se décentrer.
L'enseignement m'aide aussi personnellement à trouver un équilibre
par rapport à mon travail plus solitaire et un peu égocentré
de concertiste ."
Concernant son propre travail il n'est pas question pour la pianiste
d'avoir une méthode très précise pour aborder une
nouvelle partition si ce n'est celle de prendre tout le temps nécessaire
et pour elle tout dépend surtout du compositeur : "En
général je déchiffre dans un premier temps toute
la pièce au tempo de façon spontanée, sans me poser
de questions pour avoir une vision d'ensemble puis j'essaye peu à
peu de lui " donner forme ", d'en bâtir l'architecture
en quelque sorte, en dégageant la structure harmonique, les directions,
en analysant le texte. Pour schématiser, j'essaye de déterminer
où l'on va, d'où l'on vient et par où l'on passe
! Tout est écrit dans le texte, la plus grande partie du travail
consiste à savoir vraiment le lire ! Cela peut se faire loin
de l'instrument
L'uvre mûrit peu à peu dans
ma tête et j'en entends une sorte d'idéal intérieurement
avant de pouvoir le réaliser réellement. J'ai un peu l'impression
d'être tout autant artisan qu'artiste
Et je pense qu'il
faut faire confiance à l'instinct, à la spontanéité
tout en faisant un travail plus analytique et rationnel. J'accorde ensuite
une importance particulière au travail du son, du legato, toujours
avec cette idée de faire chanter le piano, de choisir les timbres
et les couleurs un peu comme un peintre avec sa palette de couleurs
Je recherche une densité de l'expression, une profondeur dans
le son, bien que tout cela soit très variable en fonction du
répertoire, avec comme priorité de tenter de servir au
mieux le discours et le message de l'uvre, si tant est qu'on puisse
le définir vraiment
J'essaye de ne jamais perdre de vue
que l'interprète est un passage, un vecteur, qui tente de révéler
les richesses d'une pièce, de lui redonner vie
Je n'écoute
en général pas de version au début de mon travail
mais je le fais une fois que je sais un peu mieux où je veux
aller. En revanche j'écoute volontiers d'autres pièces
(répertoire symphonique, musique de chambre ou voix) du même
compositeur comme pour m'imprégner plus de son univers, en évitant
surtout de le réduire à la seule pièce que je travaille.
Mais je prends conscience de plus en plus qu'on ne peut rien figer,
la recherche de l'authenticité n'implique pas pour autant une
vérité
et il faut s'accorder la possibilité
de faire évoluer une interprétation parfois de manière
radicale. C'est en cela qu'il me semble important d'avoir du temps devant
soi ; travailler une pièce, pouvoir la laisser, puis la reprendre
quelques temps plus tard afin de l'envisager parfois sous un jour nouveau,
avec un éclairage différent
"
Quant
à son écoute de musique, même si elle aime aussi
le silence, et ses autres loisirs, Célimène Daudet montre
une grande ouverture d'esprit : "Lorsque j'écoute de
la musique (par période, car je peux passer beaucoup de temps
dans le silence !), il s'agit principalement de musique classique dont
énormément de musique symphonique, de musique de chambre
et de lieder. Quand j'écoute du piano, je cherche souvent à
mieux connaître le jeu d'un interprète ; c'est le cas en
ce moment avec Brendel dont j'écoute le plus possible d'enregistrements
Ce sont bien souvent de vraies leçons ! Et c'est passionnant
d'entendre l'évolution d'une personnalité à travers
le temps. J'écoute aussi de la musique baroque, du jazz, du tango,
des chanteurs à texte dont l'engagement est saisissant comme
Brel, Brassens, Barbara, de la musique tzigane roumaine comme Taraf
de Haïdouks et je suis ouverte à toute nouvelle découverte
musicale. Par ailleurs Je lis beaucoup, des uvres classiques aux
romans contemporains, des nouvelles, du théâtre, des essais
Tout cela me nourrit et me permet aussi de m'évader
Je
ne suis pas convaincue que cela ait une influence directe sur l'interprétation,
ou alors de façon inconsciente. Je pense que les " choses
de la vie " dans leur ensemble (expériences vécues,
découvertes en tout genre, rencontres, lectures
) forment
un tout et nous font grandir. Ce que nous vivons et la manière
dont nous le recevons doit sûrement faire évoluer et mûrir
une interprétation. J'adore aussi la bonne cuisine et les bons
vins
!"
Son attrait et sa curiosité pour d'autres formes d'expression
ainsi que les rencontres dont elle se nourrit conduisent Célimène
Daudet à être à l'initiative de créations
mêlant le piano à d'autres disciplines artistiques. Son
spectacle "Reflets chorégraphiques" sera donné
à plusieurs reprises à l'Opéra National de Lyon
: mise en scène d'un piano et d'une danseuse contemporaine autour
de la musique de Debussy. Elle participe également au ballet
le Sacre du Printemps de Stravinsky avec le chorégraphe Yuval
Pick. Elle travaille à présent à l'écriture
d'un nouveau projet en collaboration avec son frère Hadrien Daudet,
photographe, et le compositeur Gilles Alonzo..."Ces projets
de spectacles sont nés de rencontres pendant mes études
avec des danseurs et plus tard se sont poursuivis avec des amis, avec
l'idée de donner vie à des projets communs malgré
nos appartenances à différents univers (comme la danse
justement ou encore la photographie). En fait tout cela est né
d'amitiés et d'échanges ! J'ai participé dans un
premier temps au ballet le Sacre du Printemps au CNSMD de Lyon en accompagnant
les danseurs du CNSMD
Le temps passé en répétition
à observer le travail des danseurs et celui du chorégraphe
a été très intense. J'ai été très
intéressée par les croisement possibles entre la musique
et la danse, qui allaient bien au delà d'un accompagnement. J'ai
été fascinée par le rapport des danseurs au temps,
à l'espace, au mouvement bien sûr
L'idée est
née progressivement avec une amie danseuse d'imaginer un spectacle
dans lequel le mouvement prolongerait le son où en serait à
l'origine
mais aussi où la musique s'associerait au geste
chorégraphique. Pourtant je suis par ailleurs convaincue que
la musique se suffit à elle même mais l'expérience
de croiser et mêler les arts peut aussi ouvrir de nouvelles portes
! En tout cas, il s'agissait d'un travail de création qui n'est
pas forcément dans nos habitudes en tant que pianiste mais j'aime
la découverte et l'exploration d'autres univers. Ce spectacle
a été donné à l'Opéra de Lyon. Je
suis aujourd'hui engagée dans un nouveau projet écrit
par la compagnie Yoann Bourgeois autour de l'Art de la fugue de J.S.
Bach."
Ecouter...
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A tribute to Bach
Mendelssohn- Liszt -Franck
Bach/Busoni : Choral Ich ruf zu dir, Herr Jesu Christ, BWV
639
Mendelssohn : Prélude et fugue No1, Op.35
Franck/Bauer : Prélude fugue et variation, Op.18
Liszt : Bénédiction de Dieu dans la solitude - Harmonies
Poetiques et religieuses No. 3
Franck : Prélude choral et fugue
Bach : Prélude et fugue en ut dièse mineur, BWV
849
Célimène Daudet, piano
Bach constitue souvent le "pain quotidien" des pianistes,
et c'est d'ailleurs comme tel que la pianiste Célimène
Daudet, lauréate de plusieurs concours internationaux,
l'a découvert dans son enfance, relatant qu'elle l'a abandonné
quelques années avant d'y revenir grâce à
d'autres compositeurs : Franck, Mendelssohn, Busoni et ses transcriptions
de Bach.
Dans son premier disque, qui vient de paraître chez le label
Arion, et dont le programme s'est imposé à elle,
Célimène Daudet raconte son propre cheminement vers
Bach, grâce à certains de ses héritiers romantiques
qui lui ont ouvert la voie
Une histoire musicale dont l'introduction : une transcription
d'un choral de Bach par Busoni à la mélodie sereine
et sonorité imposante, proche de l'orgue, nous impose à
nous auditeurs le silence et l'écoute...
Avec le prélude de Mendelssohn qui suit, impossible de
s'échapper du flot d'arpèges en triple croches,
véritable torrent de musique, houle mouvante donnant place
dans la fugue à une vague ascendante conduisant à
renfort d'accélérations et d'un choral qui s'y cache
(non annoncé dans le titre) jusqu'aux plus belles lumières.
Le splendide Prélude, fugue et variation de Franck, transcrit
par Harold Bauer, dont vous pouvez entendre un extrait plus bas
dans cette page apporte toute la sérénité
qui elle aussi s'imposait après une telle ascension et
qui d'ailleurs avait déjà commencé à
apparaître dans la fin de la fugue.
Sérénité et méditation se retrouvent
encore avec l'oeuvre très poétique au caractère
mystique "Bénédiction de Dieu dans la solitude
" de Liszt.
Après la "solitude" c'est un triptyque au caractère
également mystique proche de l'oeuvre précédente,
où l'on peut entendre une voix anxieuse et une autre consolatrice,
qui prend place dans une autre oeuvre de César Franck tout
aussi splendide que l'op.18.
La conclusion de ce récit musical, le quatrième
prélude et fugue BWV849, un des plus inspirés de
ce qui est considéré comme l'Ancien testament de
la musique : "le clavier bien tempéré",
écrite par le compositeur qu'elle nous a fait désirer
tout au long de ce récit musical dans une attente patiente
grâce à la beauté des louanges qui émanent
à travers la musique de chaque compositeur qui ont contribué
à cet hommage, est une apothéose du contrepoint,
ici à cinq voix, qui caractérise la musique de Bach
et de ceux qui s'en sont inspirés.
Ce programme qui s'est imposé à elle, s'impose
aussi à l'auditeur de façon naturelle, par un jeu
sans artifice, chantant et aux belles sonorités, admirablement
réfléchi bien que conduit par l'instinct avant tout.
Célimène Daudet nous offre un récit que l'on
a envie d'écouter de nombreuses fois car il est tout simplement
beau...
Oui magique comme il l'est déclaré dans un amusant
clip sans son d'annonce de ce disque (voir en fin de page). Magique
comme cette photo( à voir dans la page sur le disque) au
ciel magnifiquement coloré, prise hier soir par ma fenêtre,
sans filtre ni flash ni trucage, mais juste après avoir
ré-écouté ce disque : une inattendue lumière
étoilée apparaît sur une maison peut-être
en raison du temps de pose prolongé à cause de l'obscurité...
?
Célimène Daudet a bien voulu répondre à
plusieurs questions au sujet de ce disque en complément
à celles sur son parcours...cliquez
ici pour lire la suite, écouter un extrait et
voir une vidéo.
|
En savoir plus
Visitez le site internet de Célimène Daudet...cliquez
ici
© pianobleu.com ---- contact : -
Agnès Jourdain
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