Johannnes
Brahms(1833-1897)
Une jeunesse intrépide
Nicolas Stavy
Ballades op.10
Thème et Variations en ré mineur( Version pour piano
du 2ème mouvement du sextuor à cordes op.18)
Sonate op. 5 en fa mineur
Dans son précédent disque, également édité
par le label Hortus, le pianiste Nicolas Stavy nous permettait
de découvrir avec Hélène de Montgeroult(1764-1836)
un programme "A la source du piano romantique"
, c'est ici, explique Rémy Strickner auteur du livret,
un programme né "aux derniers feux du romantisme"
(après la disparition de Mendelssohn, et de Chopin, et
alors que Schumann cesse de composer) qu'il a choisi d'enregistrer.
Les trois oeuvres appartiennent à la jeunesse de Brahms,
alors qu'il n'avait qu'une vingtaine d'année et déjà
un grand talent de pianiste virtuose. Nicolas Stavy les offre
dans une interprétation toujours très expressive
et nous permettant d'en apprécier toute la richesse sonore
sur un piano, Steingraeber E -272, qu'il a aussi soigneusement
choisi, ainsi pourrez-vous vous en rendre partiellement compte
dans un extrait de l'ambitieuse sonate op.5 en fa mineur qui foisonne
d'idées. Nicolas Stavy a bien voulu répondre à
de nouvelles questions pour présenter son disque :
Que représente Brahms dans votre
répertoire ?
C'est un univers musical qui me passionne et que j'aborde depuis
bien longtemps, tant le répertoire solo que la musique
de chambre ou avec orchestre. Concernant le répertoire
solo, j'avais, il y a bien des années, commencé
à travailler et jouer les uvres de la maturité,
les sublimes derniers opus. Puis je me suis attaqué aux
uvres de jeunesse.
Je suis aussi très attiré par les autres formations
: je joue les 2 concertos et un bon nombre de pièces de
musique de chambre (les 2 sonates en cours avec le clarinettiste
Patrick Messina) quelques Lieder.
En quoi la jeunesse de Brahms mérite-t-elle
selon vous le qualificatif " d'intrépide " ?
Pourquoi vous avez choisi d'enregistrer des uvres de cette
période de sa vie plutôt qu'une autre ?
Ce terme a été choisi par Rémy Stricker,
qui a rédigé le livret du disque.
Je pense que cette idée est particulièrement adaptée
à la 3e sonate. En effet, Brahms y dévoile déjà
(il a 21 ans !) une grandeur aventurière et une maitrise
de la construction hallucinante.
Paradoxalement, les Ballades, écrites très peu de
temps plus tard, semblent se rapprocher davantage des dernières
uvres, plus sombres, intimistes et profondes.
Je suis passionné par ces uvres moins fréquemment
jouées que les dernières de Brahms. Elles dévoilent
déjà tout son univers futur. Il n'est peut-être
pas encore Maitre de son écriture pianistique définitive
(notamment dans la sonate, ce qui représente une de ses
grandes difficultés : la " matière sonore "
surtout dans le final, est difficile à densifier et à
remplir en comparaison par exemple à son futur 2e concerto)
Votre précédent disque de
Chopin comportait une Ballade de Chopin, que pensez-vous des Ballades
de Brahms comparativement à celles de Chopin ?
On peut bien entendu difficilement imaginer qu'il ne puisse
s'agir, au moins de façon cachée, d'un hommage Toutefois,
on est ici bien loin de l'univers de Chopin. Le point commun est
bien sûr l'essence même d'une Ballade, à savoir
une pièce qui illustre une histoire.
Brahms est resté discret sur le sens de ces histoires (sauf
pour la première). La dédicace à Grimm est
certes importante, mais sa musique va bien au delà d'une
illustration d'un conte : on entre dans un monde de mystère
intime, comme si l'histoire en question était celle que
chaque auditeur inventait à l'écoute.
Les quatre Ballades de Chopin ont été écrites
à des périodes différentes, elles n'ont pas
été conçues pour être jouées
ensemble. Les Ballades de Brahms forment un unique opus et me
semblent n'avoir un sens que si on les joue ensemble. Elles s'enchainent
et se répondent comme quatre mouvements d'une même
uvre. La quatrième, tellement magistrale est sublimée
par les trois qui la précèdent.
On a parfois voulu voir dans le troisième
sonate de Brahms un auto-portrait, partagez-vous cet avis ?
Cette uvre est un monument très architecturé
et contrasté. Il est très difficile d'émettre
un avis sur une telle question, car je n'ai pas eu le bonheur
de le rencontrer Plus sérieusement, il me semble
que toute grande uvre est d'une certaine façon un
autoportrait. Une grande uvre nait forcément de l'intimité
et des entrailles de son créateur, avec toute la force
et l'intensité que cela représente. Le mouvement
lent est à mon sens un des plus grands chefs-d'uvre
de la musique.
Comment peut-on à 21 ans faire passer autant de lumière,
d'intensité, de passion ?
Qu'est ce qui vous a donné l'idée
d'enregistrer la transcription pour piano du 2e mouvement du sextuor
à cordes op. 18 ?
J'ai découvert cette version que Brahms a dédiée
à Clara Schumann relativement récemment, il y a
quelques années. Comment se fait-il qu'elle ne soit pratiquement
jamais jouée ?
Je trouve admirable l'élan que Brahms a su donner dans
ces variations. Cette forme est habituellement construite autour
d'une succession de variations séparées. Ici, Brahms
construit une longue et ample ligne unique. Cela provoque une
grandeur considérable.
La version pour piano pose la difficulté de l'absence des
coups d'archet des instruments à cordes. Toutefois, le
piano permet d'obtenir une grande profondeur harmonique. Il faut
trouver un piano exceptionnel qui permet de développer
une riche palette sonore.
En quoi le piano Steingraeber E -272 que
vous avez choisi vous semble-t-il mieux adapté pour jouer
ces uvres ?
J'ai découvert le piano Steingraeber E272 il y a des
années lors d'une journée de présentation
par la Maison Magne. Il s'agissait alors d'un unique prototype.
J'ai été sidéré par la richesse de
cet instrument. On peut être surpris au premier abord, car
son esthétique se rapproche un peu des pianos des années
60 bien qu'il soit d'une conception absolument moderne. Il offre
un son extrêmement riche, profond et une palette sonore
inouïe. Ces qualités m'ont semblé particulièrement
appropriées à ce répertoire. Quelques mois
avant l'enregistrement, je suis donc allé à Bayreuth
à la manufacture découvrir l'usine et de nombreux
instruments afin de choisir celui sur lequel je voulais enregistrer.
Quels sont vos prochains concerts et autres
actualités ?
Le 4 décembre, une émission de Jean-Pierre Derrien
dans laquelle je parle des Ballades de Brahms sera diffusée
sur France Musique
Je serai ensuite le 5 à Irigny près de Lyon pour
un récital Chopin/Brahms, le 7 avec Françoise Masset
et Sabine Haudepin à Douai, et le 9 à St Germain
en Laye.
Je donnerai par ailleurs début 2010 un récital au
théâtre de l'Athénée à Paris
à l'occasion de la sortie de mon disque.
Pour écouter avec
l'aimable autorisation du label Hortus
Intermezzo - andante molto Sonate opus 5 en fa majeur-Johannes
Brahms
Nicolas Stavy, piano
disque hortus 068
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