Fireflies Thomas Enhco Piano et compositions
Fireflies
Thomas Enhco, piano et compositions
Chris Jennings contrebasse
Nicolas Charlier, batterie
Dans la famille de Thomas
Enhco on est depuis nombreuses générations très
artistes et peut-être ne le savez-vous pas mais cette semaine
est la semaine... "bleue" ( semaine nationale des personnes
âgées et retraitées) dont c'est Gisèle Casadesus,
l' arrière-grand-mère du pianiste / violoniste /compositeur
, doyenne des comédiennes françaises qui en est la marraine,
celle-ci a déclaré :" En me demandant d'être
marraine de l'édition 2012 de la Semaine Bleue, vous m'avez beaucoup
touchée et j'ai accepté avec plaisir. J'ai bientôt
98 ans et la chance d'être en bonne santé, de pouvoir encore
exercer mon métier et d'être très entourée
par mes enfants, petits-enfants et arrière-petits-enfants."
... nul doute qu'elle doit être aussi beaucoup touchée
par cet album très personnel de son arrière petit fils
Thomas Enhco qui sort précisément cette semaine.
Un album dont le musicien signe toutes les compositions (sauf une de
Robert Schumann issu des "Scènes d'enfants"
: "Traumereï") . Autre coïncidence ... il a choisi,
pour être entièrement libre, de co-produire cet enregistrement
sous le... "Label Bleu" ! Un label connu pour fait qu'il soutient
les jeunes artistes depuis 1986 avant même que Thomas Enhco ne
soit né. C'est un disque riche en mélodies, comme il les
aime depuis toujours, dans lequel il a mis son âme d'enfant, et
plus encore qu'il offre... ainsi déclare-t-il à l'occasion
d'un nouvel entretien pour la sortie de ce disque à lire entièrement
ci-dessous : "J'ai toujours été attiré
par les alliances d'ombre et de lumière : enfant, j'aimais être
seul la nuit par ciel dégagé, pour voir les étoiles
; ou me cacher dans les recoins sombres d'une maison avec une bougie.
J'aime les lumières qui bougent : le feu, les phares des voitures...
et les lucioles évidemment. Toutes les histoires fantastiques,
de magie, d'amour et de fantômes qui peuplent mon imagination
servent de terrain, presque d'alibi à mes compositions. À
moins que ce soit l'inverse."
La musique du jazzman de vingt-trois ans comme l'illustre le titre
de son disque "Fireflies" (Lucioles en anglais) et
la photographie de la pochette de l'album est une musique pleine d'étincelles
lumineuses illuminant une musique sombre et mélancolique, une
belle exploration du clair-obscur de la musique, riche en émotions
et surprises. Au-delà de son âme d'enfant c'est un autre
talent d'artiste, celui de conteur mais aussi de comédien qui
endosse la peau d'un personnage sous lequel il cache sa vraie nature
que le musicien nous permet de découvrir, parfois seul au piano
( ainsi dans le très beau morceau à son âme soeur
"Soulmate to Lea" ) et le plus souvent accompagné
par deux musiciens qui lui donnent la réplique dans le même
langage complice. Un langage qui pourrait bien être celui d'un
sensible et fragile Schumann, d'un romantique de notre temps, langage
qui recherche la complicité de son auditeur tant dans des rêveries
poétiques telles " You're just a ghost " que
vous pouvez voir en fin de page, que dans des jeux plus animés
tel celui de "The outlaw" qui ouvre le disque... un
disque où l'on suit volontiers le "petit prince" du
jazz et son trio dans son royaume sous toutes les lumières. Un
album pour les oreilles de tous ceux de 1 à 130 ans qui
aiment prendre le temps de faire place à l'imaginaire et l'émotion,
pourquoi pas comme nous y invite Thomas Enhco, en regardant un paysage
s'animer peu à peu à travers "la fenêtre
et la pluie" ou dans un "Train de nuit" plein
de surprises tel celui dans lequel nous fait voyager le musicien en
compagnie de curieux et sympathiques êtres fantastiques ou encore
lors d'une belle "ballade nocturne" éclairée
par des étoiles et des "fireflies"...
Vous
aviez déjà enregistré avec le batteur Nicolas Charlier
votre précédent disque par contre Chris Jennings prend
cette fois la contrebasse , dans quelles conditions vous êtes-vous
connus et quel a été votre parcours ensemble ?
Nicolas est mon compagnon de route depuis... plus de 15 ans !
(on a commencé à jouer ensemble à l'âge de
8 ans et on ne s'est jamais séparés très longtemps).
C'est un privilège d'avoir une relation si soudée entre
musiciens. En plus, on est très amis ; ce matin, j'étais
avec un marteau-piqueur et un casque de chantier chez lui pour l'aider
dans des travaux... Quant à lui, il s'implique à fond
dans ma musique et j'ai une confiance absolue en lui.
Chris, je l'ai rencontré bien plus tard, il y a seulement 5 ans,
par le biais d'autres musiciens, lors de "home-sessions" que
l'on faisait parfois à Paris. Il vient du Canada, côté
Ouest. J'ai tout de suite été captivé par le timbre
de sa contrebasse, sa justesse, sa musicalité... c'est la première
fois que j'entendais un tel chant chez un bassiste... c'est extrêmement
rare. En juin 2010, au moment où je voulais faire évoluer
un peu le trio, je lui ai demandé s'il accepterait de faire une
émission de télé avec nous (TV5 Monde) ; il a dit
oui, c'était super et je l'ai tout de suite engagé pour
une tournée au Japon deux mois plus tard - tournée qui
a commencé par l'enregistrement d'un disque sorti au Japon uniquement.
Ce n'était pas évident au début, sa personnalité
musicale est si forte et unique, que l'on avait plus de mal à
s'adapter et à "se trouver" qu'avec des bassistes plus
traditionnels... mais je sentais un potentiel d'évolution énorme
pour le trio. Chris est un musicien unique, très exigeant avec
la "Musique" en général, qui n'aime pas les
concessions ni les choses pré-conçues. J'apprends beaucoup
avec lui, et petit à petit on a trouvé une complicité,
différente de celle que j'ai avec Nicolas. Chris a dix ans de
plus que nous, aussi, il s'est marié cette année, va avoir
un enfant dans un mois...
Vous dites dans les notes de présentation
du disque que vous appréciez le fait de venir tous trois de pays
et cultures différentes, pouvez-vous en dire un peu plus sur
Nicolas Charlier, n'est-il pas français comme vous et en quoi
est-il différent de vous culturellement et que vous apporte-t-il
... ?
Nicolas est belge. Son père, André Charlier, est un
grand batteur belge. Lui et le pianiste/organiste Benoît Sourisse,
avec qui il forme le formidable duo "Charlier-Sourisse", ainsi
que Didier Lockwood, nous ont beaucoup appris à Nicolas et moi,
au travers notamment de l'école CMDL (Centre des Musiques Didier
Lockwood ). Nicolas a baigné depuis tout petit dans le jazz,
le blues, le funk, les musiques du monde ; la batterie et les percussions
étaient chez lui ce que le piano et le chant lyrique étaient
chez moi : un grand bain bouillonnant ! Voilà entre autres ce
qu'il m'apporte : une culture du rythme et des musiques modernes très
développée. On a beaucoup appris l'un de l'autre.
Vous dites également que le trio est
un « moule idéal » et « évolutif
» , qu'appréciez -vous dans cette formule du trio et en
quoi le trouvez-vous particulièrement évolutif ?
Le trio piano-basse-batterie existe depuis presque un siècle,
il y en a des centaines d'exemples, dans des esthétiques très
différentes. C'est une formule parfaite, avec laquelle tout est
possible, tout est ouvert. Dans cette formation, j'ai l'impression de
pouvoir improviser aussi librement qu'en solo.
Chris est un vrai soliste, Nicolas aussi, et c'est génial qu'un
trio soit constitué de trois "vrais" solistes, car
alors, tout est permis : le groupe ressemble à un triangle qui
peut pivoter et changer de base à tout moment, et dont la longueur
des côtés varie constamment. L'échange entre les
musiciens y est très fort, les propositions fusent, les réactions
sont immédiates, spontanées. Il y a quelque chose d'à
la fois solide et fragile, en trio, profond et aérien, complexe
et parfois extraordinairement simple. Vous imaginez comme je suis heureux
d'être aux commandes d'un vaisseau aussi puissant et fascinant
!
Il est indiqué dans la biographie des
notes de votre disque que vous avez déménagé cette
année à New York, est-ce devenu votre résidence
principale ou est-ce ponctuel ?
J'ai reçu un coup de fil de mon producteur japonais, l'année
dernière en novembre, il m'a dit : "J'aimerais que tu
enregistres en janvier prochain avec Jack DeJohnette et John Patitucci
à New York, aux studios Avatar. Tu es d'accord ?" J'ai
cru que le sol se dérobait sous mes pieds ! Enregistrer avec
deux de mes plus grands héros, dans une ville où je n'étais
pas allé depuis 5 ans et qui m'intimidait beaucoup, et dans un
studio mythique... bien sûr que j'étais d'accord ! Ma petite
amie, Lea, m'a annoncé le lendemain qu'elle souhaitait passer
l'audition d'une prestigieuse école de théâtre à
New York, en janvier... ça tombait bien ! On s'est retrouvés
là-bas après mon enregistrement, elle a réussi
son audition et a été acceptée, on a cherché
un appartement, et un mois plus tard on était installé
! Cela faisait longtemps que j'avais envie de tenter l'expérience
new-yorkaise, sans jamais vraiment oser faire le saut. Aujourd'hui,
l'essentiel de mon activité de musicien se concentre en France,
au Japon et ponctuellement dans d'autres pays, et je passe environ la
moitié du temps à New York pour jouer et faire des projets
avec les musiciens de là-bas, et y construire quelque chose.
Je fais l'aller-retour presque tous les mois !
Le titre de votre disque : Fireflies (soit Lucioles
en français) évoque votre exploration du clair-obscur
de la musique qu'est-ce qui vous a donné envie de réaliser
cette exploration ?
J'ai toujours été attiré par les alliances d'ombre
et de lumière : enfant, j'aimais être seul la nuit par
ciel dégagé, pour voir les étoiles ; ou me cacher
dans les recoins sombres d'une maison avec une bougie. J'aime les lumières
qui bougent : le feu, les phares des voitures... et les lucioles évidemment.
Toutes les histoires fantastiques, de magie, d'amour et de fantômes
qui peuplent mon imagination servent de terrain, presque d'alibi à
mes compositions. À moins que ce soit l'inverse.
Vous aimez les belles mélodies, sont-elles
difficiles à faire entrer dans un « clair-obscur »
?
Les belles mélodies, celles qui sont évocatrices à
elles seules, et collent à la mémoire, me fascinent. La
mélodie doit raconter l'histoire, elle en est le narrateur. Je
ne fais pas de grande différence entre la mélodie écrite
et celle qui est improvisée : pour moi, c'est un seul et même
élan, à part que lorsqu'elle est écrite, j'ai le
temps de la peaufiner, de revenir sur mes choix... Le clair-obscur,
j'essaie de le sculpter dans la mélodie, les harmonies, les rythmes
et les timbres d'un morceau. Ça ne me semble pas difficile puisque
c'est le langage que j'adopte naturellement ; j'ai plus de mal à
faire du clair-clair ! La difficulté réside plutôt
dans le fait de chercher toujours plus loin pour affûter mes outils,
atteindre une plus grande finesse, de la vérité, de la
sincérité, et, aussi, oser me mettre en danger, casser
mes fondations à mesure que je construis pour me forcer à
être en évolution perpétuelle... rester fragile,
en quelque sorte.
En tant que leader vous avez, lit-on, «
imprimé le mouvement de la direction à prendre
» aux deux autres musiciens, mais est-ce vraiment aussi rigide,
quelle a été la part d'improvisation et les autres musiciens
ne vous ont-ils pas apporté aussi parfois une petite «étincelle
» pouvant changer la direction en cours de "trajet" ?
La part d'improvisation est très grande, dans tout ce que l'on
joue. Si vous voyiez les partitions de mes morceaux ! Il n'y a finalement
pas grand-chose dessus. Ce "mouvement que j'imprime"
est un style, une émotion, et les thèmes, bien sûr
; il est assez rare que je dise à l'un ou à l'autre quoi
jouer, je leur fais confiance et ils me comprennent bien. Les "étincelles"
que Nicolas et Chris apportent sont très nombreuses, et si je
les ai choisis, c'est parce que leurs idées et leur goût
me plaisent. Cela n'aurait aucun intérêt de les mettre
en cage ! Dans le morceau "Wadi Rum", par exemple,
ou dans "Open Your Door", lors de l'enregistrement,
il est arrivé qu'une partie entière du morceau, que j'avais
prévue, soit "zappée" parce que leur jeu m'entraînait
ici ou là... Lorsque l'on joue, on devient hypersensibles et
réceptifs, comme s'il nous poussait des antennes ; c'est un état
proche de la méditation, de la transe, et en même temps
de l'hyper-concentration ; c'est assez difficile à expliquer...
Ce disque est le premier qui comporte autant
de vos compositions personnelles , est-il plus important à vos
yeux pour vous que les précédents et quels sont les titres
dont vous êtes particulièrement heureux du résultat
?
C'est le premier album que je produis ! J'ai porté toutes les
casquettes sur ce projet : en ayant décidé d'être
mon propre producteur, j'ai franchi une étape cruciale : celle
de l'indépendance. J'étais LIBRE ! J'ai souhaité
réaliser un album qui me ressemblait vraiment, intimement, qui
raconte mes histoires et ait une cohérence du début à
la fin, alors j'ai été très exigeant et n'ai cédé
à aucune concession. D'abord, je me suis entouré d'une
équipe formidable, à commencer par mon manager et coproducteur,
Pascal Pilorget. J'ai choisi toutes les pièces, dont certaines
que j'ai jouées en solo ; puis, du choix du studio à celui
des bandes analogiques qui ont servi pour le mixage, en passant par
le piano fabuleux que j'ai déniché et l'ingénieur
du son à qui j'ai confié le projet, j'ai été
d'un perfectionnisme presque maniaque - j'ai fait faire trois masterings
différents avant d'être satisfait ! J'ai même chosie
la photographe et ai travaillé en amont avec elle pour arriver
à ce résultat. En revanche, lorsqu'il était l'heure
de jouer, j'oubliais tout ça et laissais libre cours à
notre expression à tous les trois.
Alors, en effet, cet album est vraiment personnel, et très important
à mes yeux, davantage que les précédents.
Vous aimez la musique de nombreux compositeurs
du répertoire classique mais dans ce disque dont toutes les compositions
sont de vous sauf une, celle-ci est comme dans votre précédent
disque issue des "Scènes d'enfants" de Schumann,
un univers qui semble assez proche du votre puisque vous dites d'ailleurs
que sur scène vous vous sentez tel un conteur ou un clown , ne
vous y sentez-vous pas aussi personnage et avez-vous envie de transmettre
votre musique aussi à un jeune public (et y -a-t-il déjà
un jeune public à venir parfois à vos concerts) ?
Schumann est merveilleux pour la beauté de ses thèmes,
la construction de ses pièces qui ressemblent parfois à
des standards de jazz, mais surtout leur capacité à nous
immerger dans des mondes beaux et profonds, peuplés d'êtres
fantastiques... Lorsque je parle du clown, ce n'est pas tant pour faire
allusion au cirque et au jeune public que pour évoquer l'immersion
totale dans un personnage : c'est soi, mais en même temps l'enveloppe
d'un personnage imaginaire nous protège et nous permet d'effacer
les barrières, de repousser les limites émotionnelles,
d'aller très loin, là où l'on n'irait pas en étant
simplement soi.
Je donne parfois des concerts pour le jeune public, et j'aime cela,
parce que les enfants sont le public le plus exigeant : si ça
ne leur plaît pas, leur attention vous est perdue. En revanche,
ils sont captivés par les histoires. J'aime à croire qu'ils
imaginent tous une histoire différente au même moment lorsqu'ils
assistent à un concert. En fait, les adultes aussi sont captivés
par les histoires ; il faut juste leur ôter leur carapace de connaissance,
de jugement et de règles !
Quels sont vos prochains concerts qui vous
tiennent à coeur et autres projets en cours ?
Le concert qui me tient le plus à coeur est celui que nous
donnerons pour fêter le nouveau disque, un mois après sa
sortie : le 15 novembre à Paris, au Musée de la Fédération
de Tennis - Roland-Garros, puis les deux concerts qui suivent, au Sunside
les 16 et 17 novembre. Sinon, le 18 octobre à Nîmes en
trio, le 21 octobre je serai avec mon frère David (trompette)
et ma mère Caroline Casadesus (chant lyrique) à Armentières,
puis en duo avec mon frère en tournée en Israël,
etc.
Le trio va évidemment être le projet le plus en avant prochainement
(on va même jouer à l'Olympia le 17 décembre !),
mais je me concentre aussi sur le solo, que je développe beaucoup
en ce moment, ainsi que le duo que j'ai avec Vassilena Serafimova (percussionniste
classique), duo passionnant et explosif, qu'il est très difficile
de décrire ! J'ai des groupes à New York, un projet pop
que je construis avec Nicolas Charlier, des musiques de film, des projets
ponctuels de grandes formations que je monte avec mon frère...
et je n'oublie pas le violon, qui est mon instrument secondaire, mais
que j'aime toujours et dont je joue en certaines occasions. J'essaie
aussi de devenir fort en yoga, en tennis et en planche à voile,
et de consacrer du temps à ceux que j'aime - c'est peut-être
la partie la plus difficile !
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- Agnès Jourdain
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