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Felix Mendelssohn Romances sans paroles Shani Diluka
Felix
Mendelssohn
Romances sans Paroles
Shani Diluka
Après un premier disque de "Pièces lyriques"
de Grieg la pianiste Shani Diluka revient avec un nouveau disque
de "Romances sans paroles" de Mendelssohn également
très lyriques qu'elle a choisi de faire découvrir
dans un univers très poétique pour mieux en partager
l'émotion. Elle apporte en effet une contribution personnelle
en associant à chacune des dix "Romances sans paroles"
qu'elle interprète un vers issu d'autres "Romances
sans paroles" écrites par Verlaine, à la
manière des titres elliptiques qu'utilisait Debussy pour
faire deviner sans dire, jetant ainsi un pont entre le monde de
la musique et celui des textes.
La démarche est d'autant plus intéressante que
ce recueil de poésie fut écrit quelques années
plus tard par Verlaine précisément en hommage aux
pièces éponymes de Mendelssohn, tout comme les "Romances
sans paroles" musicales elles cherchent à traduire,
sans toutefois l'exprimer, un sentiment intérieur porté
par le lyrisme des mots. Pianiste au jeu d'une grande intériorité,
Shani Diluka nous transmet avec une rare sensibilité les
sentiments qui habitent ces Romances sans paroles. A une sélection
de dix pièces issues de la cinquantaine de "Romances
sans paroles" elle a choisi d'ajouter "Les Variations
sérieuses", la Fantaisie en fa dièse "Sonate
écossaise" et une transcription de l'andante du Trio
n°1 qu'elle a écrite elle-même. Au moment même
de la sortie de son disque un heureux hasard l'a conduite à
Concarneau, où est "ancré" pianobleu.com,
une belle opportunité pour lui poser quelques questions...
Qu'appréciez-vous particulièrement
dans la musique de Mendelssohn ?
Selon moi, Mendelssohn est une des figures les plus importantes
du XIXe siècle dans le romantisme et il se place ainsi dans
la transition avec le classicisme puisqu'il a fait redécouvrir
Bach à toute l'Europe. Étant également un grand
virtuose, sa musique est marquée par une grande sincérité
et pureté, une sorte de quête de beauté et en
même temps teintée d'une certaine nostalgie. La
plupart des musiciens reconnaissent en lui le génie mais
le grand public ne le connaît pas encore très bien.
Pour moi il représente aussi la lignée de la pensée
allemande, admirateur de Beethoven, il lui a dédié
les Variations sérieuses. C'est donc un musicien riche de
plusieurs courants artistiques, et au-delà de la musique,
il appréciait l'art dans son ensemble.
En effet, il a su mettre les arts en valeur et le défendre
dans toutes ces formes : il avait par exemple, créé
avec Schumann un magazine littéraire, et s'intéressait
aussi à la peinture, peignant lui même des aquarelles.
Pour lui l'art se concevait dans sa globalité : "l'art
total".
Il y a des similitudes entre les Pièces
lyriques de Grieg que vous avez précédemment enregistrées
et les Romances sans paroles, c'est une forme que vous appréciez
particulièrement ?
Pour moi le chant est très important, et je pense que c'est
l'inspiration première de tous les grands compositeurs, finalement
ce que nous essayons nous pianistes est de faire oublier la verticalité
de la mécanique, et de faire chanter le piano. Grieg a composé
les pièces lyriques en hommage à sa femme qui était
chanteuse et Mendelssohn adorait les lieder. Part ailleurs, la traduction
exacte des "romances sans paroles" devrait être
"Chant sans paroles", on retrouve effectivement dans l'oeuvre
de ces deux compositeurs l'idée de chant. Je trouve essentiel
ce coté lyrique, j'ai beaucoup travaillé le lied avec
des chanteurs, et la relation du chant et du piano avec Jorge Chaminé.
J'ai d'autre part exploré tout le cycle "L'amour
et la vie d'une femme" de Schumann, "Le voyage d'hiver
de Schubert", des lieder de Brahms, de Beethoven... et j'ai
retrouvé ce lyrisme dans les "Romances sans paroles
" de Mendelssohn. Lui-même disait qu'il pensait à
des mots quand il les composait mais qu'il ne voulait pas les dire...
il y a donc une sorte d'ambiguïté poetique avec le mot.
La poésie représente pour moi l'ambivalence entre
le mot, le chant et la musique.
Tout comme les pièces lyriques de Grieg les Romances sans
paroles sont des pièces miniatures où beaucoup de
choses se passent, elles se suffisent en elles-mêmes et sont
comme un journal intime ou un recueil de poésie. J'aime effectivement
cette intimité et cet essentiel minimaliste des deux compositeurs.
On retrouve aussi cette forme courte dans beaucoup de pièces
de Schumann, les mazurkas de Chopin, les intermezzis de Brahms...
Si l'on compare la forme des pièces de Mendelssohn à
celles de Grieg, On découvre plus de polyphonies et de structure,
bien que les deux compositeurs soient de lignée allemande,
ayant tous deux étudié d'ailleurs à Leipzig.
Mon éducation musicale étant plutôt de cette
école. Dans mes programmes, J'ai fait des concerts assemblant
des oeuvres de Grieg et Mendelssohn mais aussi Beethoven et Mendelssohn
et j'ai aussi l'intention de faire un programme de concert autour
de Bach et Mendelssohn en 2009.
Comment vous est venue l'idée d'associer
des vers des Romances sans paroles de Verlaine et ces pièces
de Mendelssohn Lesquelles avez-vous découvertes en premier
?
Je m'intéresse depuis longtemps à la poésie
et souvent, avant de rentrer sur scène, je lis un poème,
cela me permet de déconnecter du monde réel et de
rentrer dans un monde ineffable... Je pense avoir découvert
les romances sans paroles de Verlaine, en premier lieu par Debussy
dont je connaissais les "Ariettes oubliés" extraits
des "Romances sans paroles" de Verlaine, la poésie
est présente d'ailleurs chez tous les compositeurs.
C'est en fait un cercle où tous les arts se rejoignent. Quand
je travaille Chopin, je lis Sand, Schumann je lis Hoffmann... J'ai
fait la traduction de textes de Heinrich Heine dans des cycles de
Schumann pour travailler le lien entre la parole et la musique.
Ici l'idée, c'est qu'il n'y a pas de vérité
absolue : Il est vrai que Mendelssohn disait qu'il ne voulait pas
mettre de paroles mais pour Verlaine la parole ne ferme pas la pensée.
Il a essayé ainsi de trouver le "Vrai vague" de
Mendelssohn et de rentrer dans cette abstraction, pour lui la musique
des mots est aussi forte que la musique elle-même mais ce
n'est pas une explication. C'est pour cela que ce que j'ai choisi
dans ce disque est tout à fait subjectif. J'ai d'abord choisi
la musique des Romances sans paroles de cet enregistrement puis
j'ai lu les poésies de Verlaine et j'ai choisi des vers qui
pour moi éveillaient mon imaginaire, comme je le fais en
lisant une poésie avant d'aller sur scène.
Ce qui pourraient éveiller ainsi les sens et l'imagination
de l'auditeur, créer une certaine ambiance et aider ainsi
à entrer dans un monde poétique.
Cela vous a-t-il été difficile
d'associer précisément un vers à une pièce
?
Pas vraiment. J'ai dans un premier temps repéré les
vers qui pour moi exprimaient des choses fortes et au fur et à
mesure que je jouais une romance je relisais ces phrases et souvent
l'une d'elles surgissait.
Qu'elle est la Romance sans paroles que
vous préférez ?
Cela est difficile de choisir, mais Je trouve que la pièce
numéro 4 de l'Opus 102 que j'ai associé au vers "Je
souffrirai d'une âme résolue" est particulièrement
émouvante. J'aime particulièrement l'opus 102,
dont Schumann disait aussi que c'était un des plus beaux
recueils. J'ai trouvé ce côté plus déchirant,
d'ailleurs composées après la mort de sa sur
chérie, Fanny Mendelssohn, plus bouleversant dans plusieurs
pièces de cet opus alors que je trouve qu'il y a quelques
pièces d'autres recueils qui sont moins réussies,
certaines sont plus "de salon", moins intenses certainement
emporté dans l'obligation sociale d'une certaine
séduction. J'ai choisi des pièces qui pour moi, ont
un caractère fort, une identité propre.
D'habitude on recense quarante-huit "Romances
sans paroles" regroupées en huit cahiers de six pièces,
où avez-vous trouvé l'Opus 102 n°7 qui figure
dans votre enregistrement ?
J'ai eu plusieurs éditions, et je l'ai trouvé dans
une ancienne édition de Durand, datant de cinquante ans après
la mort de Mendelssohn. Cet opus comme l'opus 85 est posthume. Mais
il est vrai que cela reste un peu flou car, dans d'autres éditions,
cette pièce ne figure pas.
Vous avez réalisé une transcription
de l'andante du Trio n°1 de Mendelssohn, cela a-t-il été
difficile ? Avez-vous le projet d'éditer la partition ?
Je l'ai souvent joué en musique de chambre. Je trouve que
c'est une des plus belles pages du romantisme et de la musique,
elle me bouleverse et il m'est arrivé souvent de réduire
les autres voix pour mon propre plaisir. Je fais souvent cela aussi
pour les oeuvres pour piano et instruments car j'aime ressentir
et entendre les autres voix, je le fais aussi pour des lieder, mais
d'habitude je n'écris pas ce que je joue, je réalise
ces réductions instinctivement, j'improvise en quelque sorte.
L'idée était de faire découvrir cette page
de la musique à ceux qui ne connaissent pas ou peu Mendelssohn.
C'est une petite porte pour que les gens accèdent à
d'autres facettes de Mendelssohn. Je l'ai joué devant des
amis violoncellistes et violonistes pour avoir leur avis, vérifier
que je les respectais et ils ont trouvé cela très
beau. J'ai passé néanmoins du temps sur l'écriture
car j'ai voulu bien équilibrer les timbres. Pour le moment
il n'est pas projeté de l'éditer.
Pourquoi avez-vous choisi d'ajouter à
ce disque les Variations sérieuses et la Fantaisie opus 28
?
Ce sont à mon avis deux pièces majeures de Mendelssohn
: "Les Variations sérieuses" au niveau de la forme
est vraiment un chef-d'oeuvre dans la proportion, dans le développement
des variations : il y a une recherche et une architecture très
fortes. Elle fait référence à Bach dès
le thème principal tout en ayant de grandes plages de romantisme
dans un final tragique. J'ai choisi La Fantaisie opus 28 "Sonate
écossaise " car c'est une uvre de grande
beauté,rarement enregistrée et d'ailleurs peu
connue également des pianistes. Mendelssohn commence à
déformer la forme Sonate vers la Fantaisie où les
éléments sont transformés tout au long de la
pièce dans l'idée allemande de « phantaisie
», la forme est beaucoup moins disciplinée qu'une sonate
tout en ayant l'idée des trois mouvements.le thème
principal du premier mouvement est très beethovénien
mais rencontre de gandes vagues d'impressionnistes à
la manière des tableaux de Turner. C'est une pièce
que je joue souvent en concert et le public est extrêmement
enthousiaste à son écoute.
Pour écouter la Romance
sans paroles opus 102 n°4 avec l'aimable autorisation du
label Mirare
utilisez ce lecteur, cliquez sur le triangle
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