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Shostakovitch David Kadouch Quatuor Ardeo
Dmitri
Shostakovich (Dimitri Chostakovith)
24 préludes pour piano opus 34
quintette pour piano et cordes opus 57
David Kadouch, piano
Quatuor Ardeo
Le pianiste David Kadouch aime les uvres peu jouées
des compositeurs, et il lui arrive souvent de les programmer dans
ses concerts. Ainsi a-t-il donc pu enregistrer les 24 préludes
op. 34 de Chostakovich(1906-1975) pour le label Transart live
dont tous les disques sont précisément enregistrés
lors de concerts lors du festival des flâneries musicales
de Reims. Cet enregistrement est complété par le
quintette pour piano et cordes du même compositeur, qu'il
interprète accompagné d'un quatuor formé
exclusivement de musiciennes.
Si les préludes de Dimitri Chostakovich sont peu jouées,
celui-ci s'est cependant inspiré d'oeuvres plus réputées
pour écrire cet opus 34, en 1933, puisque le titre de l'oeuvre
comme sa forme est inspirée de ceux écrits quelques
années auparavant par ...Chopin (et oui encore lui !) dont
il avait beaucoup travailler les oeuvres car outre être
un compositeur de premier plan, il était également
un pianiste de haut niveau . Mais la personnalité de Chostakovitch
diffère de celle de Chopin, et bien que comme lui, il mette
aussi dans ses préludes une diversité d'états
pyschologiques très contrastés leur univers sont
éloignés et Chostakovitch se cache plus derrière
un humour caustique qu'il ne délivre pleinement et librement
ses états d'âmes. Un humour dont David Kadouch nous
dévoile toutes les subtilités dans une interprétation
d'une grande finesse qui alterne la variété de climats
de ces courtes pièces dans un très beau jeu aux
couleurs contrastées.
Le quintette pour piano et cordes, composé sept ans plus
tard, pendant la guerre mondiale, a valu à Chostakovitch
d'obtenir le prix Staline et une importante dotation d'argent,
elle a également été immédiatement
très appréciée du public, c'est d'ailleurs
Chostakovitch lui-même qui a sa demande tenait la partie
de piano à la "première", il n'avait accepté
la commande de cette oeuvre qu'à cette condition. Ici le
compositeur s'est inspiré de la musique baroque pour ce
qui concerne la forme mais là encore, c'est une oeuvre
très personnelle et d'une grande force évocatrice.
Les jeunes interprètes en font ici une interprétation
très prenante, et nous font rejoindre l'enthousiasme de
ce public pour cette oeuvre dont la gaieté et la gravité
se rejoignent dans la splendeur d'un langage à la fois
personnel et universel qui ne peut laisser personne indifférent.
David Kadouch a bien voulu répondre à quelques questions
pour présenter ce disque :
Quand avez-vous découvert la musique
de Chostakovitch, qu'en avez-vous pensé alors et quelle
place représente-t-elle aujourd'hui pour vous ?
J'ai d'abord découvert Chostakovitch avec sa valse bien
sur, quand j'étais tout petit. Puis sont venus les concertos,
les symphonies, les préludes et fugues et il y a de ça
4 ans, les 24 préludes op.34.
Cette uvre si singulière et puissante m'a tout de
suite happé et intrigué. Je me suis alors intéressé
à sa vie, et j'ai lu plusieurs de ses biographies. Chostakovitch
m'a dès lors fasciné ; malgré les répressions,
les difficultés terribles qu'il a pu rencontrer lors de
sa vie, il n'a jamais arrêté de créer et de
dénoncer dans sa musique de manière souvent implicite
l'obscurité de l'époque dans laquelle il vivait.
Les Préludes de Chostakovitch sont
inspirés par nombreux compositeurs mais plus particulièrement
ils "sont modelés sur les préludes de Chopin"selon
Remi Jacobs auteur du livret de votre album, que pensez-vous de
ces préludes en comparaison à ceux de Chopin ?
Les préludes de Chostakovitch peuvent être en effet
rapprochés de ceux de Chopin. A travers les tonalités
tout d'abord, puisque Chostakovitch utilise le même ordre
tonal que Chopin (cycle des quintes : tonalité Majeur et
son équivalent mineur). A travers implicitement quelques
préludes aussi, comme dans cet hommage ironique et humble
du dernier prélude, dans cette valse étourdie mais
très chopinienne du prélude n°17, dans les dissonances
du prélude n°2, ou encore dans l'écriture du
prélude n°23. Cependant, les préludes de Chostakovitch,
qui certes rappelle Chopin pour leur forme, restent une uvre
unique, et d'une inspiration profondément personnelle.
Chaque prélude est un petit univers à part entière.
Ne durant pour la plupart pas plus d'une minute, ils sont souvent
drôles, et toujours tragiques. Ce qui me fascine, c'est
la manière dont Chostakovitch poétise et rend presque
beau les travers, les mesquineries, et la fatalité de la
destinée humaine. Il juxtapose une valse avec une marche
funèbre, une petite fugue avec une berceuse, une cantine
avec une marche. Il rit et il pleure. A chaque fois que je joue
ces préludes, c'est un délice (souvent amer) de
voyager à travers ces différents mondes.
Quelle difficulté
particulière d'interprétation présente les
préludes de Chostakovitch ?
Les préludes de Chostakovitch sont difficiles parce qu'ils
sont très courts et extrêmement différents,
souvent même opposés. Il faut savoir donc changer
en quelques secondes d'atmosphère, de jeu, d'articulation
etc.
Je les ai travaillé en définissant consciencieusement
leur caractère, allant jusqu'à écrire des
histoires sur ce que m'évoquait chacun des préludes.
J'ai essayé aussi, dans la mesure du possible, de simplifier
leur structure harmonique pour m'aider à les comprendre
et à les analyser. J'ai découvert que chaque prélude
était écrit très clairement, très
simplement et reposait sur une forme souvent, tout à fait
classique.
Dans
quelles circonstances avez-vous rencontré le quatuor Ardeo
et comment avez-vous travaillé avec ces musiciens pour
cet enregistrement en concert ?
J'ai rencontré le Quatuor Ardeo à l'école
Reina Sofia où nous avons étudié ensembles.
Elles travaillaient alors avec Rainer Schmidt. C'est un groupe
très uni, elles ont une conscience professionnelle extraordinaire.
Elles savent analyser, travailler une uvre. Toujours humbles,
elles savent s'effacer derrière la musique qu'elles défendent.
Ce sont 4 musiciennes avec qui je prends énormément
de plaisir que ce soit en jouant ou en travaillant. Je pense que
nous avons une vision assez proche de ce que représente
la musique dans notre vie.
L'enregistrement du quintette de Chostakovitch et des préludes
s'est fait lors de deux concerts pendant " les Flâneries
musicales de Reims " (un concert étant dédié
aux préludes et un autre au quintette). Et nous continuons
à jouer ensemble puisque nous venons d'enregistrer en novembre
le quintette de Schumann.
Shostakovitch a accepté la commande
du Quintette pour piano et cordes en sol mineur op57 à
condition de tenir le piano lors de la première, pensez-vous
que dans sa composition Shostakovitch a privilégié
ce rôle tenu par le piano ?
Le piano a bien sûr une place importante dans ce quintette
mais son rôle varie tout au long de l'uvre. Il est
tout aussi important que le quatuor avec lequel il joue et dialogue.
Le piano annonce le quintette dans cette fabuleuse première
phrase d'introduction du premier mouvement, mais il accompagne
peu après aussi le chant mélancolique de l'alto.
Le piano n'est qu'une voix de plus dans la fugue déchirante
qu'est le 2ème mouvement. Il devient un instrument mécanique
répétitif, dans le 3ème mouvement. Il participe
comme le reste du quatuor à la suffocante marche funèbre
du 4ème mouvement. Puis dialogue légèrement
en apparence dans cette fin si émouvante du quintette.
D'inspiration baroque, ce quintette a
cependant des caractéristiques plus modernes, et il a remporté
un succès considérable lors de sa première
présentation moscovite. Que pensez-vous personnellement,
soixante dix ans après sa création de cette uvre,
vous semble-t-elle notamment toujours moderne aujourd'hui ?
Ce quintette est une uvre immense et magistrale, tout
aussi moderne aujourd'hui qu'il y a 70 ans. Intransigeante, directe,
et aride elle a valu à Chostakovitch le prestigieux prix
Staline. Pourtant elle est selon moi l'une de ses uvres
les plus critiques envers le totalitarisme.
On y voit un artiste, un peuple, résigné, désolé,
en deuil, plaintif. On y entend dans le 3ème mouvement
de fascinantes machineries qui tournent à plein régime
dans un faux optimisme suffocant. La conclusion du quintette,
innocente, naïve, presque belle est d'autant plus émouvante
car elle est précédée d'une marche funèbre
écrasante. Ce dernier mouvement si ironique, si déstabilisant
m'émeut à chaque écoute, et les derniers
accords en apparence légers et presque guillerets ne sont
ni soulagement, ni optimisme, mais plutôt résignation
et désolation.
Votre disque a été enregistré
en public, auriez-vous préféré qu'il le soit
en studio ou en quoi cela vous convient-il bien ?
Je pense que le live a souvent un discours plus cohérent
à mon goût que l'enregistrement en studio.
Le live possède souvent une énergie particulière,
car elle provient du concert. On y sent un élan général,
le plaisir des interprètes, l'excitation et la prise de
risques du moment. J'aime le côté risqué du
live. La musique y est plus vivante et reflète souvent
fidèlement la personnalité et le discours du musicien.
Pour écouter le prélude
opus n°2 de Chostakovitch
Interprété par David Kadouch
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Pour écouter
le prélude opus n°15 de Chostakovitch
Interprété par David Kadouch
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Pour écouter le prélude
opus n°16 de Chostakovitch
Interprété par David Kadouch
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