Brahms Schumann Oeuvres pour piano et violoncelle

Johannes Brahms(1833-1897)
Sonate pour violoncelle et piano n°1 en mi mineur op.38
Sonate pour violoncelle et piano n°2 en fa mineur Op.99
Robert Schumman ( 1810-1856)
Fantasiestücke pour violoncelle et piano Op.73

Bruno Philippe, violoncelle
Tanguy de Williencourt, piano

A découvrir ce nouveau disque qui réunit deux jeunes talents français , le violoncelliste Bruno Philippe né en 1993 et le pianiste Tanguy de Williencourt , né en 1990, qui se sont rencontrés sur les bancs du conservatoire national de musique et danse de Paris. Outre le fait qu'ils offrent ici un très beau disque c'est pour les amateurs de piano, l'occasion de découvrir plus précisément le second de ces deux musiciens, qui a bien failli se lancer dans une autre carrière musicale s'il n'avait eu la chance d'être reçu dans la classe du pianiste Roger Muraro, et il a d'ailleurs déjà un autre disque au piano seul en préparation, et un en trio en projet, ce qui ne l'empêchera pas de poursuivre cette année ses études en classe de direction d'orchestre  !

Comme vous pouvez le voir dans la liste des oeuvres ci-dessus, le programme recoupe les deux sonates pour violoncelle et piano de Brahms avec une oeuvre de Schumann ce qui pourrait surprendre a priori puisque leur univers est différent ainsi le souligne d'ailleurs Tanguy de Williencourt dans l'entretien à lire ci-dessous " Plus on travaille leurs œuvres, plus on réalise à quel point leurs univers sont profondément différents[...]Jouer ces deux compositeurs nécessitent deux approches vraiment différentes." mais c'est aussi dit-il : "l'alchimie parfaite entre une puissante passion et une construction imposante et noble" et il est vrai que le programme, qui place l'oeuvre de Schumann entre les deux sonates, s'avère en fait non seulement passionnant mais tout à fait enthousiasmant !
A l'origine le cycle des trois Fantasiestücke de Robert Schumann, composé en deux jours seulement, fut écrit pour clarinette et piano, cependant Schumann précisa très vite que celles-ci pouvaient aussi être jouées sur instrument à cordes. Et l'on appréciera particulièrement le phrasé chantant et vibrant du violoncelle, un violoncelle qui a un magnifique son grave d'ailleurs et Bruno Philippe met fort bien en valeur le violoncelle Goffriller de 1693 en le faisant chanter magnifiquement, l'on comprend qu'il soit déjà lauréat de nombreux concours.
Les deux sonates de Brahms sont quant à elle aussi très différentes l'une de l'autre. Il est vrai que plus d'une vingtaine d'année les séparent. C'est à un ami violoncelliste auquel il doit un soutien pour sa nomination au poste de la direction de la Singakademie de Vienne que Brahms dédia la première d'entre elle écrite en fait sur une longue période : entre 1862 et 1865 et il en supprima le mouvement lent pour ne garder que les trois aux couleurs semblables, un couleur fraîche et enjouée qui contribue à ce que l'on lui donne parfois le surnom de "Pastorale" indique Gabrielle Oliveira auteur du livret. Cette sonate est dédiée à un violoncelliste, le piano ne s'efface pas pour autant, et ne se contente pas d'accompagner le violoncelle mais bien d'offrir un dialogue lyrique avec lui et le pianiste Tanguy de Williencourt de se montre un partenaire tout à fait à la hauteur du talent de Bruno Philippe, avec un piano aussi très chantant.
C'est lors d'un séjour près du lac de Thoune en Suisse, durant l'été 1886, que Brahms composa la deuxième sonate pour violoncelle et piano, d'une atmosphère très différente de la première. Celle-ci a gardé quatre mouvements, ainsi le mouvement lent est un adagio affettuoso qui utilise particulièrement les pizzicati du violoncelle ( le musicien joue avec les doigts) en alternance avec l'archet dans de splendides mélodies, accompagné par un piano dont l'écriture est contenue et sobre. C'est le mouvement qui suit, qui donne une place un peu plus importante au piano que vous pourrez écouter plus bas dans cette page ce qui vous permettra de mieux apprécier le talent de Tanguy de Williencourt. Vous pourrez également voir une vidéo comportant un des Fansiestücke de Schumann.
Dans quelles circonstances votre disque a-t-il pu être réalisé, notamment est-ce Bruno Philippe qui a fait appel à vous ou votre duo était-il déjà constitué depuis un certain temps ?
Nous jouons ensemble depuis maintenant 4 ans, et nous avons eu l'occasion de jouer dans de nombreux lieux, notamment à la Roque d'Anthéron, à la Kammersaal de la Philarmonie de Berlin, ou à la philharmonie de Saint-Petersbourg. Bruno Philippe est un violoncelliste exceptionnellement brillant pour son jeune âge (il n'a que 21 ans), il a déjà un palmarès de prix de concours impressionnant, et possède un jeu profondément sensible et plein de vie. Jouer avec lui est pour moi un plaisir toujours renouvelé tellement il amène à donner le maximum et à être constamment présent au cœur de la musique. Nous élargissons régulièrement notre répertoire en sonates qui embrasse déjà plusieurs sonates de Beethoven, Franck, Prokofiev ou Poulenc.
Pour l'enregistrement, Bruno a été nommé par Bruno Mantovani, directeur du conservatoire pour réaliser cet enregistrement, financé entièrement par un mécène, Patrick Petit, homme extraordinaire, mélomane et passionné. Je remercie Bruno de m'avoir inclus immédiatement dans le projet. Les deux sonates de Brahms étaient à notre répertoire depuis plusieurs années et nous les avions beaucoup jouées sur scène, il était donc naturel d'enregistrer ces œuvres et de compléter avec les Fantasiestücke de Schumann. C'est ensuite que le label Evidence Classics a proposé à Bruno de signer pour un premier CD. La fondation Banque Populaire, dont Bruno et moi sommes lauréats, offre également son aide à la sortie du CD.
Qu’appréciez-vous particulièrement dans la musique de Brahms et Schumann que ce soit pour piano seul , musique de chambre ou orchestre ?
On met souvent Brahms et Schumann dans la même case concernant leur musique, ce qui s'explique bien sûr par l'étroite relation qu'ils ont partagée et leur admiration réciproque, également parce qu'ils ont tous deux excellé dans les mêmes genres, piano, musique de chambre, lied et concerto/symphonique. Plus on travaille leurs œuvres, plus on réalise à quel point leurs univers sont profondément différents. Schumann nous emmène dès les premières notes dans un monde duquel on ne peut plus sortir, on est comme emportés, sa musique nous "prend". Chez Brahms, il y a une hauteur de vue qui donne à son œuvre la sensation d'une cathédrale, avec son architecture, sa grandeur et sa profondeur, c'est l'alchimie parfaite entre une puissante passion et une construction imposante et noble. Jouer ces deux compositeurs nécessitent deux approches vraiment différentes.
En tant que pianiste, que pensez-vous de la place donné au piano par rapport au violoncelle dans chacune des deux sonates de Brahms ?
Il y a une sorte d'équilibre "parfait" dans l'écriture de Brahms qui procure une forte sensation de plaisir à partager un discours musical. On termine un mouvement et on a le sentiment qu'il nous a offert tout ce dont on avait besoin, et le sentiment est encore plus puissant à l'échelle de l'œuvre entière.
Brahms a supprimé le mouvement lent de la première sonate, trouvez-vous que celui-ci fasse défaut ? Et que pensez-vous du surnom parfois donné à celle-ci : « Pastorale » ?
Brahms est d'une certaine manière un maniaque de la structure, dans le bon sens du terme. On sait à quel point il remaniait sans cesse ses œuvres, pour nous en offrir seulement ce qu'il considérait comme totalement abouti. S'il a supprimé le mouvement lent de la première sonate (qui deviendra celui de la deuxième), on peut lui faire totalement confiance ! En imaginant qu'il l'ai laissé, je crois en effet que les proportions de l'œuvre entière auraient été chamboulées, avec un trop grand poids émotionnel sur les deux premiers mouvements qui seraient trop éprouvants pour l'auditeur, et qui ne laisseraient pas leur juste place au menuet et au finale. Le premier mouvement est déjà un récit en soi, une phrase qui se renouvelle sans cesse. Le mouvement en fa dièse Majeur possède cette même vertu, mais aurait eu effet de doublon mis côte à côte. En trois mouvements, on accueille le menuet avec délectation et le finale s'impose avec évidence. L'autre raison est peut-être cet hommage aux formes du passé (contrapunctus, menuet, fugatto) qui couvre ces trois mouvements, alors que le mouvement lent en fa dièse Majeur est résolument romantique. J'imagine que le surnom "Pastorale" est donné davantage en raison du premier mouvement plutôt qu'à l'ensemble.
La seconde sonate a été composée vingt ans plus tard, trouvez-vous que le langage musical de Brahms a beaucoup évolué entre les deux , et est-elle plus difficile à jouer tant pour vous que le violoncelliste ?
On pourrait parler de la seconde sonate comme d'une symphonie pour violoncelle et piano. Son écriture est totalement orchestrale et la tonalité de fa Majeur nous fait immédiatement penser à la troisième symphonie, avec la même sensation "océanique" au début de leurs premiers mouvements respectifs. Cela la rend plus difficile pour le piano comme pour le violoncelle, tant du point de vue de la réalisation technique qui est plus fournie, que du point de vue des textures sonores plus complexes. Mais quel plaisir !
Avez-vous été parfois tenté , comme Brahms le fit parait-il une fois , de laisser libre cours au piano et ainsi écraser le son du violoncelle ou bien êtes-vous toujours en accord avec Bruno Philippe ?
On dit souvent que dans ces deux sonates, le pianiste doit faire "attention" à l'équilibre pour ne pas couvrir le violoncelliste. C'est parfois un peu réduire la chose à tout jouer moins fort, ou tel passage nuance piano au lieu de forte qui est écrit. En fait, à nouveau, si on pense plutôt en terme de timbres qu'en terme de volume, on va automatiquement faire les bons choix. Ainsi, chaque élément musical que Brahms fait vivre doit simplement trouver sa juste place par rapport à l'ensemble. Alors, on n'est plus dans le simple réflexe de jouer moins fort, ou pire d'avoir un rôle d'accompagnateur, mais bien dans la projection sonore d'un tout.
Avec Bruno, nous aimons beaucoup jouer et surtout pas trop parler, c'est la musique elle-même qui nous propose des directions d'interprétation, qu'on décide d'emprunter ensemble ou non. Je crois qu'ensemble nous n'avons pas écouté une seule version ni de Brahms ni de Schumann, on ne travaille jamais à l'appui d'enregistrement.
Les pièces de l’opus 73 de Schumann sont écrites à l’origine pour piano et instrument à vent, en quoi trouvez-vous que le violoncelle est aussi un très bon instrument pour les jouer et avez-vous eu l’occasion de les jouer avec instrument à vent ?
J'ai joué les Fantasiestücke avec clarinette, on n'a évidemment pas les mêmes sensations qu'avec le violoncelle, mais quel que soit l'instrument, le piano doit être tout au long de ces trois mouvements comme un large tapis sonore qui se déroule en avançant tout en restant souple.
Pourquoi avez-vous choisi d’insérer cette œuvre dans le programme de votre disque ?
Deux sonates de Brahms, c'est un programme assez compact et nous souhaitions qu'il y ait une œuvre plus aérée entre les deux, les Fantasiestücke que nous avions déjà beaucoup jouées se sont imposées naturellement.
Quels sont vos prochains concerts avec Bruno Philippe ?
Nous jouons Bruno et moi le 15 octobre 2015 à la salle Gaveau.
Et nous jouerons du 3 au 19 décembre dans 9 concerts à la salle Cortot autour des deux trios de Schubert (qui seront l'objet d'un enregistrement live) avec le violoniste Pierre Fouchenneret.

Pour écouter
Brahms Sonate pour violoncelle et piano en fa majeur op.99
allegro passionato
Bruno Philippe, violoncelle
Tanguy de Williencourt, piano
avec l'aimable autorisation
du label
Evidence
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ci-dessous

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A voir Robert Schumann, Fantasiestücke op 73, N°3 Rasch und mit Feuer
par Bruno Philippe (violoncelle) et Tanguy de Williencourt (piano)

Réalisation et montage : Jérémie Schellaert
Prise de son et direction artistique: Ulrich Katzenberger & Voicing

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