Saint Saëns Musique de chambre avec vents

Camille Saint-Saëns (1835- 1921)
Musique de chambre avec Vents
Intégrale - 2CD
Laurent Wagschal et Pascal Godart, piano
et Les solistes de l'orchestre de Paris :

Philippe Berrod et Olivier Derbesse clarinettes
André Cazalet, cor
Guillaume Cottet-Dumoulin, trombone
Yves d'Hau, contrebasson
Alexandre Gattet, hautbois
Vincent Lucas, flûte
Frédéric Mellardi, trompette
Marc Trénel, basson
Eichi Chijiiwa et Angélique Loyer, violons
Ana Bela Chavès, alto
Emmanuel Gaugué, violoncelle
Bernard Cazauran, contrebasse
Sans doute cette intégrale de musique de chambre avec vents mériterait-elle que l'on précise dans le titre "et avec piano" car l'instrument roi est présent dans toutes les pièces de ce double disque mais il est vrai aussi que Camille Saint-Saëns dont l'essentiel de la musique est de la musique de chambre, qu'il a écrite dès l'âge de cinq ans jusqu'à sa mort, a composé nombreuses autres oeuvres de musique de chambre avec piano et autres instruments, étant lui-même pianiste et organiste virtuose... et il s'agit ici d'une intégrale des oeuvres pour ce qui concerne les seuls instruments à vent, ce qui justifie donc le titre restrictif " Musique de chambre avec vents" .
Benoit d'Hau, Directeur du label Indésens, précisément spécialisé dans la publication de disques d'instruments à vent, a d'ailleurs fait appel à deux pianistes pour enregistrer ces nombreuses pièces : Laurent Wagschal, dont on connaît déjà les nombreux enregistrements de musique de chambre et Pascal Godart, qui s'est notamment fait remarqué en remportant en 1996 le Grand Prix International Maria Callas à Athènes avec dix concertos pour piano et orchestre, mais qui joue aussi beaucoup en tant que chambriste.
Vous l'aurez donc compris ce disque s'adresse tout autant aux amateurs de piano que d'instruments à vent, et c'est une excellente occasion pour s'intéresser aussi à ces instruments dont certains ont peu souvent l'occasion de rencontrer le piano. L'une des oeuvres, un septet en quatre mouvements revêt une instrumentation inhabituelle plus large puisqu'elle est écrite pour deux violons, alto, violoncelle, contrebasse, piano et... trompette, seul instrument à vent pour lequel la pièce a été écrite sur commande. Cette oeuvre rencontra un très vif succès qui dure encore.
Nombreuses pièces sont en fait de simples duos soit avec le cor, la flûte, le trombone, le basson ou encore le hautbois. La plupart des pièces sont en un seul mouvement hormis trois sonates confiées ici à Pascal Godart pour ce qui concerne le piano qui rencontre dans l'une la clarinette, instrument à vent désormais fréquemment croisé avec le piano, cette sonate montre d'ailleurs combien ses deux instruments s'entendent à merveille, ayant inspiré là une très belle oeuvre au compositeur. Pour les deux autres sonates ce sont le hautbois et le basson qui partagent le dialogue avec le piano. Ces trois sonates ont été composées la même année, juste avant la disparition du compositeur en 1921, le compositeur n'ayant pas eu le temps d'écrire toutes les sonates qu'il projetait de réaliser pour chacun des instruments à vent. Vous pourrez écouter (voir plus bas) précisément un mouvement de la dernière oeuvre de ce compositeur, extrait de la sonate pour basson et piano, un paisible aria.
La mélancolie semble particulièrement attachée au cor, qui a inspiré deux belles romances au compositeur. Mais la gaieté prend aussi le plus souvent place et plus qu'accompagner les instruments à vent c'est un soutien de tout instant qu'apporte le piano dans l'ensemble de ces pièces. Celles-ci s'avèrent aussi le plus souvent d'un rythme plus enlevé et plus d'inspiration classique que romantique, l'instrument roi tient alors un discours d'une vivacité et légèreté à l'égale des autres ainsi par exemple dans une remarquable tarentelle pour flûte, clarinette et piano que vous pouvez également écouter dans cette page.
Les deux pianistes Laurent Wagschal et Pascal Godart, l'un comme l'autre contribuent donc amplement, par leur talent à remplir tous ses rôles essentiels, à ce que cet enregistrement ait le vent en poupe (il a d'ailleurs obtenu un "Choc" de la revue Classica de ce mois-ci). ils ont bien voulu répondre à quelques questions autour de cet enregistrement :
Questions à Laurent Wagschal :
Que représente Saint-Saëns dans votre répertoire ?

Saint-Saëns est un musicien que les pianistes en général fréquentent peu. On joue certes volontiers ses concertos, qui sont effectivement très réussis ; on joue aussi bien sûr le Carnaval des Animaux, et puis... c'est à peu près tout ! Il était excellent pianiste, mais il n'a pourtant laissé aucune oeuvre vraiment marquante pour piano seul, les pièces les plus intéressantes se trouvant dans les Etudes. Pour ma part, je n'ai joué aucune de ses oeuvres pour piano seul... En ce qui concerne la musique de chambre, sa production est importante : deux sonates pour violon et piano, deux sonates pour violoncelle et piano, deux trios avec piano, un quatuor avec piano, deux quatuors à cordes. J'ai eu l'occasion de jouer notamment la première sonate pour violon et piano qui est très belle. Mais, à l'instar de Poulenc, auquel il a d'ailleurs en quelque sorte ouvert la voie en ce domaine, le meilleur de sa musique de chambre réside dans les oeuvres pour les instruments à vents.
La plus grande part des œuvres de musique de chambre de Saint-Saëns sont avec piano, que pensez-vous de la façon dont il traite cet instrument, plus particulièrement dans les pièces avec les instruments à vent et quelles difficultés particulières d'interprétation ces oeuvres présentent-elles ?

Saint-Saëns, dans la lignée des compositeurs-concertistes comme Liszt, était un pianiste virtuose et chacune de ses partitions pour le piano est pensée et écrite pour l'instrument avec beaucoup d'habileté et de savoir-faire. Ce sont des pages très agréables à jouer, très brillantes et toujours valorisantes pour le pianiste. Je pense que c'est une musique qui sonne facilement, qu'il faut jouer de manière simple et naturelle, sans excès, ce que d'ailleurs Saint-Saëns détestait.
Comment est né ce nouveau projet de disque et comment s’est passé votre enregistrement ?

Le label Indésens, que dirige Benoît d'Hau, est consacré au répertoire des instruments à vents, c'est donc tout naturellement qu'il a souhaité enregistrer l'intégrale de la musique de chambre de Saint-Saëns. Lorsqu'il m'a proposé de participer à cet enregistrement, j'ai été très heureux de retrouver plusieurs musiciens de l'Orchestre de Paris avec lesquels j'avais déjà eu l'occasion de jouer : Vincent Lucas, Alexandre Gattet, Olivier Derbesse et Marc Trenel. Je suis également ravi d'avoir pu découvrir plusieurs pièces que je ne connaissais pas et dont j'ignorais même l'existence : en particulier la Romance avec flûte, les deux Romances avec cor, la Cavatine avec trombone, le Caprice et enfin la Prière avec basson, magnifique pièce de la fin de sa vie, très émouvante et remarquable d'économie de moyens.

Le septuor op 65 revêt une instrumentation assez inhabituelle puisque écrit pour deux violons, alto, violoncelle, contrebasse, piano et trompette, connaissez-vous d’autres compositeurs qui aient écrit pour une telle formation ?
Ce septuor, dont l'instrumentation est en effet particulièrement singulière, fut écrit suite à une commande de Henri Lemoine pour la société "la Trompette". Ce dernier lui avait en effet proposé de composer une pièce mêlant la trompette, les cordes et le piano. Saint-Saëns avait d'abord répondu en plaisantant qu'il écrirait d'abord une pièce pour guitare et 13 trombones, puis un concerto pour 25 guitares ! Malgré cela, il composa d'abord un préambule qui fut joué lors d'une soirée et Saint-Saëns, probablement satisfait du résultat, décida alors d'écrire trois autres mouvements pour compléter l'oeuvre. C'est à mon avis la pièce la plus réussie de toute la musique de chambre de Saint-Saëns, à la fois très brillante, très classique tout en étant originale, et également vraiment poignante dans l'intermède.
Vous semble-t-il plus difficile d’accompagner au piano une formation ainsi plus nombreuse que par exemple de jouer un duo ou est-ce le contraire ?

Difficile de répondre à cette question de manière générale, je crois que la réponse tient surtout aux musiciens avec lesquels on joue ainsi qu'aux oeuvres exécutées. Je pense quand même que quand on joue dans une formation importante, on est porté par l'énergie globale des autres, et on joue plus facilement, un peu comme on se sent porté par l'orchestre dans un concerto.

Parmi les différents instruments à vent que vous accompagnés dans ce disque y en a-t-il dont vous préférez la sonorité, et les difficultés pour accompagner sont-elles différentes selon l’instrument ?
Je suis très heureux à l'occasion de cet enregistrement d'avoir pu jouer en particulier avec basson, cor et trombone, trois instruments que j'affectionne beaucoup et qu'on a malheureusement très peu l'occasion d'accompagner, leur répertoire étant très limité...
Le Caprice pour des airs danois et russes est en fait inspiré d’air danois, russe et anglais…Que pensez vous plus particulièrement de cette œuvre, qui réunit cette fois la clarinette, la flûte, et le hautbois avec le piano et pourquoi à votre avis ce nom a-t-il été ainsi écourté ?
Ce caprice a été composé et crée à l'occasion d'un voyage en Russie, Saint-Saëns tenant la partie de piano et accompagnant ses amis de la Société de musique de chambre pour Instruments à vents. Dédié à l'Impératrice de Russie, Saint-Saëns utilisa des airs russes, danois (elle était née princesse du Danemark) ainsi qu'anglais pour honorer également la princesse de Galles. Le titre de la pièce ne mentionne en effet pas l'emprunt anglais, ce thème étant plutôt secondaire et peut-être aussi pour faire plus "exotique"... Il s'agit encore une fois d'une pièce très virtuose, remarquablement écrite, et mettant en valeur tour à tour chacun des quatre instruments.

Que pensez-vous aussi de la Tarentelle, op.6 pour flûte, clarinette et piano qu’un auditeur lors de sa création attribua à Rossini ? Vous semble-t-elle éloignée ou non des autres œuvres de Saint Saens ?
Lorsque il compose la Tarentelle pour flûte, clarinette et piano, Saint-Saëns est très lié d'amitié avec Rossini. Ce dernier la fit jouer lors d'une soirée musicale dans son salon en laissant croire qu'il en était l'auteur, et ce n'est qu'après avoir été chaleureusement félicité par tous qu'il avoua que la pièce était de Saint-Saëns. C'est une pièce écrite tout à fait dans son style : très brillante et séduisante, de forme ABA classique avec notamment une belle partie centrale très lyrique.

Comment s’est passé l’intégrale des œuvres pour piano et violon de Beethoven que vous avez récemment donnée à Rennes et quels sont prochains concerts et autres projets ?

J'ai été très heureux et très excité d'avoir réalisé cette intégrale le mois dernier avec Julien Dieudegard dans le cadre des Concerts de midi à Rennes. C'est évidemment un des monuments de l'histoire de la musique, et évidemment, devant de tels monuments, on se sent bien peu de chose... Je suis malgré tout très satisfait de ce que nous avons fait, mais je considère ces concerts comme une première approche de l'oeuvre, une première lecture qui demande à être retravaillée et mûrie. J'espère que nous aurons d'autres occasions bientôt de refaire cette intégrale...

Concernant mes prochains concerts, je jouerai notamment à l'auditorium du Musée d'Orsay le vendredi 21 mai à 12h30 en compagnie des musiciens de l'Orchestre de Paris. Il s'agit d'un programme consacré à Saint-Saëns et nous présenterons plusieurs pièces de notre enregistrement. Je participe également à un concert le 8 mai à Rouen au Temple St-Eloi avec des pièces de Gideon Klein et Viktor Ullmann écrites dans les camps de concentration. Enfin, je jouerai le samedi 5 juin au théâtre de St-Pol de Léon (Finistère) avec Elise Kermanac'h dans un programme de piano à 4 mains. Quant à mes prochains enregistrements, deux disques vont paraître très bientôt pour le label Timpani, toujours dans le répertoire de la musique française : la musique de piano de Gabriel Pierné, et la musique de chambre de Maurice Emmanuel.
Questions à Pascal Godart
Benoit D'Hau directeur du label Indesens vous a demandé de jouer les trois dernière sonates de Saint-Saëns, que vous jouez très souvent, qu'appréciez vous dans celles-ci et pensez-vous que ces oeuvres de fin de vie du compositeur sont très différentes de ces autres oeuvres ?
Je retrouve dans ces œuvres le génie de Saint-Saëns à déguster avec une petite cuiller. Beaucoup plus difficiles qu’il n’y paraît, ces œuvres dépendent d’un équilibre très subtil, tant au niveau du son qu’au niveau de la simplicité du discours et des couleurs. C’est comme un condensé d’idées multicolores réduites à leur plus simple expression sans avoir pour autant perdu de leur saveur.
Parmi les différents instruments à vent que vous accompagnés dans ce disque y en a-t-il dont vous préférez la sonorité ?
J’ai eu souvent l’occasion de jouer avec basson. C’est un instrument dont je connais bien le répertoire, tant son œuvre concertante que la musique de chambre qui lui est consacrée et je dirais que, sinon une préférence, j’ai naturellement une familiarité avec le son du basson. Mais cela aussitôt dit, je pense à la beauté du son de Philippe Berrod et de ses collègues de l’Orchestre de Paris et je me rends compte que répondre à votre question est bien difficile !
Comment s’est passé votre enregistrement ?
Ce fut un travail passionnant et, comme à chaque enregistrement l’occasion d’approfondir la connaissance d’œuvres qu’on n’a jamais fini d’explorer, de découvrir ou de redécouvrir. C’est aussi le moment de profiter des idées musicales de ses partenaires chambristes, d’écouter et de lire une œuvre à travers un filtre différent. Un enregistrement de musique de chambre c’est beaucoup d’échange et d’enrichissement mutuel, surtout avec de telles personnalités musicales.
Quels sont vos prochains concerts et autres projets ?
Paris – Salle Pleyel avec le 5ème concerto (Empereur) de Beethoven le 5 février 2011 est une date importante de ma saison prochaine. Ce sera avec l’Orchestre Pasdeloup et son excellent chef Wolfgang Dörner avec lequel j’ai déjà de beaux souvenirs dans Beethoven, justement, et Rachmaninov l’an dernier.
Je viens également d’être nommé Professeur de piano au Conservatoire de Lausanne – Haute Ecole de Musique. Je vais commencer cette nouvelle et passionnante mission à la rentrée prochaine (septembre 2010) et j’en suis très heureux.

Pour en savoir plus sur Laurent Wagschal... cliquez ici

Pour en savoir plus sur Pascal Godart... cliquez ici


A écouter...

Pour écouter l'allegreto moderato de la sonate pour basson et piano de Camille Saint-Saëns
interprété par Marc Trénel, basson et Pascal Godart, piano

avec l'aimable autorisation du label Indésens
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Pour écouter Tarentelle pour clarinette, flûte et piano de Camille Saint-Saëns
interprété par Olivier Derbesse, clarinette - Vincent Lucas, flûte - Laurent Wagschal, piano

avec l'aimable autorisation du label Indésens
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