Haydn Hummel Trios avec piano TRIO CHAUSSON

HAYDN - HUMMEL
Trios avec piano

Haydn (1732 -1809)
- Trio en ut majeur Hob. XV:27
- Trio en sol mineur Hob. XV:1
- Trio en mi mineur Hob. XV:12
Hummel (1778 -1837)
- Trio n°2 en fa majeur opus 22

TRIO CHAUSSON

Philippe Talec, violon
Antoine Landowski, violoncelle
Boris de Larochelambert , piano

Ce disque est le cinquième enregistrement du Trio Chausson, fondé en 2001. Consacré essentiellement à des oeuvres de Haydn, il permet de découvrir un compositeur moins souvent joué, Hummel, ici avec son Trio n°2, dont eux-mêmes n'ont fait la découverte que lors de la préparation d'un concert pour la Folle journée de Nantes , où ils jouent très régulièrement. Une oeuvre qui, confie le pianiste Boris de Larochelambert à l'occasion d'un nouvel entretien à lire ci-dessous, les a beaucoup enthousiasmés.
Un enthousiasme qu'ils auront l'occasion de partager souvent dans les mois à venir puisque cet enregistrement, qui a été réalisé cet été au Centre des arts d’Enghien-les-Bains, s'inscrit également dans le cadre d'un travail en collaboration avec la mairie et le conservatoire d'Enghien-les-Bains , et qu'ils y débuteront bientôt des masterclasses.
La transmission musicale est en effet très importante à leurs yeux , ainsi leurs quelques interventions auprès de conservatoires, d'écoles primaires et de collèges leur ont permis de ressentir l'enthousiasme (et oui aussi ! ) des enfants pour la musique classique , qu'ils soient ou non musiciens, ce qui , confie encore le pianiste : "est plutôt rassurant dans le contexte culturel actuel...". Effectivement ce l'est, et il reste à espérer que ces interventions de musiciens dans les écoles se multiplient, étant donné la récente réorganisation du rythme scolaire.
Johannn Nepomuk Hummel, lui, eut la chance d'être l'enfant d'un musicien, ce qui lui a permis de rencontrer multiples compositeurs dont certains eurent une incidence sur ces propres compositions, et il est devenu un remarquable pianiste "il fut célébré comme « le roi des pianistes de son temps », admiré par Liszt et Chopin, et a formé quelques-uns des meilleurs virtuoses du XIXe siècle, tels Czerny, Thalberg ou Hiller", relate Adélaïde de Place, auteur du livret.
Et l'on mesure aussi l'importance de l'imprégnation musicale dans un univers où la musique classique a une place, certes très importante , et de l'influence de ses maîtres .
Né à Presbourg (Autriche) en 1778, il eut le privilège d'être élève de Mozart à Vienne. Enfant prodige, il a parcouru l’Europe avec son père, et s'est fait notamment entendre à Londres en 1792 dans un trio de ... Haydn, auprès du compositeur lui-même, qui, on n'en doute pas lui prodiga sûrement quelques conseils capitaux qui eurent pour lui une grande incidence sur ses compositions, et pas seulement , puisqu'il aurait été recommandé quelques années plus tard au prince Esterházy, auprès duquel il fut nommé en 1804, par Haydn , selon ses mots dans une lettre : « pour le suppléer étant donné son âge avancé ».
L'on sait que Hummel a entretenu des relations régulières avec Haydn, et il est possible que ce dernier ait consenti à corriger certaines de ses oeuvres... Le Trio n° 2 de Hummel, composé en 1799, n'a été édité qu'en 1807, ce qui laisse le temps d'y apporter quelques corrections si besoin il en a été .... Nombreux autres compositeurs célèbres ont bien sûr eut aussi des incidences sur son parcours ainsi le titre final de ce trio " Rondo alla turca", fait penser spontanément à Mozart, mais Haydn y est aussi bien présent, ainsi l'explique Boris de Larochelambert, précisant qu'on y entrevoit l'écriture romantique à venir . Il parait que son influence pédagogique fut ensuite aussi très importante, d'ailleurs pour ce qui concerne le piano, Hummel a contribué à transformer l'école du piano en Allemagne et sa méthode (en 1828) était considérée par Chopin comme l'une des meilleures ...
Oui car c'est bien cela avant tout qui donne vie à la musique : sa transmission d'une génération à l'autre. Son évolution au cours de la vie d'un compositeur ne manque pas non plus d'intérêt bien sûr, ainsi le Trio Chausson a choisi trois Trios de Haydn qui correspondent aux trois périodes créatives distinctes de sa vie.
Mais pour en savoir plus sur toutes ces oeuvres , le mieux est que vous lisiez l'entretien ci-dessus et écoutiez précisément ce mouvement final du trio de Hummel et vous procuriez ce disque. Le pianiste Boris de Larochelambert, comme le violoniste Philippe Talec et le violoncelliste Antoine Landowski, partagent leur passion pour ces oeuvres avec un enthousiasme auquel on ne peut qu'adhérer !
Et ils offrent ici un enregistrement que les enfants ou élèves à la rencontre desquels ils iront lors de multiples masterclasses, auront certainement grand plaisir à découvrir et (ré) écouter , et si vous-même , ou votre enfant, n'avez pas la chance de participer à l'une de leurs masterclasses ou concerts, procurez-vous ce disque . Car si un jour, par bonheur, vous avez l'opportunité de pouvoir les voir en concert, vous aurez déjà eu un début de "masterclasse" et la musique classique "en concert "live" (comme on dit en anglais, et donc vivante ) est toujours plus appréciable lorsque l'on va à la rencontre de musiciens dont on a pu entendre les enregistrements, comme l'inverse est vrai aussi !
Et puissent encore de nombreuses autres Villes, en cette période de restriction de leurs budgets,  par ce disque (qui témoigne d'un partenariat réussi avec la ville de Enghien-Les-Bains qui apporte la musique auprès des jeunes), être encouragées à contribuer à partager ainsi le plaisir de la musique classique en y ajoutant un brin de vie fort appréciable, et peut-être même pour certains déclencheur d'une carrière de musicien !
Le trio n°2 de Hummel est un des coups de cœur de votre trio de ces dernières années, pourquoi avez-vous choisi de l’enregistrer avec trois trios de Haydn plutôt que d’autres de ce même compositeur, moins connu et sans doute moins souvent enregistré ?
Le trio de Hummel présent sur le disque nous a en effet beaucoup enthousiasmés lorsque nous l'avons travaillé pour la première fois en vue d'une Folle journée. C'est une oeuvre qui conjugue rigueur et fantaisie, élégance et accents populaires (notamment dans son final "alla turca") et une forme de virtuosité qui prolonge celle de Mozart et Haydn en laissant entrevoir l'écriture romantique à venir.
Notre idée première était de consacrer un disque entier à Haydn, dont nous jouons les trios depuis le début de l'ensemble. Nous avons eu la chance de les étudier en long et en large en Allemagne et en Autriche grâce à l'ECMA, avec des chambristes admirables tels qu'Hatto Beyerle, Anner Bylsma ou Johannes Meisl, pour ne citer qu'eux. Ces années ont été pour nous l'occasion de revenir aux sources du style classique et de mesurer d'une part la force "idiomatique" du langage haydnien, et d'autre part l'incroyable liberté qu'il nous accorde... du moment que certains cadres sont respectés.
Nous ne souhaitions pas nous limiter aux trios de Haydn les plus régulièrement enregistrés, à savoir les derniers, londoniens. Haydn ayant connu trois périodes créatrices assez distinctes en ce qui concerne les trios, l'idée nous est venue d'en choisir un par période - pour illustrer l'évolution de son style. Les associer au 2e trio de Hummel, qui est pour nous le plus pétillant, nous permet de parcourir la période "classique", si brève, de sa naissance à son crépuscule.
Une question un peu longue, mais on parle peu souvent de Hummel ; pourtant ce musicien fut célébré comme « musicien de son temps », admiré par Chopin et Liszt, comme le rapporte Adélaïde de Place, auteur du livret. Vous même, en temps que pianiste du trio , que pensez-vous de la place accordée au piano dans ce trio n°2 par rapport à celle des deux autres instruments ? Et plus généralement que pensez-vous de la place de cet instrument dans ses autres œuvres de musique de chambre ou orchestrales ? Ses oeuvres ont, parait-il, parfois inspiré Beethoven, est-ce le cas dans l'une de ce disque ?
Le piano occupe dans ce trio une place relativement modeste lorsque le discours est commun; cependant, Hummel lui accorde quelques soli où la liberté et la fantaisie se font plus grandes. Le souci de structure prime dans le premier mouvement, de nombreux motifs s'échangent entre piano et cordes et le jeu est de rendre ces changements aussi imperceptibles que possible. Le second mouvement (thème et variations) offre successivement à chaque instrument la place du soliste ; Hummel s'y montre à mon sens très habile dans son traitement de la virtuosité de chaque instrument. Les textures sont toujours variées, surprenantes, quelles que soient les références que l'on a en tête. Le final, très éruptif, fait la part belle au piano, et laisse entrevoir - plus que les autres - le type d'écriture pianistique qu'Hummel développera plus tard, dans sa musique de chambre (septuor) ou ses concertos ; dans ce finale, on se rapproche de l'écriture pianistique de Beethoven, plus anguleuse, crépitante. C'est en ce sens qu'il m'apparaît comme un précurseur, non pas tant du langage, mais de l'écriture instrumentale à venir.
Hummel a entretenu des relations régulières avec Haydn et il est possible que ce dernier ait consenti à corriger certaines de ces œuvres, y a-t-il dans ce trio n°2 des éléments particuliers qui peuvent être plus particulièrement rapprochés avec la musique de Haydn ?
En effet, si globalement l'écriture de Hummel trahit un héritage mozartien (son rapport aux fonctions harmoniques, une forme d'innocence, la façon qu'a le premier mouvement d'introduire la danse avec grâce...), l'influence de Haydn se fait sentir dans l'imprévu, les contrastes accusés du second mouvement, une volonté de sortir des formes rigoureuses, ou dans sa façon d'intégrer des éléments populaires : on est finalement plus proche ici d'un rondo alla zingarese haydnien que de la marche turque mozartienne.
Haydn a souvent plus considéré les trios comme des sonates avec clavier et accompagnement , les trois trios que vous avez choisis sont de trois époques créatrices différentes, comment évolue la place du clavier et de chacun des deux autres instruments dans chacune d’elle ? En tant que pianiste y a-t-il une période de création de Haydn que vous préférez ?
Les premiers trios, représentés dans l'enregistrement par le Hob. XV:1 en sol mineur, accordent certes au clavier un rôle central, mais on sent la volonté de Haydn d'arriver à une émancipation des cordes. Le violon s'y voit parfois confier des thèmes quasi opératiques, comme celui du trio du Menuet, accompagné très sobrement par les deux autres instruments. Il exploite dès cette oeuvre un grand nombre d'interactions possibles entre clavier et violon, d'une doublure stricte à une polyphonie déjà audacieuse; on note aussi quelques dialogues entre les cordes (en bloc) et le clavier. J'aime beaucoup l'élégance que Haydn apporte à un matériau pourtant chargé de pathos et la façon dont le final rompt constamment la stabilité de la carrure, surprenant et destabilisant l'auditeur.
Le dialogue se développe beaucoup dans le trio suivant, Hob. XV:12 en mi mineur une oeuvre très dramatique dans laquelle Haydn emploie tous les moyens poétiques à sa disposition. Le violoncelle y conquiert peu à peu son indépendance et échappe quelques fois à la doublure de la basse, en particulier dans le final où il ne manque pas une occasion de s'encanailler.
L'indépendance des trois instruments est réelle dans le dernier trio, Hob. XV:27, chacun bénéficie d'un traitement virtuose propre, même si le violoncelle n'est jamais vraiment soliste. Haydn égale par moment Beethoven dans sa virtuosité pianistique à mon sens (je pense à certains croisements de mains ou certaines rafales d'octaves visiblement écrites pour ne être jouées glissando !) J'apprécie particulièrement les audaces d'écriture du finale (les appogiatures arrivant après les notes réelles créent des illusions auditives assez drôles).
Les oeuvres des périodes médiane et tardive de Haydn pour piano seul m'intéressent plus que celles de jeunesse : les dernières sonates en particulier et les variations en fa mineur vont parfois très loin dans l'expérimentation et l'engagement.
Dans votre partenariat avec la mairie de Enghien vous avez donné une masterclasse, est-ce une chose que vous faîtes souvent et en tant que trio comment procédez-vous , intervenez vous ensemble ou isolément ? Comment cela s’est-il déroulé à Enghien ?
Vous êtes aussi intervenus dans les écoles comment les élèves vous ont-ils accueillis et pensez vous en voir convertis, si besoin était , quelques uns à la musique classique par ce type d’action ou du moins avez-vous eu l’occasion de mesurer l’intérêt ou pas des élèves pour la musique classique ?
Nous avons en effet entamé un travail en collaboration avec la mairie et le conservatoire d'Enghien-les-bains ; les masterclasses sont à venir et nous avons pour l'instant présenté notre trio et joué pour les étudiants et professeurs, évoqué le répertoire sur lequel les masterclasses porteront, etc. Les réactions des élèves sont toujours très intéressantes : leurs questions sont souvent inattendues et montrent une curiosité qui nous réjouit. Nous procédons de la même façon depuis nos premières masterclasses : nous sommes tous les trois présents et chacun intervient en fonction de ce qu'il ressent, entend, imagine. Il s'agit bien sûr de ne pas se marcher sur les pieds et d'éviter la cacophonie pour que le public ait une chance d'en retirer quelque chose.. jusqu'ici nous nous en sommes bien sortis !
Nos quelques interventions auprès d'écoles primaires et de collèges autour de concerts ou de projets plus spécifiques nous ont permis de ressentir l'enthousiasme des enfants pour la musique classique, du moment qu'ils y accèdent de manière vivante, informelle et qu'ils peuvent s'identifier à ce que nous jouons - c'est en général l'école qui vient à la salle de concert. Nous avons souvent constaté que les non musiciens sont aussi demandeurs que les autres, ce qui est plutôt rassurant dans le contexte culturel actuel... Ces interventions sont en tout cas un grand plaisir pour nous et nous sommes heureux d'aider à mettre en contact les jeunes avec un monde sur lequel ils se font certainement des tas d'idées très éloignées de la réalité.
Quels sont vos autres prochains concerts et/ou projets ?
Nous participons depuis 2008 aux Folles journées qui sont un grand moment de partage et de découverte de répertoire.. le 2e trio de Hummel en est la preuve ! Parmi les autres projets les plus excitants de cette saison figurent le triple Concerto de Chausson - une très belle transcription du Concert op.21 réalisée par Mathieu Lamboley - que nous jouerons trois fois à Rouen et Clermont-Ferrand ; un concert au musée d'Orsay où nous ferons la création française de nos transcriptions de la Valse et de Shéhérazade de Ravel en compagnie de la formidable Marina Domashenko; notre premier concert au Danemark (festival de Vendsyssel).. et dans mon village d'enfance, Ottmarsheim, et sa magnifique abbatiale du XIIe siècle. Nous sommes également très impatients de débuter nos collaborations avec Miguel da Silva et Romain Leleu.


Pour écouter
Jo
hann Nepomuk Hummel
Trio n°2 en fa majeur
par le Trio Chausson
avec l'aimable autorisation
du label
Mirare
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