Serge Forté
Merci à Serge Forté d'avoir répondu aux questions
de Piano bleu pour la réalisation de cette page.
Biographie résumée
Serge
Forté est né le 1er Mai 1960 à Tunis et est arrivé
en France l'année suivante d'abord à Nice puis à
Grenoble..."Il y était plus facile à l'époque
de trouver du travail car beaucoup d'immigrés du Maghreb essayaient
de s'installer sur la côte. Mais nous revenions à Nice très
souvent car malgré tout une partie de ma famille, qui était
partie plus tôt que nous, avait réussi à s'installer.
Lors d'un de ces séjours, je devais avoir dans les 4 ans, j'ai
reproduit une musique en remplissant des verres avec plus ou moins d'eau...
Mes parents ont immédiatement décidé de me mettre
à la musique. ".
Il prend ses premières leçons de piano au Conservatoire
de Grenoble à 6 ans, avec 2 ans d'avance et après avoir
passé un test :"Ma mère a beaucoup insisté
pour que je le passe....Je faisais uniquement du solfège, la règle
à l'époque étant : 2 ans de solfège avant
de toucher le moindre instrument ! Mais contrairement à beaucoup
d'enfants, j'aimais le solfège, je ne saurais pas dire pourquoi
! Malgré tout j'aimais encore plus Zorro et, quand ma grand-mère
venait me chercher le jeudi après midi après mon cours,
je la faisais cavaler dans tout Grenoble pour arriver à l'heure
de mon épisode ! " A huit ans sa famille ayant déménagé
dans la banlieue de Lyon, il poursuit ses cours de piano avec un professeur
particulier : Mme Lodi , parallèlement il continue sa formation
musicale au conservatoire, dont il garde en souvenir une anecdote :"Il
y avait toujours un concert de fin d'année. Pour mon premier concert
je devais jouer une petite pièce : "Le petit âne blanc
". Quand mon tour est arrivé le présentateur a annoncé
: "Et voici maintenant : Le petit âne blanc !" Et je suis
entré sur scène sous l'hilarité générale..."
A l'origine, Serge Forté voulait être pédiatre,
et a donc passé un bac D qui correspondait aux études de
sciences...mais la musique ne le quittait pas : " Je faisais déjà
pas mal de musique en groupe genre Yes/Genesis que nous adorions et ce
depuis l'âge de 16 ans. Je m'étais mis également à
la batterie. Finalement, j'ai changé mes plans juste après
le bac et me suis inscrit en fac de musicologie avec option ingénieur
du son".
Sa découverte du jazz s'est faite à l'occasion d'un bal
où il devait assurer le piano : "Je ne l'avais jamais fait
mais je pensais que cela pouvait être intéressant pour moi
j'ai donc postulé pour passer une audition. On m'a assuré
qu'il y aurait des partitions...Lorsque je suis arrivé, il n'y
avait que des grilles d'accords chiffrés sur des feuilles blanches
de surcroît ! Genre: C7M/ Am7/ Dm7/G7...Je n'ai pas compris que
cela pouvait être des partitions ! C'en est suivi une belle engueulade
et je suis parti en les traitant d'ignares...Malgré tout cela reste
mon premier contact avec des grilles d'accords ! Je suis rentré
un peu plus tard dans un autre groupe de bal et j'ai alors compris ma
formidable méprise car ils avaient des dizaines de partitions du
commerce avec les mêmes codes bizarres !!! J'ai donc appris ces
accords en accéléré... Ma chance a été
qu'ils étaient tous jazzmen et qu'ils faisaient du bal pour gagner
un peu d'argent. Le répertoire étaient donc assez "funky"
genre Georges Benson, Earth Wind and Fire et plein d'autres artistes Motown.
Beaucoup de morceaux comportaient des solos de fender Rhodes et comme
j'étais évidemment incapable d'improviser je me suis dit
que la meilleure manière de ne pas paraître idiot serait
de relever ces solos, ce que j'ai fait ! Mon premier relevé a été
le solo de Ronnie Foster sur "World is a Ghetto" de Benson.
Je crois que je m'en souviens encore !!! Quand, en 1994 lors de la sortie
de mon 2nd Cd "Mosaïque", un journaliste m'a comparé
à lui sur un de mes morceaux cela m'a fait plaisir et ... sourire
!"
Serge Forté n'a jamais pris de cours particulier de jazz à
part une heure avec André Manoukian qui aujourd'hui officie dans
le jury de la nouvelle star sur M6 : "Je n'ai appris que via les
relevés ! J'apprenais un solo et mon but était de le jouer
par dessus l'enregistrement jusqu'à que l'on ne puisse pas sentir
la moindre différence. Je m'enregistrais pour en être sûr
et je le faisais écouter à un ami disquaire fou de jazz
et qui m'a parallèlement beaucoup aidé à découvrir
plein de gens." Il tient ses influences de Keith Jarrett, Oscar
Peterson, Chick Corea, Herbie Hancock, Michel Petrucciani, via leurs disques.
De 1981 à 1987, Serge Forté enseigne le piano classique,
tout en jouant dans des groupes locaux..."Cela ne me posait pas
de problème particulier puisque de toute façon j'ai toujours
aimé l'enseignement. D'autre part, j'ai très vite compris
que l'on apprend beaucoup en apprenant aux autres, je prenais donc cette
situation comme une chance pour moi.".
Il est professeur au CIM, école de jazz et musiques actuelles,
à Paris de 1988 à 1990 :"Je suis arrivé au
Cim via un stage organisé par eux avec Dave Liebman, John Abercrombie,
Ritchie Beirach, Ron Mac Clure, Billy Hart, durant lequel j'ai appris
deux choses fondamentales qui ne m'ont jamais quitté depuis : 1/
je n'avais jamais joué de piano avec une RÉELLE INTENTION
dans mon jeu. Ces types arrivaient à mettre le feu à leurs
instruments en 3 secondes, c'était incroyable et nouveau pour moi
! On a moins cette sensation via les disques. 2/ Je ne connaissais pas
le blues traditionnel ! John m'a dit à peu près ceci après
m'avoir écouté jouer un blues : Tu as construis ta maison
en commençant par le papier peint ! Dixit : tu connais le jazz
moderne mais pas la base c'est à dire le blues ! Je me suis donc
mis à étudier à fond Oscar Peterson, le pape pour
moi de cette musique. A la suite du stage, Alain Guérini, feu directeur
du Cim, m'a proposé de diriger un atelier et l'année suivante
d'avoir une classe de piano et une classe de pianotage pour non pianiste
où j'apprenais l'harmonie du jazz via le piano.".
Le premier disque de Serge Forté "Vaïna" est sorti
en 1990 avec Michel Petrucciani en invité surprise pour un duo..."
17 Février 1990 , j'arrive au studio Davout , il est 9 h. Je
reste persuadé que mon agent m'a fait une blague la veille
au soir au téléphone: "Serge , tu enregistres
demain matin aux studios Davout avec Michel Petrucciani en duo !!! Je
sors de chez lui, il a écouté tes bandes, il trouve ça
très intéressant et il a envie de t'aider à démarrer
ta carrière comme d'autres l'ont aidé en son temps à
démarrer la sienne... " Et il est là, tout sourire
devant le studio et en avance en plus ! Je suis littéralement paralysé
et incapable de me souvenir jusqu'à mon nom... Quelques instants
plus tard, (ou bien quelques siècles ...) nous sommes devant les
deux énormes pianos de concert qui se battent en duel pour savoir
lequel des deux va avoir l' honneur de faire équipe avec Michel
et lequel va avoir la chance de me dévorer tout cru... Je lui laisse
bien sûr essayer les pianos en premier. Avec un peu de mal il franchit
l'obstacle du tabouret et se met immédiatement à jouer comme
s'il était déjà en train d'enregistrer et avec une
puissance telle qu'au bout de quelques notes il casse une corde sous le
regard ahuri de l'accordeur qui n'aurait jamais cru cela possible... J'ai
réellement pris conscience à cet instant à quel point
son jeu, au delà de ses qualités artistiques exceptionnelles,
pouvait être aussi intense du point de vue de son rapport avec le
clavier. Nous avons fait 5 versions de son fameux " Oh Na Na Oh Yé
" en apprenant petit à petit les mécanismes du jeu
à 2 pianos, chose que ni lui ni moi n'avions fait auparavant. N'étant
pas réellement satisfait de moi j'aurais bien voulu continuer mais
il était exténué, il avait tout donné et ce
dès la première prise. Il avait cette capacité très
rare, qui est la marque des plus grands, d'être à son top
niveau immédiatement. J'ai mesuré avec le temps à
quel point son geste, si extraordinairement généreux, avait
eu un impact sur ma façon d'aborder l'instrument et la musique
en général. Je repense très souvent, avant un enregistrement
ou un concert, à la scène de la corde cassée..."
Serge Forté a ensuite enregistré "La vie en bleu"
en 1992 mais il est sorti en 2001. Son second disque dans les bacs est
"Mosaïque" sorti en 1994 et produit par France 3. En 2003
paraît lalbum JAZZIN CHOPIN, d'autres disques suivront
: Thanks For all, Believe in Jazz et enfin La Bohème sorti en mai
2007.(voir plus bas)
Parallèlement Serge Forté donne des concerts, plus ou
moins nombreux selon les périodes : "Cela fonctionne par
périodes car nous essayons d'organiser des tournées ce qui
est plus facile pour tout le monde. Du coup à ces moments on a
l'impression de faire beaucoup de concerts !" Quant à
son meilleur souvenir de concert, il confie : "J'ai beaucoup de
très bons souvenirs mais le plus marquant de ces dernières
années a été la série de concerts à
Taiwan dont un avec Sheila Jordan devant près de 17 000 personnes
déchaînées comme pour un concert des Rolling Stones
! Voyant tous ces gens hurlant, scandant son nom, Sheila leur a dit :
-My God where have you been all those days of my life ? (Mon Dieu ou étiez
vous durant tous ces jours de ma vie ? ) A un moment le maire de la ville
est monté sur scène et a fait entonner "Happy birthday
Sheila" aux 17000 personnes ! Extraordinaire...".
Parmi ces concerts à venir lui tiennent particulièrement
à coeur..."Les concerts à "La nouvelle Athènes"
nouveau grand lieu parisien du Jazz à partir de juillet et auquel
je vais participer activement : j'aurais une résidence tous les
vendredis, ce qui va me permettre de présenter mon travail et aussi
d'inviter plein de musiciens que j'apprécie et avec lesquels je
n'ai pas eu trop l'occasion de jouer . Ce lieu situé 9 place Pigalle
(toute une histoire...), équipé d'un piano Fazioli (!) sera
aussi un restaurant et un bar "
Ses compostions, improvisations...
La
musique de Serge Forté a évolué au fil du temps :
"Mes deux premiers disques sont très orientés "Latin
jazz " endiablé avec malgré tout quelques plages plus
calmes, avec "La vie en bleu" je me suis tourné vers
un jazz un peu plus sophistiqué et improvisé un peu à
la manière du trio de Keith Jarrett. Dans "Thanks for all"
j'ai voulu rassembler toutes mes influences : classique, funky, latin,
jazz mainstream et moderne. "Jazz'in Chopin" comme son nom l'indique
est un hommage à l'improvisation et au génie de Chopin pour
les mélodies. Mon dernier opus "La Bohème" est
je crois le mélange de tous les autres au niveau des influences
et des styles."
Un des "cheval de bataille" de Serge Forté est de chercher
à abolir les frontières entre le classique et le jazz :"Bach
improvisait ses préludes, Mozart improvisait ses cadences, Chopin,
Liszt passaient leur temps à improviser lors des fameux salons
de musiques. L'improvisation a toujours fait partie de la vie des musiciens
jusqu'au début du siècle dernier où faute de professeurs
compositeurs peu à peu les musiciens classiques sont devenus des
interprètes. Les conservatoires (Liszt n'aimait pas les conservatoires
car il disait : dans conservatoire il y a le mot conserver...) n'ont pas
arrangé cet état de fait en encourageant l'interprétation
sans faille, à la note près, des oeuvres, en oubliant que
ces même oeuvres ont été un jour improvisées
et que dans bien des cas leurs auteurs ne les jouaient sûrement
pas de la même façon à chaque fois ! Le jazz lui,
a gardé cette liberté et c'est pourquoi j'ai basculé
vers cette musique car tout petit déjà je changeais un petit
peu les partitions en me faisant gronder bien sûr ! Si on appliquait
la façon de voir des musiciens classiques au jazz, cela reviendrait
à demander à Keith Jarrett de rejouer encore et encore le
Köln Concert ou pire encore d'aller à un concert d'un quidam
l'interprétant note à note ! Si tous les grands musiciens
précités avaient pu enregistrer leurs oeuvres comme les
jazzmen, alors il y aurait beaucoup plus de compositeurs que d'interprètes
dans la musique classique."
Serge Forté a également enregistré un disque avec
la chanteuse Sheila Jordan avec laquelle il travaille régulièrement
: "Sheila Jordan est plus qu'une chanteuse pour moi, c'est une
musicienne complète, c'est un partenaire lors des concerts qui
nous laisse une grande liberté, qui aime les risques et qui surtout
représente cette formidable époque du be-bop et de Charlie
Parker . Elle se présente d'ailleurs ainsi : I'm a be-bop messenger
! A plus de 78 ans elle a un tonus extraordinaire, une relation magique
avec le public, bref c'est pour moi une des plus grandes chanteuses encore
en activité. Si vous ne l'avez jamais vu, il faut vous précipiter
lors de sa prochaine venue en France car c'est le genre de personne que
l'on oublie jamais après l'avoir vue une seule fois..."
Souhaitant décidemment abolir toutes les frontières, Serge
Forté, par plusieurs de ces disques, réunit la musique jazz
et populaire française, ainsi son premier disque "La vie en
bleu " dont il a choisi le titre en référence à
la chanson "la vie en rose" mais vue du côté blues
(et donc bleu). Son tout nouveau disque "La Bohème",
illustré d'une photo du monument Costes et Bellonte érigé
sur la falaise d'aval à la mémoire des deux aviateurs qui
réussirent en 1930 la première liaison Paris/New-York, réunit
encore chanson française et jazz : "Les musiciens de jazz
américains sont toujours partis de chansons populaires pour improviser
. Pour eux cette façon de faire est complètement naturelle.
Je me souviens, dans un club new-yorkais en 1997 avoir entendu à
côté de moi une petite dame fredonner toutes les paroles
des morceaux interprétés par les musiciens. Prendre des
chansons dans notre patrimoine était donc plus que naturel pour
moi ! D'ailleurs cette dame m'a inspirée dans le choix des chansons
car j'ai décidé de ne prendre que des chansons que je connaissais
par cur et dont je pouvais chanter une partie des paroles. Le symbole
Paris/ New York a deux significations pour moi : Jazz et chansons françaises
et le fait que mon dernier Cd "Thanks for all " ait été
enregistré à NY. La bohème constitue donc un retour
à mes sources..."
Ecouter...
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Serge Forté Trio
La Bohème
Serge Forté, qui n'en est pas à son premier disque
réunissant jazz et chanson française, avec notamment
son disque "La vie en bleu" sorti en 2001, confie avoir
choisi cette fois des chansons qui ont bercé sa jeunesse
et qu'il connaissait très bien. On y retrouve des "grands
noms" de la chanson françaises : Piaf, Gainsbourg, Nougaro,
Aznavour, Bécaud, etc...et l'hymne national dont il explique
:" "La Marseillaise" c'est parti d'un exercice
d'harmonie que je fais faire à certains de mes élèves
et qui consiste à harmoniser en jazz des mélodies
très simples : frère jacques, l'eau vive, ah vous
dirais-je maman etc....Un jour j'ai donné la Marseillaise
et comme je propose toujours ma version à mon élève
je m'y suis mis...Au moment du choix des chansons j'ai repensé
à cet arrangement que j'aimais bien et je me suis dit qu'après
tout c'était aussi une chanson française voire même
la plus connue de toutes ! Il est par contre amusant de la faire
écouter à quelqu'un sans lui donner le titre et le
voir s'excrimer en disant "Ah je connais ce truc mais je n'arrive
pas à savoir ce que c'est !!!"...cliquez
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Sélection du mois
août 2003
Jazz
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Serge Forté Trio
Jazz in Chopin
Pari audacieux et réussi : Serge Forté, accompagné
de Peter Herbert à la basse et Karl Jannuska à la
batterie, fait tomber superbement les barrières entre le
piano classique et le piano jazz par ses arrangements d'oeuvres
de Chopin. Certes des groupes polonais ont déjà montré
le chemin, et ce n'est pas la première fois que l'on réalise
des improvisations à partir d'oeuvres de compositeurs classiques,
mais le résultat est fort convaincant car Serge Forté
conserve l'essentiel : la sensibilité et la douceur de jeu
que sauront également apprécier les amateurs de piano
classique !
Cliquez sur l'image pour écouter des extraits et vous
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Pour en savoir plus
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