Chopin
Ballades
Piano concerto n°2
Lise de La Salle, piano
Staatskapelle dresden
Fabio Luisi, Direction
La pianiste Lise de La Salle avait dans ses quatre précédents
disques, toujours choisi de mettre en miroir des oeuvres de deux
compositeurs, c'est uniquement à Chopin, qu'elle consacre
son nouveau disque tout en mettant en miroir cette fois son travail
en studio et celui en concert puisque le concerto est un enregistrement
"live" et que les quatre ballades ont été
quant à elles enregistrées en studio.
C'est aussi par ce choix différentes facettes du compositeur
qu'elle réunit puisque le deuxième concerto de Chopin
s'il n'a été publié qu'en 1833 fût
en réalité le premier concerto qu'il composa, dès
1829, et est donc considéré comme une oeuvre de
jeunesse, composée avant son départ définitif
de Varsovie en 1830.... Il est écrit dans la tradition
des concertos virtuoses dans lesquels seul le soliste est au centre
tandis que l'orchestre n'a qu'un rôle d'accompagnement et
se contente d'introduire les interventions solistes, de faire
la transition entre elles et de les préparer explique Tobias
Niederschlag, auteur du livret.
Si Chopin confia à son ami Titus que c'est en pensant
à la chanteuse Konstancia Woyciechowski qu'il composa le
splendide adagio de ce concerto, selon Robert Schumann les quatre
ballades peuvent quant à elles être inspirées
de quatre textes littéraires précis, cependant par
ces oeuvres dont la première date de 1835 et la dernière
de 1843 il exprimait aussi sa nostalgie de sa patrie perdue et
dans ces pièces extraordinaires très riches en émotions
variées Chopin bouleverse ici toutes les formes convenues.
L'on sait que Chopin n'affectionnait pas les grandes salles
de concert, ce n'est nullement le cas de la pianiste Lise de La
Salle qui a donné dès neuf ans son premier concert
sur Radio France et fait ses débuts avec orchestre dans
le deuxième concerto de Beethoven dès l'âge
de treize ans et qui donne ici une interprétation du second
concerto de Chopin dans des rythmes très contrastés
et dynamiques mise en confiance par l'orchestre Staatskapelle
Dresden et son chef Fabio Luisi qui lui offre toute liberté,
le classicisme de ce concerto prend ainsi une jolie teinte actuelle.
Il en est de même pour les ballades dans lesquelles la pianiste
profitant d'un enregistrement en studio a pu essayer diverses
options qui s'avèrent tout à fait satisfaisantes
car la tension qui règne en permanence que ce soit dans
la lenteur ou dans la vivacité est remarquable, magnifiant
l'intensité dramatique de ces oeuvres.
Si vous avez aimé passer l'été avec Chopin
ce disque est le meilleur choix pour la rentrée et passer
également l'automne avec les plus belles oeuvres musicales
écrites par ce compositeur !
Lise de la Salle a bien voulu répondre à quelques
questions, vous pourrez également voir une vidéo
réalisée par le label Naïve lors de l'enregistrement
:
Vos précédents disques mettaient
toujours en face à face deux voire trois compositeurs,
pour ce disque Chopin vous faites une exception, pourquoi et que
représente Chopin dans votre répertoire ?
J'ai toujours eu une relation très forte avec la musique
de Chopin ; le premier disque que m'a grand mère m'a offert
était dédié à Chopin avec les deux
Concertos. Sa musique m'impressionnait tellement que je n'osais
pas la jouer, de peur de ne pas être à la hauteur.
Je ne sais pas si je le suis maintenant, mais ce qui a changé,
c'est mon sentiment. Il y a maintenant deux ans, j'ai ressenti
profondément le besoin de jouer Chopin, de partager avec
mon public cette merveilleuse musique. Et c'est pour cette raison
qu'il a toujours était évidemment pour moi que lorsque
j'enregistrerais Chopin, il serait le seul et l'unique !
Par contre dans ce disque vous avez la
confrontation de deux atmosphères : un enregistrement live
et un enregistrement studio, l'une d'elle a-t-elle votre préférence
?
J'ai malgré tout tenu à garder cette notion de
contrastes, de jeu de miroir que je trouve passionnant tant au
concert qu'au disque. Le deuxième concerto est un enregistrement
" live ", mais un vrai " live " ; Je tiens
à le préciser car cela fut un réel défi.
Habituellement, il y a toujours une session de " patchs "
après le concert pour corriger les éventuelles petites
erreurs (naturelles) du concert. J'ai absolument voulu tenter
le " vrai live ", uniquement le concert ! Et l'on ressent
d'autant plus la magie de ce moment !
Les Ballades ont été un réel enregistrement
de studio. Sans être une adepte de la vision " une
prise par note ", j'aime avoir cette liberté qu'offre
le studio. Se dire que l'on peut essayer plusieurs options, et
même essayer de nouvelles idées qui apparaissent
pour la première fois pendant l'enregistrement ! Et je
dois dire que je trouve ce face à face studio/live très
intéressant ; deux atmosphères, deux situations
totalement différentes qui donnent à entendre de
jeu différents.
Avez-vous souvent eu l'occasion de donner
des concerts avec la Staatskapelle Dresden et Fabio Luisi ? Combien
de temps avez vous pu notamment travailler ensemble sur cet enregistrement
et qu'appréciez-vous chez ce chef d'orchestre et l'orchestre
lui-même ?
L'enregistrement a été ma première collaboration
avec Fabio Luisi et la Staatskapelle de Dresden. Je connaissais
bien sur la réputation de l'orchestre et l'avais déjà
entendu, mais de jouer avec eux fut un réel choc ! Quel
homogénéité de son ! En plus d'être
une merveilleuse " machine " qui fonctionne absolument
parfaitement, ce sont des musiciens attentifs et engagés.
Je connaissais également la réputation de Fabio
Luisi, musicien exceptionnel bien sur, mais surtout un chef qui
vous porte, en qui on peut avoir une confiance totale. Ce sont
des qualités primordiales, surtout quand il s'agit d'un
enregistrement live.
Nous avons eu quelques répétitions pour apprendre
à se connaître très rapidement. La musique
a le pouvoir " d'accélérer " le processus
normal des choses ! Je m'explique : si les personnalités
s'accordent, cela va très vite ! On se comprend, on sent
ce que l'autre veut faire et on s'accompagne mutuellement ! C'est
un sentiment fantastique ! Pour ce répertoire, avoir
un orchestre et un chef de cette qualité est un atout immense
car tout devient faisable ! Juste avant le concert, Fabio Luisi
m'a dit " sois libre, nous sommes là ",
quelle merveille ! Car c'était vrai.
Vous avez choisi d'enregistrer les quatre
ballades, pensez-vous que ce sont les uvres les plus ambitieuses
de Chopin et sont-elles à votre avis les plus difficiles
à interpréter, comment les situez-vous par rapport
à ses autres uvres...quel travail particulier vous
ont-elles
personnellement demandé ?
Les Quatre Ballades sont pour moi (avec les Préludes)
la quintessence de l'uvre de Chopin. J'aime beaucoup leur
" format ", entre 8 et 13 minutes, cela permet un réel
voyage musical, sans être trop imposant. Ce sont les premières
uvres de Chopin que j'ai abordé, c'est également
sûrement la raison pour laquelle je m'en sens si proche.
J'ai joué la 4ème la première fois lors d'un
concours en 2000 ! Donc, j'ai réellement vécu avec
ces uvres. Je dis toujours ; pour moi Chopin c'est "
l'espoir désespéré " ; je ressens très
fortement un sentiment d'espérance, de volonté d'y
croire encore, avec en toile de fond, l'extrême conscience
de l'impossibilité de l'aboutissement de cet espoir.
Tobiasb Niederschlag, auteur du livret
de votre disque indique que contrairement à ce qui a parfois
été dit les textes du poète Mickiewskicz
n'ont eu sans doute qu'un rôle de suggestion mais que leur
tonalité épique est avant tout suscitée par
les mesures 6/4 ou 6/8 de la
danse traditionnelle polonaise qu'était la ballata. Qu'en
pensez-vous personnellement : notamment avez vous eu l'occasion
de lire les poèmes cités en référence
et d'écouter des ballatas polonaises ?
J'ai bien sûr écouté des danses polonaises,
dès que l'on aborde l'uvre de Chopin, c'est essentiel.
J'ai également lu quelque poèmes, et en effet leur
tonalité épique participe à la compréhension
de l'esprit des Ballades.
Quelle est la ballade que vous préférez
? pourquoi ?
C'est une question très difficile ! J'hésiterais
beaucoup entre la 1ère et la 4ème, mais si je dois
absolument choisir, je dirais la 4ème . A mon goût,
la plus puissante ainsi que la plus aboutie des Ballades. Le thème
lancinant du début que Chopin va développer continuellement
me fascine ! On traverse énormément d'émotions
en jouant/écoutant cette pièce. C'est un réel
voyage qui ne peut laisser indifférent.
Dans le second concerto de Chopin le piano
tient une place primordiale l'orchestre restant plus discret,
comment vivez-vous cette position par rapport à d'autres
concertos ?
Je considère plus les Concertos de Chopin comme des uvres
de musique de chambre. L'orchestre et le piano dialoguent, mais
tout en délicatesse. L'accompagnement de Chopin est un
défi pour l'orchestre et le chef. Car en apparence, l'orchestre
n'a pas une place primordiale. Mais c'est tout à fait paradoxal
car ce que fait l'orchestre, et comment cela est fait, est essentiel
! C'est l'écrin qui doit absolument mettre en valeur la
pièce! Et que cela est difficile ! Et c'est pour cela que
je suis très heureuse d'avoir eu la chance d'enregistrer
avec la Staatskapelle de Dresden et Fabio Luisi, car tout était
possible avec eux !
Quels sont vos prochains concerts et autres
éventuels projets ?
Je pars jeudi à Singapour, pour la 1ère fois,
je suis très curieuse ! Après des tournées
en Allemagne, Autriche, USA et Espagne, je serais au TCE pour
un récital le 24 janvier, j'attends ce moment avec beaucoup
de plaisir !
A voir : Lise de la Salle / Chopin / enregistrement
du CD
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des extraits du disque
Chopin
Ballades, Concerto n°2
de Lise de La Salle
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