Bienvenue sur pianobleu.com le site des amateurs de piano !
Ensemble Contraste Masques de Karol Beffa
Karol
Beffa
Masques
Ensemble contraste
Les ombres qui passent(violon,alto, piano)
Mirages( piano 4 mains)
Supplique( violon)
Masques 1(violon, violoncelle)
Manhattan(alto et piano)
Masques 2(violon et violoncelle)
Milonga (alto et piano)
Après un disque paru chez le label Intrada qui nous a
permis de découvrir le talent d'improvisateur et de pianiste
de Karol Beffa(voir
ici) , ce nouvel enregistrement qui parait cette fois chez
le label Triton permet de découvrir le compositeur qu'il
est également et en l'occurence d'oeuvres pour musique
de chambre. Celles-ci ont pour l'essentiel été créées
au 21ème siècle et quatre d'entre elles sont pour
formations avec piano. Des oeuvres... contrastées et variées,
reflet musical de notre époque, que Karol Beffa a bien
voulu présenter, une occasion d'évoquer également
son actualité :
Comment est
né ce projet d'enregistrement avec l'ensemble Contraste
?
L'ensemble Contraste est un ensemble à géométrie
variable, dont les membres partagent une curiosité pour
les répertoires nouveaux et rares, ce qui ne les empêche
pas de se produire dans des programmes classiques et romantiques,
parfois panachés d'arrangements signés Johan
Farjot ou Arnaud Thorette - qui sont les directeurs artistiques
de l'ensemble. Contraste est composé de musiciens
que je connais pour la plupart depuis très longtemps, et
avec lesquels il m'a semblé naturel d'enregistrer
ce premier disque monographique de ma musique de chambre.
On a l'impression d'avoir affaire
à des pièces assez diverses, « contrastées
» justement...
C'est vrai que dès mes premières pièces,
vers 1997, j'ai ressenti le besoin d'écrire dans
des directions opposées : l'une, contemplative, introspective,
l'autre, souvent en forme de mouvement perpétuel,
qui tend à des effets d'accumulation d'énergie.
Alors que je rédigeais ma thèse sur les Etudes de
Ligeti, j'ai découvert que son style reposait lui
aussi sur cette dichotomie de langage, et qu'il l'avait
théorisé au point d'en faire le thème
d'une de ses oeuvres, Clocks and Clouds - clocks
pour une musique rythmique, hâchée, discontinue,
d'inspiration bartokienne, clouds pour une musique harmonique,
en suspension, continue, dans la filiation debussyste.
Quels sont
vos compositeurs de référence ?
Les compositeurs que j'apprécie le plus sont tous
de grands harmonistes : Bach, Schubert, Schumann, Brahms, Wagner,
Debussy, Ravel, Dutilleux...Le deuxième mouvement du
Trio "Les ombres qui passent" est placé sous
le signe de Bartok et de Ligeti, Mirages s'inspire parfois
de Dutilleux, Manhattan de pop et de rock, Masques II, revisite
la musique du Moyen Age et de la Renaissance dans un langage très
modal, presque non-modulant, un peu à la façon de
Pärt ou Gorecki. Ces diverses influences sont, je crois,
passées au filtre de ma sensibilité. A mon sens,
l'harmonie est au coeur de la musique, tous les autres
paramètres - rythme, thématisme, et d'une
certaine manière instrumentation - lui sont subordonnés.
Mais avec Bach, Ravel est mon compositeur préféré.
Les deux sont évidemment très différents
: Bach est le Maître incontesté du contrepoint, alors
que la musique de Ravel est rarement contrapuntique. J'admire
avec quelle perfection et quelle inventivité Ravel écrit
pour chaque instrument. Toutes proportions gardées, Masques,
en jouant sur les cordes à vide, renoue avec cette idée
d'une écriture instrumentale idiomatique. Par ailleurs,
dans la partie centrale de ces Masques, on décèle
une note de tragique. Sans doute ai-je été, même
inconsciemment, influencé par Ravel et son sens du tragique,
que l'on trouve même fugacement dans quantités
de ses oeuvres. Et cette touche de tragique, je me rends compte
qu'elle apparaît également au centre de Mirages
et des trois mouvements des Ombres qui passent...
Qu'est-ce qui caractérise votre
musique ?
Tout d'abord, je dirais que j'ai une prédilection
pour les climats en demi-teintes, crépusculaires. Ce qui
transparaît d'ailleurs dans le titre du Trio "Les
Ombres qui passent", à l'origine pour violon,
violoncelle et piano, mais qui est ici enregistré dans
une version violon, alto et piano (il existe aussi dans une formation
associant le piano, la clarinette et le violon - ou l'alto).
Il y a ensuite un goût pour les effets hypnotiques, que
ma musique soit "clocks" ou "clouds". Par
ailleurs, du côté de la forme, ma musique suit souvent
une idée générale en forme de déploiement
: un thème apparemment serein se métamorphose, parfois
jusqu'à la dissolution, comme miné par un poison
intérieur (voyez Masques I, Mirages, Manhattan...).
Je crois enfin que, si la musique contemporaine perd beaucoup
à se priver de ces éléments essentiels que
sont l'harmonie et la pulsation, le thématisme au
contraire, ne m'apparaît pas indispensable : je lui
préfère des combinaisons de motifs, qui se retrouvent
d'une façon parfois obsessionnelle d'une oeuvre
à l'autre.
Avec Mirages, vous figurez également
sur ce CD en tant que pianiste...
Toutes les formations associant le piano à d'autres
instruments (ou à lui-même...) m'intéressent.
J'ai déjà écrit pour deux pianos, et
j'envisage de continuer dans cette direction Première
de mes pièces pour piano à quatre mains, Mirages
est une commande du festival de Saint-Lizier, dont la thématique,
l'année de la création - 2003 - ,
était : « A la manière de... ». D'où
les réminiscences de Ravel (Concerto en sol), de Dutilleux
(Sonate pour piano) et, dans la partie centrale, l'ombre
de Ligeti qui plane. L'oeuvre a été créée
par les soeurs Lafitte, qui l'ont rejouée plusieurs
fois depuis. Je l'ai jouée moi-même de nombreuses
fois avec Bertrand Chamayou, Jonas Vitaud, Jonathan Gilad, et
surtout Lorène de Ratuld. J'ai tenu à ce qu'elle
figure sur le CD, et il m'a semblé normal de la jouer
avec Johan Farjot, ami et complice de très longue date.
Récemment votre concerto pour piano
a été créé par le pianiste Boris Berezovski
? Comment avez-vous vécu personnellement cette création
et avez-vous l'intention de jouer aussi un jour ce concerto ?
Ce concerto est un condensé des difficultés techniques
qui guettent un pianiste : vitesse, déplacements, endurance,
sens du rythme et des déhanchements... J'ai été
très touché de voir combien Boris Berezovski s'est
approprié l'oeuvre, sans que j'aie besoin de lui préciser
les intentions musicales : il les devinait d'emblée. Le
reste est accessoire, et en grande partie affaire de goût
: tempo, nuances... Je ne suis pas sûr de pouvoir jouer
ce concerto un jour, ou alors il faudrait que je fournisse un
travail de dingue (et encore...) ou que j'imagine une version
plus accessible (ce qui ferait sans doute perdre au concerto une
partie de son intérêt...). Boris le joue très
bien et m'a dit plusieurs fois qu'il était très
désireux de le redonner en concert. Vu l'accueil qu'il
a reçu les deux fois où il l'a joué, je pense
qu'il pourrait en être un fabuleux ambassadeur. A suivre...
Sont également enregistrées
sur ce CD deux pièces pour alto et piano, une formation
plus rare que celle associant le piano au violon, ou au violoncelle.
Pourquoi l'alto ?
Depuis longtemps, Arnaud Thorette - à l'alto
- et Johan Farjot - au piano ou à la direction
(de choeur ou d'orchestre) - défendent ma
musique. J'ai confiance en leur jugement, je suis à
l'écoute de leurs suggestions et de leurs conseils.
Et j'ai eu envie d'écrire pour le duo qu'ils
forment.
Ainsi, c'est parce que, passionnés de Gardel et de
Piazzolla, Arnaud et Johan me pressaient de leur écrire
un tango, l'idée m'est venue de composer Milonga,
un hommage explicite à Piazzolla mais qui, comme Oblivion
(2008, pour orchestre à cordes), ne retient du compositeur
argentin que l'esprit, pas la lettre. Il n'y a aucune
citation textuelle, mais j'ai emprunté au grand compositeur
argentin l'idée d'une musique à la fois
sophistiquée et immédiatement accessible. De toutes
les pièces qui figurent sur ce disque, c'est la seule
qui peut relever du pastiche (raison pour laquelle j'ai décidé
de la faire figurer en fin de CD, comme on le ferait pour un bis
à la fin d'un concert.
Quant à Manhattan, c'est le type même d'une
partition clocks, avec de la vitesse, de l'énergie,
du dynamisme. De toutes les pièces qui figurent sur ce
CD « Masques », c'est certainement celle pour
laquelle le va-et-vient entre le compositeur et l'interprète
a été le plus enrichissant. Johan m'a suggéré
certaines précisions de tempo et de caractère ;
Arnaud m'a recommandé des ajustements, des octaviations,
en m'incitant à explorer le grave de l'instrument.
C'est une pièce très virtuose qui fait toujours
énormément d'effet quand ils la jouent en concert...
J'ai écrit d'autres pièces pour cette
même formation (regroupées dans le recueil Cinq Pièces
pour alto, chez Billaudot). Elles sont de difficultés très
variables.
Il y a quelques années, vous nous
aviez parlé de votre goût pour le cinéma et
de votre désir d'écrire pour l'image.
Avez-vous eu l'occasion de concrétiser ce rêve
?
Oui, et cela me procure de très grandes satisfactions.
J'ai écrit la musique du documentaire de Benoît Rossel
intitulé Le Théâtre des opérations
(qui a reçu le Prix du cinéma suisse TSR au festival
Visions du réel à Nyon en 2007), pour laquelle la
plupart des musiciens sollicités sont des membres de l'Ensemble
Contratse. Par l'intermédiaire de Benoît Rossel,
j'ai été en contact avec deux réalisateur
: d'abord Stéphane Breton, avec qui j'ai travaillé
pour la musique de deux de ses films : Le Monde extérieur
et Nuages après la pluie ; ensuite Jean-Xavier de Lestrade
(auteur, notamment d'Un Coupable idéal, Oscar 2002 du meilleur
documentaire) dont j'ai écrit la musique du premier film
de fiction : Sur ta joue ennemie. (La partition a été
sélectionnée pour le Prix France Musique de la meilleure
musique de film 2008.) Depuis, j'ai également écrit
la musique du Fil, premier long-métrage de Mehdi Ben Attia,
qui sortira en salle en janvier 2010, et du Voyage américain
de Philippe Séclier, qui est parti sur les traces du photographe
Robert Franck, auteur du livre aujourd'hui cinquantenaire Les
Américains. J'ai par ailleurs d'autres projets avec Mehdi
Ben Attia (notamment pour son deuxième film de fiction,
qui devrait s'appeler Alter ego) et avec Ollivier Pourriol. Ce
devrait être l'occasion de jouer pour l'un le rôle
d'un prof de sciences po, pour l'autre le rôle d'un pianiste
: dans les deux cas, la fiction n'est pas très éloignée
de la réalité...
Pour écouter
les trois premières minutes de
Mirages de Karol Beffa par Johan Farjot et Karol Beffa
cliquez sur le triangle du lecteur ci-dessous
Pour écouter des extraits et/ou vous procurer ce disque.....cliquez
ici(amazon) ou cliquez
ici(fnac)