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Mars Macha Gharibian PIANO VOIX COMPOSITIONS

Mars

Macha Gharibian, piano, voix, compositions
Théo Girard, contrebasse
Fabrice Moreau, batterie
David Poteau Razel, guitare

Pianiste de formation classique Macha Gharibian cumule multiples talents de musicienne dont celui de chanteuse, qu'elle a découvert plus récemment lors de ces collaborations à multiples projets qui l'ont fait beaucoup voyager de Paris à New York .
Une voix qu'elle utilise en fait tel son instrument de musique, en mêlant celle-ci dans une harmonie parfaite à l'espace sonore, et dans un esprit jazz, en improvisant. Sa musique est également inspirée de folk songs, traditionnels arméniens et musique pop. Cet album "Mars" ne contient pas une musique planante comme aurait pu le laisser supposer le titre et l'astre que l'on aperçoit sur l'illustration mais est un résultat très personnel qui cumule toutes les qualités de ces différents sources musicales terriennes.
Macha Gharibian offre ici un splendide voyage musical dirigé cependant aussi vers le ciel et le futur de notre planète ainsi les textes de ces chants ( certains morceaux sont purement instrumentaux) sont issus de poésies ainsi le chant "Ritual Prayer", qui envoûte l'auditeur dès le début de l'album est issu d'un poème de William Parker initialement appelé "Dancer" dont à l'occasion d'un entretien à lire ci-dessous elle explique qu'elle l'a nommé ainsi "un peu comme une incantation pour tous les êtres humains." Et sur la pochette Macha Gharibian a écrit cet autre texte : « Nous sommes la continuation de ce qui est arrivé avant. Ce sont les décisions que nous prenons qui nous conduisent à un endroit et pas un autre. Que nos choix guident le chemin futur que nous prendrons ». Un disque à écouter ... et lire, d'ailleurs Macha Gharibian signe aussi quelques textes de chansons ! Découvrez des extraits de ce très bel album plus bas dans cette page.
Vous avez une formation en musique classique, quand vous êtes-vous détournée de celle-ci et pourquoi ?
Le jazz et l'improvisation ont été une vraie rencontre, c'était à New York en 2005. Pendant mes études en tant que pianiste à l'Ecole Normale, je suivais la voie classique des concours, j'aimais jouer et travailler l'instrument, mais j'étais attirée par autre chose sans oser en prendre le chemin.
Quand Simon Abkarian m'a proposé de créer à Chaillot la musique d'une pièce de Shakespeare qu'il mettait en scène, j'avais 23 ans. C'était la première fois qu'on me faisait une commande. Je balbutiais dans l'improvisation et l'écriture, pas encore affranchie du monde classique. Cette expérience a été un moteur pour continuer à explorer. Et surtout, travailler pendant presqu'un an avec sa compagnie m'a permis financièrement de partir à New York. C'était un désir très profond que j'avais. Là-bas ma rencontre avec le jazz et les musiciens m'ont donné envie de faire comme eux: suivre ma voie.
Une fois à New York, l'ambiance aidant, entourée par une multitude de musiciens hors norme et stimulée par les concerts, la vie new yorkaise et le fait de s'exprimer dans une autre langue, j'étais une autre musicienne, je pensais la musique différement, je jouais avec des gens de talent, j'étais à la School for Improvisational music dirigée par Ralph Alessi, mes profs, Ravi Coltrane, Jason Moran, Andy Milne, me poussaient à être moi-même, à écrire, et enseignaient le jazz et l'improvisation de manière pas conventionnelle. Tout était dans l'écoute et la sensibilité, ça a été une libération.
Quels sont vos musiciens de référence tant de musique classique que jazz ou « musique du monde » ?
Il y en a tant ! Avant d'être sensible au jazz de New york, il y a eu Bojan Z et Aziza Mustapha Zadeh qui ont été mes premiers coups de coeur en tant que pianiste quand j'avais 18 ans. Dans le jazz new yorkais d'aujourd'hui, je suis une vraie fan de la musique de Ralph Alessi (trompettiste), Craig Taborn (pianiste), Mickael Formanek (contrebassiste) Jason Moran (pianiste). Et côté pianistes légendaires, j'ai beaucoup écouté Art Tatum, Oscar Peterson, Kenny Barron.
Petite, la voix de mon père m'a évidemment beaucoup influencée, il y avait Bratsch et la musique que l'on écoutait à la maison, grecque, arménienne, tzigane, roumaine, bulgare, russe, et bien évidemment Django Reinhardt, qu'on écoutait énormément. Au piano, j'avais un gros faible pour Bartòk et ses Visions Fugitives, mais aussi Prokofiev, Rachmaninoff. Plus tard, quand j'ai découvert Messiaen, Ligeti, Dutilleux, Steve Reich, Takemitsu, leur musique m'a ouvert les oreilles et a sûrement contribué à ma transition vers le jazz.
En tant que chanteuse, j'ai été bercée petite par la voix de Haris Alexiou (chanteuse grecque) qui m'émeut toujours et fait partie de mes influences. Il y a aussi eu Lhasa que j'ai eu la chance de rencontrer avant qu'elle ne s'envole. Aujourd'hui je redécouvre Nina Simone, et pleins d'autres chanteuses qui me touchent. C'est sans fin en fait...
Votre musique s'inspire aussi de musique arménienne et musique pop , quels sont vos musiciens de références / musique pop et pourquoi la musique arménienne vous touche-t-elle particulièrement hormis qu'elle est celle du pays de vos parents ?
La musique arménienne fait partie de mes racines, et j'ai toujours entendu mon père chanter en arménien. Nous avons enregistré un album ensemble en 2005 avec le groupe Papiers d'Arménies. Cette musique m'accompagne depuis toujours en fait. Et quand j'écris, elle jaillit inconsciemment.
Certains compositeurs du XXème siècle comme Khatchadour Avedissian dont j'ai réarrangé un morceau (Parmani), m'inspirent énormément. Comme dans toute la musique arménienne, Il y a un sens chez lui de la mélodie et de la profondeur qui provoquent toujours la même émotion quand je l'écoute. Cette musique vient de loin, elle prend racine dans des temps anciens, et dans la grande Histoire des Arméniens qui a évolué au fil des exodes.
Il y a quelque chose d'ancré en moi, lié à cette histoire, qui s'exprime à travers moi, je ne sais pas comment l'expliquer, je n'y peux rien...
Quant à l'influence pop de ce disque, elle vient plutôt dans le format des chansons et de ce qu'amène la guitare de David, qui a développé un jeu plein de couleurs aériennes, et qui font penser à la pop. Mais la pop, c'est une manière de construire un morceau, avec des couplets, un refrain, un groove qui tourne bien... Cet esprit correspond bien à certaines chansons du disque et sert à entendre le texte.
Vous jouez du piano mais aussi du fender rhodes ... qu'appréciez vous chez chacun de ces instruments et les jouez-vous toujours ensemble ou au contraire séparément selon les morceaux ?
Sur ce disque, j'avais envie de mettre le morceau ''Sei Kei'', enregistré au fender rhodes, j'en joue rarement sur scène bien que j'aime particulièrement cet instrument, pour le son, et aussi parce que c'est une autre manière de jouer du clavier, d'attaquer la note et de la faire résonner, c'est un autre engagement corporel. Et c'était aussi une manière de terminer ce disque sur la note 'to be continued " parce que l'exploration musicale est un chemin sans fin.
Le piano reste mon instrument majeur, je suis très sensible au toucher, je préfère d'ailleurs souvent un vieux piano, même désaccordé qu'un clavier sans âme qui ne me répond pas !
Vous avez indiqué sur votre pochette cette phrase : « Nous sommes la continuation de ce qui est arrivé avant. Ce sont les décisions que nous prenons qui nous conduisent à un endroit et pas un autre. Que nos choix guident le chemin futur que nous prendrons »... Pouvez -vous présenter brièvement votre parcours personnel jusqu'à « Mars « : il semble que vous ayez beaucoup navigué entre la France et les Etats-Unis , est-ce par choix personnel ou le hasard... et vers quelle(s) destination(s) futur(es) aimeriez -vous aller ? notamment êtes-vous attirée par les astres... si oui pourquoi ?
Après mon premier séjour à New york, de retour à Paris, il a fallu me remettre au travail, comme une débutante, et réapprendre une nouvelle approche du piano, l'étude des standards, chercher où était ma voie... J'ai commencé à jouer avec des musiciens à Paris, j'ai pris des cours, tout en retournant régulièrement à New york, prendre ma dose de folie. J'en avais besoin, souvent. Paris me semblait trop petit, trop étriqué... En vérité, le fait de s'exiler un temps, d'être loin de chez soi, de sortir de son quotidien, de parler une autre langue, de rencontrer d'autres musiciens ou artistes qui vivent différemment et font autre chose, était une vraie source d'inspiration. Puis je suis attachée à cette ville, j'ai tissé des liens d'amitiés avec des musiciens, avec qui peut-être un jour je collaborerai.
Entre temps, j'ai continué à écrire, pour le théâtre, pour l'image, et après un premier long-métrage, écrit et réalisé par Nicolas Tackian, j'ai commencé à écrire en m'inspirant un peu plus de la musique arménienne, et en y mêlant le jazz.
Je jouais déjà avec Théo à la contrebasse, qui est un ami d'enfance, c'est le fils du violoniste de Bratsch, fondateur avec mon père du groupe. Au fur et à mesure des concerts, de l'évolution et des différents musiciens de passage, on a fait un concert avec Fabrice à la batterie, avec lui l'identité de mon projet prenait une empreinte forte. J'avais eu l'occasion de jouer plusieurs fois avec David dont le jeu de guitare me fascinait. Je l'ai invité à nous rejoindre pour une série de concerts et ça a été le début de Mars... Sauf que je ne savais pas encore qu'on enregistrerait si vite et que l'album s'appellerait Mars !
Le chemin futur n'est sans doute pas à prendre seulement comme changement de lieu mais choix d'avenir... vous semblez attachée à transmettre un message de paix ou écologique à travers votre musique, n'est-ce pas aussi ce que vous voulez exprimer par votre musique ?
Je suis ravie que vous lisiez ce message, car oui ça me semblait important d'avoir un message. Effectivement le chemin que l'on choisit aujourd'hui est celui qui déterminera notre futur, et ce n'est pas anodin si on décide d'aller dans une direction plutôt qu'une autre.
Aujourd'hui, on a suffisamment d'infos et de lucidité sur le monde pour savoir que certains choix nous mèneront à la destruction, la haine, ou au désastre écologique. Si on ne veut pas de ce chemin, c'est à notre conscience de se réveiller et de nous guider vers les bons choix.
Dans quelle circonstance est né ce projet de disque « Mars « , correspond-il à un série de concert que vous ayez donnée ou bien à un projet pour donner des concerts avec ces musiciens ?
Nous avons fait quelques concerts en 2012. Même si c'est avant tout un aboutissement de réaliser un album, celui-ci sert surtout à développer un projet sur scène. Alors oui j'espère que nous jouerons beaucoup sur scène grâce à ce disque !
Théo Girard est comme je le disais un ami d'enfance, on a commencé très tôt à jouer ensemble. On a un grand lien de confiance et de respect mutuel. Il a monté plusieurs projets, joué avec différents groupes (Sibiel, Le Bruit du Sign, Volo). Aujourd'hui il a aussi rejoint Bratsch sur scène. David Potaux Razel, c'est un musicien avec un univers bien à lui, qui a développé des sons, et une approche de la guitare très personnelle qui m'a tout de suite attirée quand on s'est rencontré il y a quelques années. Lui aussi a passé du temps à New York et il a étudié à Boston, à Berkley. Chez Fabrice, j'ai senti une personnalité et un jeu très riche la première fois que l'on a joué ensemble. C'était une session à la maison comme ça se fait beaucoup dans le jazz. Mon instinct m'a poussé à enregistrer avec ces trois musiciens pour leur grand sens créatif !
Certains titres de votre disque sont purement instrumentaux et d'autres chantés par vous-même, et la façon dont vous chantez donne à penser que vous considérez la voix à l'égal des autres instruments , est-ce effectivement le cas ?
J'aime chanter des mélodies, incarner un texte mais aussi chanter en improvisant, et c'est peut-être là que ma voix devient plus l'égal des autres instruments. En tout cas j'aime que la voix soit mêlé à un son, entourée d'un univers sonore, j'aime qu'il se passe quelque chose et que les autres instruments vivent aussi le texte, la mélodie, qu'ils l'accompagnent en l'incarnant autant que s'ils avaient les mots.
Pourquoi ce choix de ne pas avoir de texte sur tous les titres ?
Ecrire des textes n'est pas facile. Je m'y exerce mais c'est plus facile pour moi d'écrire une mélodie, une ligne harmonique, un rythme, un arrangement, qu'un texte. Et je me sens encore pianiste avant d'être chanteuse. C'est tellement plus facile de s'exprimer sans mots...
Les mots peuvent parfois tout gâcher, et voler un précieux moment d'intimité. Aussi, ce disque est le prolongement de la scène, c'était normal qu'il contienne des morceaux instrumentaux et des chansons. Il a failli avoir moins de voix, mais Fabrice, Théo et David m'ont poussé à chanter plus ! Finalement il y a presqu'autant de morceaux chantés qu'instrumentaux.
Votre disque comporte les textes de deux poètes prénommés "William" : Blake et Parker, pourquoi ceux-ci vous touchent-ils particulièrement ?
C'est le hasard des rencontres qui m'ont menée à ces deux William. A New York, j'ai souvent vu William Parker jouer avec Gerald Cleaver, Craig Taiborn et d'autres musiciens. C'est un personnage hors norme, j'avais trouvé par hasard dans une librairie à New York, ce livre dont il était l'auteur "Who owns music" (A qui appartient la musique) Curieuse, je l'ai lu avec beaucoup d'intérêt, il écrivait son rapport à la musique, la foi, l'improvisation, la beauté, et quelques poèmes à lui. Un de ses poèmes, initialement appelé "Dancer" m'a inspiré cette chanson que j'ai nommé Ritual Prayer, un peu comme une incantation pour tous les êtres humains.
Ma rencontre avec la poésie de William Blake est tout aussi naturelle. Par curiosité, je m'étais plongée dans ses magnifiques poèmes tirés des "Songs of Innocene and of Experience". C'était une époque où je lisais beaucoup de poésie, j'étais à la recherche de textes pouvant m'inspirer des chansons. La chanson Night m'est venue de manière très spontanée, même assez déroutante car je n'avais jamais écrit de chanson dans cet esprit. La rythmique des mots, et son phrasé étaient faits pour être chantés !
Je crois que tout ça est un pur hasard, et que les rencontres, quelles qu'elles soient nous mènent quelque part, là où on n'avait pas forcément prévu d'aller. Et c'est très stimulant !
Quels sont vos prochains concerts et /ou projets ?
Je serai en concert le 31 janvier au Studio de l'Ermitage pour la sortie officielle de l'album, ainsi que le 3 mars à la Cartoucherie de Vincennes et le 19 mars au Sunset à Paris avec ce même projet.
Je pars aussi au Festival du Court Métrage de Clermont Ferrand en février, où le film Karen Jeppe dont j'ai écrit la musique sera projeté.
Ensuite, je vais jouer avec d'autres musiciens, notamment un projet dirigé par Antoine Berjeaut, un autre avec le groupe Slonovski Bal qui m'a invitée à venir jouer et chanter sur leur nouvel album, et je joue aussi toujours avec mon père et le groupe Papiers d'Arménies. Nous serons à Chabeuil et Grenoble en mars.

Pour écouter des extraits de
Mars
Macha Gharibian

 

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