Granados Danses espagnoles Guillaume Coppola

Enrique Granados ( 1867-1916)
Allegro de concierto
Danzas españolas (12 Danses espagnoles)
Guillaume Coppola, piano

Ce lundi 22 octobre 2012 à 20h, le pianiste Guillaume Coppola, donnera un concert au Théâtre de l'Athénée à Paris. Il s'agit du premier concert de la Saison "Les Pianissimes" qui a choisi d'accompagner la sortie du nouveau disque de Guillaume Coppola consacré, après un disque Liszt, à un compositeur qui lui tient aussi particulièrement à coeur depuis longtemps puisque dès son premier entretien pour piano bleu (en 2006) il déclarait son envie d'explorer la musique espagnole et plus particulièrement celle d'Enrique Granados qu'il trouve enivrante.
C'est donc désormais chose faite, cette exploration l'a conduit à Barcelone où il a pu recueillir nombreux témoignages et consulter des manuscrits et éditions annotés du compositeur catalan , une exploration si passionnante qu'il en a bien failli rater son avion de retour ainsi le confie-t-il à l'occasion d'un nouvel entretien à lire ci-dessous.

Enrique Granados lui-même séjourna à Paris où il suivi l'enseignement de Bériot et il a forgé son propre style en s'inspirant de la musique de son pays mais aussi de compositeur romantiques : Chopin, Schumann, Liszt et Schubert. Il a gagné le premier prix d'un concours du conservatoire de Madrid en 1904 avec son allegro de concert qui débute cet enregistrement, une oeuvre dont Guillaume Coppola "garde intact le choc ressenti [à l'âge de 14 ans] à l'écoute de cette musique bouillonnante et généreuse et de la sensation d'être emporté par un formidable souffle romantique" . Les Danses espagnoles sont une oeuvre de jeunesse qu'il composa à l'âge de vingt-cinq ans, elles furent publiées à Paris et eurent un succès européen très rapide, ainsi reçurent-elles des éloges de compositeurs : Saint Saens, Massenet mais aussi de Grieg , dont le style est proche ( Granados a été parfois surnommé le "Grieg espagnol" ) et ceux de César Cui, dont les idées sur le nationalisme musical rejoignent celles de Enrique Granados. Selon Christine Le Bordays, auteur du livret ( et d'un "que-sais-je" sur la musique espagnole) : "Les Danses font référence aux provinces ibériques, chaque style régional étant perçu sous son aspect chrorégraphique. Car ici , la danse n'est pas seulement suggérée, elle est presque omniprésente. Ce n'est pas un hasard si au temps glorieux du ballet scènique espagnol, les grandes compagnies de l'époque les ont si souvent intégrées à leur répertoire. C'est que leur fraîcheur, leur vitalité sont très bien mises en valeur par le brio des danseurs , qui correspond à celui du pianiste. L'interprète doit en effet posséder un talent très subtil ; sa virtuosité ne se contente pas d'être décorative, elle doit laisser transparaître une poésie singulière, où se conjugue netteté des contours, vibration émotive et insidieuse nostalgie. Ce talent porte un nom en Espagne , on l'appelle "la gracia" audacieuse innocence qui est le sel de l'expression artistique. C'est précisément cette "Gracia" qui m'avait séduite en Bretagne, alors que j'assistais à un récital de Guillaume Coppola. Et cette gracia que je retrouve intacte et sublimée , dans le présent enregistrement" ... il n'y a rien à ajouter à ces propos élogieux mérités comme vous pourrez le constater dans les deux vidéos qui suivent l'entretien avec le pianiste qui a bien en voulu en dire plus sur son concert de ce soir et son exploration à Barcelone !
Lors de notre entretien en 2006 vous déclariez : "J'aime la musique de Debussy que je joue depuis longtemps, avec toujours le même plaisir. Parmi les domaines que je souhaiterais explorer davantage,
figure la musique espagnole, particulièrement celle de Enrique Granados que je trouve très enivrante
" finalement bien que ce soit cette année une année anniversaire de Debussy vous avez donc choisi d'explorer la musique espagnole , Debussy lui-même a été influencé par la musique espagnole, et dans votre concert vous jouerez, outre des danses espagnoles de Granados, des oeuvres de Claude Debussy, la musique de Granados est-elle une des musiques espagnoles qui a inspiré Debussy (et notamment les Danzas) sachant que Granados a précisément étudié à Paris et écrit ces pièces lors de ses études entre 1889 et 1892, et que ses oeuvres ont reçu alors un accueil chaleureux de certains compositeurs ?
Debussy a eu l'occasion d'entendre à Paris de la musique espagnole "jouée par de vrais espagnols". Il parle également de "cette admirable musique populaire, où tant de rêve se mêle à tant de rythme, qui en fait l'une des plus riches en ce monde. " Sans doute a-t-il été influencé par ces prestations, mais il a peu connu Granados et leurs styles sont très différents. Certes, Debussy, dans ses pièces d'inspiration espagnole, écrit une musique où l'on sent une chaleur, une lumière violente et éblouissante ; et Granados a probablement hérité, lors de son passage en France, d'un raffinement dans le style (l'élégance française ?). Mais si je trouve intéressant de les jouer dans le même concert, c'est plutôt pour montrer le grand contraste qui peut exister entre deux compositeurs de la même époque, le langage de Debussy étant résolument tourné vers l'avenir, alors que Granados marche dans les pas de Chopin et Schumann, tout en sublimant la musique de ses origines.
Œuvres de jeunesse (leur auteur n'a pas 25 ans !), ces Danzas españolas n'ont pas la maturité des Goyescas, mais portent déjà en elles l'essence du langage du compositeur, avec une fraîcheur et une spontanéité qui en font de purs joyaux sonores. Ce n'est pas un hasard si elles ont immédiatement reçu un accueil chaleureux, de la part du public comme des collègues musiciens : Saint-Saëns, Grieg et César Cui notamment ont manifesté leur soutien et leur admiration.
Vous êtes allé à Barcelone à l'école Granados Marshall qui peut-on lire sur le site de cette école a été " fondée en 1901 par Granados combien de temps y êtes vous resté et qu'avez-vous précisément étudié en ce lieu et vous avez également consulté les manuscrits autographes et les premières éditions de Granados, au musée de Barcelone, pouvez-vous en parler , est-ce que tout musicien ou autre personne peuvent y avoir accès et en quoi cela vous a-t-il été utile ?
Mon séjour à Barcelone a été court mais très dense. En quelques jours j'ai pu visiter l'Académie Granados-Marshall qui est un véritable temple à la mémoire du Maître, et là on m'a aiguillé vers les Editions Boileau (le plus vieil éditeur de musique de Catalogne), et le Museu de la Musica qui possède quantité d'archives. J'ai fait un arrêt à la Bibliothèque de l'école supérieure de musique de Catalogne, et à chaque étape, je posais de nombreuses questions à mes interlocuteurs pour en savoir plus sur Granados, pour comprendre les variantes qui existent dans une même œuvre, et saisir la fameuse tradition de liberté qui est associée à son style.
J'ai ressenti la plus grande émotion lors de la consultation de certains manuscrits au Musée : me présentant comme pianiste, j'ai obtenu un rendez-vous avec la responsable du service de documentation. Elle m'a présenté un catalogue répertoriant les archives sur Granados, et j'ai sélectionné plusieurs documents. Je m'attendais alors à voir des fac-similés ou copies sur écran… Imaginez ma surprise quand j'ai ouvert le classeur et découvert des manuscrits autographes ! Cette démarche a été intéressante à plusieurs aspects : on apprend sur l'évolution de l'écriture, des premières versions à l'aboutissement, mais aussi sur la personnalité du compositeur, par sa manière d'écrire ! J'ai pu voir aussi l'orchestration par Granados de la 7e Danse, et l'utilisation de tel ou tel instrument donne des idées quant à la couleur sonore souhaitée, la texture du son, la dynamique…
Ont été consignées également les éditions annotées par le compositeur (partitions d'élèves ou de collaborateurs), qui montrent les changements souhaités après la première publication. Car Granados, en génial improvisateur, remaniait ses propres textes au gré de ses interprétations. Aujourd'hui, il existe une collection (dirigée par Alicia de Larrocha) qui recense les différentes sources.
De retour à l'Académie Granados-Marshall, j'ai eu la chance d'être accueilli à bras ouverts par Carlotta Garriga, qui a dirigé l'école pendant de nombreuses années, et qui a été très présente aux côtés d'Alicia de Larrocha. Ce n'était pas prévu mais elle a souhaité m'écouter… Finalement, je lui ai joué tout le programme du disque, et j'ai failli rater mon avion de retour !
Elle a été très généreuse en conseils, me confiant telle anecdote sur le compositeur, tel doigté d'Alicia…
L'auteur de votre livret indique que les danses font référence aux provinces ibériques chaque style régional étant perçu sous son aspect chorégraphique. Avez-vous souvent séjourné en Espagne et/ou avez-vous eu l'occasion de voir des ballets espagnoles et êtes vous d'accord avec ce jugement de Christiane Le Borday's ?
Granados rend hommage à son pays mais il ne se pose pas en folkloriste : il utilise des éléments caractéristiques de certaines danses traditionnelles, en donne des évocations plus ou moins fidèles, et recréée une Espagne rêvée. Même si ça n'est pas explicite (la plupart des titres des Danses ne sont pas de Granados à l'origine), on peut retrouver des " marques " évidentes de différentes régions : l'Andalousie est présente dans plusieurs pièces, avec sa typique cambrure de phrase et son ornementation arabisante (2, 5, 10, 11, 12), la Galice semble apparaître dans les Danses 3 et 4, avec ses percussions et la cornemuse locale appelée gaïta, et plusieurs pièces évoquent la Jota aragonaise, avec son rythme tournoyant (6e, 7e, partie centrale de la 9e). Même la Catalogne natale du compositeur apparaît dans une Sardane stylisée (8e Danse) !
programme du concert du 22 octobre 2012 :
- Claude Debussy
La Puerta del vino, Bruyères, Brouillards, La Terrasse des audiences du clair de lune, Feux d'artifice (extraits des Préludes)
- Frédéric Chopin
Polonaise op.26 n°1, Impromptu n°2 op.36, Fantaisie-Impromptu
- Enrique Granados
Danzas españolas n° 1, 2, 5, 12, Allegro de Concierto

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A voir Guillaume Coppola - Granados, Danzas españolas : Andaluza

Guillaume Coppola - Granados - Danzas españolas - Oriental

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