avec les pianistes
Lang Lang,
Alfred Brendel,
Pierre-Laurent Aimard,
Till Fellner
Julius Drake
et
Stefan Knüpfer, chef technicien et accordeur chez Steinway
& Sons
Le film documentaire Pianomania que vous avez pu découvrir
au moment de sa sortie en salle (voir
ici le synopsis du film, la présentation des "acteur",
photos, vidéo..) sortira en DVD le 7 juin 2011. Il n'est
pas question dans cette page de revenir sur ces informations mais
de donner quelques précisions afin de metttre les points
sur les i...
Certes il est difficile d'imaginer que ce film documentaire,
qui d'ailleurs a été diffusé dans un nombre
limité de salles, puisse s'adresser à un large public
profane, et certains médias lors de sa sortie en salle
l'ont décrit comme s'adressant à des spécialistes
de cet instrument. Effectivement il est plus facile de penser
qu'il intéressera seulement le public amateur de piano
pris dans le sens large de ceux qui en jouent et/ou l'écoutent
qu'ils soient ou non des professionnels, y compris ceux qui partagent
le métier de Stefan Knüpfer (accordeurs ou également
trop rares techniciens ) , uniquement un public qui s'interroge
sur tout ce qui contribue à la magie sonore de cet instrument
roi... et probablement vous en faites partie ! A ce public on
pourrait aussi se contenter d'ajouter celui des techniciens purs,
ceux qui aiment "bricoler" ou mener des recherches scientifiques
dans l'objectif de parvenir à faire fonctionner correctement
une machine et qui sont en quête d'un métier puisque
il y a nombreux débouchés dans cette profession
, sans oublier cependant que ce métier exige aussi une
excellente oreille musicale. Mais...
L'on peut voir aussi dans ce film documentaire une suite à
un autre DVD, "Une vérité multiple"(voir
ici ) , où le pianiste Pierre Laurent Aimard interrogeait
des compositeurs contemporains, déjà dans la quête
d'une perfection musicale ... car le héros en fait de
Pianomania n'est pas seulement Stefan Knüpfer mais aussi
le pianiste Pierre-Laurent Aimard, le film documentaire s'attardant
surtout sur le choix et la préparation du piano sur lequel
le pianiste enregistrera (c'est désormais fait ) son disque
'"L'art de la fugue" de Bach. Ici sont dévoilées
les multiples exigences du pianiste et les réponses techniques
imaginées par Stefan Knüpfer pour rendre le piano
capable d'offrir le meilleur son, difficile objectif pour le technicien
qui confie craindre toujours... la question finale de Pierre Laurent
Aimard après chaque essai. Pas une question telle celle
d'un interrogatoire de police lors d'une enquête mais celle
d'un homme en quête de perfection. Et de fait nombreuses
questions apparaissent au fil du temps, car le pianiste veut obtenir
le timbre de différents instruments (orgue, clavecin,..)
selon les fugues ou canons de l'oeuvre de Bach. A toutes ces questions
du musicien s'ajoutent plus tard le questionnement de l'ingénieur
du son, la remise en cause de choix important comme celui étonnant
de mettre des réflecteurs sur le piano et de pulser de
l'air... choix qui finalement ne s'avère pas satisfaisant.
Stefan Knüpfer, qui ne perd jamais le sourire, se montre
d'une patience plus qu'exemplaire tout au long de ce documentaire
alors qu'il doit surmonter multiples échecs, et accueille
encore avec un calme olympien admirable cette remise en cause
en constatant avec humour ou simple acceptation qu'effectivement
si ce n'est pas bon pour les yeux... ce ne l'est pas non plus
pour les oreilles ! Et le lendemain de cette constatation il apporte
un gâteau cuisiner par sa femme qui a probablement du ressentir
les tensions qu'une telle remise en cause aurait pu faire naître
! Stefan Knüpfer trouvera à force de patience et divers
autres réglages un son plus satisfaisant. Mais ...
Il peut rester d'autres questions après avoir vu ce film
: Fallait-il démystifier le mystère de la création
du son, une magie que l'on croit souvent provenir de l'unique
talent du pianiste et en quoi ce documentaire peut-il intéresser
efffectivement les profanes comme l'espère ceux qui y ont
contribué ?... Indirectement Stefan Knüpfer et Pierre
Laurent Aimard, dont le nom semble pré-destiné à
faire parvenir jusqu'à nos oreilles : "L'art de
la fugue" de Bach, oeuvre qu'il considère "comme
un ensemble de défis techniques , fascinante et captivante"...
et Stefan Knüpfer, pour qui la technique ne fait pas à
elle seule le son puisque "Les pianistes laissent leur
trace auditive sur le piano qui s'entend", y répondent
: que ce soit dans l'interprétation de l'oeuvre ou dans
la préparation technique d'un piano les deux hommes se
rejoignent dans ce que l'on pourrait considérer comme une
"maniaquerie" d'où ce titre "Pianomania"
qui correspond à une passion commune de mettre la technique
au service de l'art... Et c'est en cela que le film documentaire
peut s'adresser à toute personne qu'elle soit ou non étrangère
à la musique classique, donc sûrement vous, car s'il
est question ici en toile de fond de la quête d'un"
son qui respire" pour mieux partager l'"art
de la fugue", oeuvre testamentaire de Bach qui d'ailleurs
pose elle aussi nombreuses questions, ce film avant toute chose
montre le regard d'hommes pour qui la quête de perfection
dans l'art est le moteur de la vie. Stéfan Knüpfer
confie qu'au début de sa carrière il aurait aimé
pouvoir être un "Piano-Rambo " parcourant
le monde entier avec, dit-il, " pour objectif de rendre
le monde meilleur avec de bons pianos". . . et
Pierre-Laurent Aimard indique que L'"Art de la fugue"
est l'oeuvre d'un compositeur dont la musique demande de l'interprète
"le plus de connaissance et d'expérience"
mais aussi " la plus fascinante et captivante".
L'un comme l'autre ne seront sans doute jamais totalement satisfaits
de ce qu'ils réalisent : "Les pianistes sont souvent
insatisfaits : ils pensent souvent qu'ils auraient pu jouer mieux
ou autrement" dit Stéfan Knüpfer qui lui-même
regrette pour ce qui concerne son métier qu'il n'y ait
pas plus de techniciens du piano pour remplir l'objectif qu'il
s'était donné. Mais l'un comme l'autre peuvent avoir
la pleine satisfaction d'avoir donner un sens à leur vie,
celui d'être les messagers d'une musique qui devrait n'échapper
à personne, puisse la "pianomania" dont ils sont
atteints être contagieuse non seulement par ce qu'elle véhicule
en terme de musique pure mais aussi comme partage de valeurs existencielles
fondamentales, d'un salutaire retour à l'art et à
la "manie de la lenteur" ou "manie de
la douceur" ?, sans doute une vérité qui
nous a échappé depuis trop longtemps...
Aussi si vous avez manqué ce film en salle le DVD est
à voir par tous, si "la vérité est
multiple", évitons aussi qu'elle soit... ailleurs,
et si vous l'avez vu en salle sachez également que ce DVD
est complété par 45 minutes de bonus qui vous ont
échappé alors : une douzaine de courts reportages
qui permettent de voir de connaître la vision de Stefan
Knüpfer sur son métier et celui des pianistes, sur
la vie à Vienne, puis de le voir opérer sur chaque
partie du piano : les marteaux, le clavier, la table d'harmonie...,
visiter l'usine Steinway de Hamburg, puis d'avoir l'avis de Pierre
Laurent Aimard sur "L'art de la fugue" de Bach,
l'écouter en jouer deux extraits et le dernier reportage
est une interview d'un médecin qui s'exprime sur les particularités
du cerveau des musiciens et celui de Stefan Knüpfer qui passe
une IRM...
Reste ensuite à (ré)écouter l'"Art
de la fugue" interprétée par Pierre-Laurent
Aimard... et se poser d'autres questions, en prenant le temps
de regarder dans un premier temps les deux vidéos bonus
puis écouter son disque où "le son respire
l'air" comme nous, êtres dits humains.