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Wind Ibrahim Maalouf avec Frank Woeste PIANO JAZZ

Ibrahim Maalouf
Wind

Ibrahim Maalouf, trompette
Frank Woeste, piano
Larry Grenadier, basse
Clarence Penn, batterie
Mark Turner, saxophone

Jazz

Le trompettiste Ibrahim Maalouf qui signe ici son quatrième disque a eu envie de faire intervenir le pianiste Frank Woeste dans les arrangements de ce nouvel enregistrement afin explique-t-il "d'être le plus «juste» possible dans ma démarche musicale. Frank est aussi un excellent arrangeur et compositeur de jazz. Il m'a beaucoup aidé à améliorer l'aspect jazz de mes compositions en y apportant une dynamique légèrement plus conventionnelle." C'est donc reconnaître là encore toute l'importance du rôle du pianiste ne serait-ce même que dans la fonction d'arrangeur, fonction en fait qui n'a vraiment rien d'accessoire puisqu'il s'agissait ici de contribuer à "proposer des harmonies et des formes qui s'approcheront plus d une sonorité qu'on peut retrouver dans les albums de Miles Davis comme «Ascenseur pour l'échafaud » ou «Kind of Blue» ainsi le précise Frank Woeste à l'occasion d'un nouvel entretien à lire ci-dessous, un pianiste dont on connaît déjà tout le talent puisqu'il a également déjà enregistré des disques avec ses propres compositions qui avait permis de le découvrir.
Ce projet d'Ibrahim Maalouf répond à une belle opportunité, une proposition de la Cinémathèque Française, avec le soutien du Fonds d'Action SACEM , de choisir un film parmi les quelques films muets du catalogue Albatros sélectionnés pour être réédités, et à deux de ses envies : composer une musique de long métrage et écrire une musique qui pourrait profondément s'inspirer de celle de Miles Davis dans "Ascenseur pour l'Echafaud" réalisé par Louis Malle, mais avec sa trompette à quarts de tons, dans la sélection il a choisi le film « La Proie du Vent » réalisé par René Clair, dans lequel plusieurs thèmes semblaient correspondre aux atmosphères qu'il souhaitait développer explique encore Ibrahim Maalouf : "Le doute, la suspicion, l'attente, l'interrogation, l'attente encore, l'excitation, la certitude, la sensualité, les complications, les surprises, et le doute à nouveau ainsi que le mystère, sont les titres des morceaux de cet album, mais aussi les émotions que j'ai ressenties dans cet ordre en découvrant le film la première fois. Ce sont aussi les sentiments que j'éprouve dans ce même ordre lorsque je suis dans un processus de composition".
On peut trouver sur internet des informations sur la façon originale dont se déroula l'enregistrement de la musique du film "Ascenseur pour l'échaffaud" par Miles Davis : " La séance d'enregistrement, organisée par Marcel Romano, eut lieu la nuit du 4 au 5 décembre, au studio du Poste Parisien où Jeanne Moreau, la principale interprète du film, accueillit les musiciens derrière un bar improvisé. Barney Wilen, René Urtreger, Pierre Michelot et Kenny Clarke, qui n'avaient pas été informés du visionnement tenu quelques jours plus tôt, furent surpris par le calme et l'assurance de leur leader, qui agissait comme s'il savait exactement ce qu'il voulait faire et ce qu'on attendait de lui. Louis Malle expliqua aux musiciens que la musique devait être en net contrepoint de l'image, et il les encouragea par conséquent à ne jamais chercher, à travers leur jeu, à traduire ou à refléter directement l'action. Des extraits de vingt à trente secondes du film furent projetés, sur lesquels le groupe improvisa très librement, à partir d'instructions sommaires de Miles Davis, visant surtout l'atmosphère à rendre. Trois heures à peine suffirent pour enregistrer une cinquantaine de minutes de musique, dont dix-huit furent utilisées pour le film. À en croire Miles, le seul véritable problème rencontré au cours de la séance fut de faire coller des séquences musicales à la démarche de Jeanne Moreau, qui manquait selon lui cruellement de rythme" Cet album WIND a lui été enregistré à New York City en une demi journée et certes le réalisateur ne pouvait être présent pour donner quelques consignes par contre la formation est similaire et les conditions d'enregistrement très proches : Les morceaux ont été enregistrés en une seule prise ainsi comme l'explique Ibrahim Maalouf : "Pas d'artifice de post production. Le mixage a été réalisé le lendemain dans le même studio et également choisi de travailler avec des musiciens de jazz capables de flirter avec mes sonorités arabes, sans être déstabilisés. L'équipe New Yorkaise est un trio composé de Larry Grenadier (basse), Clarence Penn (batterie), Mark Turner (saxophone). Ces musiciens sont particulièrement respectés dans le milieu du jazz traditionnel et avant-gardiste pour leur ouverture d'esprit, leur créativité et leur musicalité"
Le résultat ... des émotions accumulées strate par strate pour former ensemble une belle oeuvre finale, à l'image de l'illustration de la pochette, et grâce à une musique conjuguant belles mélodies et harmonies, ce qui n'est pas vraiment surprenant de la part d'Ibrahim Maalouf qui s'est fait connaître du grand public en étant invité par le monde de la chanson : nombreux chanteurs font appel à sa sonorité et son jeu unique pour colorer leurs musiques... ni du pianiste Frank Woeste toujours en quête de nouveaux sons et de nouvelles harmonies pour faire vivre son jazz. Un très beau disque qui a reçu déjà nombreux éloges, et donne envie d'écouter ces titres sur le film de René Clair , et laisse espérer que cette belle démonstration donne envie à un réalisateur actuel poussé par ce "vent" qui offre une splendide atmosphère de faire aussi appel à eux pour un nouveau film ! En attendant regardez le clip de présentation plus bas dans la page pour en savoir plus aussi sur les musiciens américains dont certains ne vous sont sûrement pas inconnus.
Dans quelles circonstances avez-vous commencé à jouer avec Ibrahim Maalouf et quel chemin avez-vous parcouru ensemble avant l'enregistrement de ce disque ?
J'ai rencontré Ibrahim lors d'un concert où il était invité à jouer avec le Jus de Bocse de Médéric Collignon (un autre groupe auquel j'ai participé). Je trouvais qu'il avait une sonorité et une voix sur l'instrument très personnelles. On est restés en contact puis il m'a appelé pour faire la tournée « Diachronism », puis « Diagnostic », qui correspondent aux 2 albums précédant « Wind ».
Ibrahim Maalouf confie qu'il a eu envie de vous faire intervenir dans les arrangements afin d'être le plus « juste » possible dans sa démarche musicale et que vous l'avez aidé à améliorer l'aspect jazz de ses compositions en apportant une dynamique plus conventionnelle, qu'est -ce exactement que cette « dynamique plus conventionnelle » par rapport à la propre musique d'Ibrahim Maalouf ?
Ibrahim voulait que «Wind » soit davantage ancré dans la tradition jazz que ses précédents albums. Comme il n'est pas vraiment un musicien qui vient du jazz au départ et qui connaît bien les conventions propres à
cette musique, il voulait m'impliquer dans les arrangements pour que je propose des harmonies et des formes qui s'approcheront plus d une sonorité qu'on peut retrouver dans les albums de Miles Davis comme «Ascenseur pour l'échafaud » ou «Kind of Blue». Est-ce que cette tradition et ces conventions sont «conventionnelles» ? Je ne sais pas… !
Qu'appréciez-vous dans les sonorités arabes ? Quel travail particulier demandent-elles pour être jazzifiées ?
Je ne suis pas du tout un expert de la musique arabe mais j'apprécie son sens de la mélodie en particulier.
C'est à chaque fois une musique qui fait voyager et qui me donne envie de voyager !
Ibrahim joue une trompette qui permet de faire des quarts de tons. Dans notre système harmonique occidental, celui de la musique « classique » et aussi celui du jazz, on ne connaît pas les quarts de tons. Malgré cette différence, la musique arabe et le jazz sont des musiques improvisées, donc qui se mélangent facilement à mon avis.
Ibrahim Maalouf explique que les titres de chaque morceau et leur ordre correspondent à des émotions qu'il éprouve lors du processus de composition , vous êtes aussi compositeur, est-ce également des
sentiments que vous éprouvez ?
Quand on compose, on est bien sur traversé par toute une palette d'émotions. Ibrahim explique ça bien dans le texte qui accompagne le cd. A l'inverse, les compositions sont très souvent aussi des miroirs des nos émotions du moments.
nota texte d'Ibrahim Maalouf : "Au tout début, le doute face à l'infini de la création artistique. Puis vient la suspicion et la peur légitime d'être dans l'imitation, la répétition ou le non sens. L'attente qui est nécessaire pour mûrir un thème, une harmonie ou un rythme. Et viennent alors les questions et les réponses à ces questions qui parfois, tranchent dans le sens d'une idée, d'autres fois, dans le sens inverse. L'attente à nouveau. Le charme et la sensualité qui viennent qui mettent leur nez un peu partout lorsqu'il s'agit d'art et qui font basculer aussi les idées dans un sens ou dans l'autre.Les premières complications sérieuses auxquelles je dois faire face, puis les bonnes surprises imprévues que je laisse me guider et m'envahir. Et c'est à nouveau le doute qui s'installe, et ainsi de suite le processus est à nouveau le même encore et encore. Ce n'est qu'à la toute fin de ce processus qu'intervient le mystère. Il est la toute dernière sensation éprouvée et il restera pour toujours un mystère. Celui du jour où l'on sent soudainement qu'une musique est terminée, qu'ajouter ou ôter un élément à cette musique la desservirait considérablement. Il arrive sans prévenir… Cet étonnant moment où chimiquement tout semble logique. Tout semble se tenir. Le moment où la mélodie, la composition, l'album, le film, prennent tout leur sens alors qu'à peine quelques heures avant j'étais encore dans une recherche qui me semblait infinie."
Il peut sembler un peu curieux que la dernière émotion soit le mystère ?... plutôt que la certitude , en fait ces deux émotions ne se rejoignent-elles pas ?
Je pense que c'est un peu comme avec les films. Il y en a qui ont un «happy end » ou une solution et puis il y en a qui laissent songeur à la fin et qui gardent un bout de mystère.
Le morceau « Mystery » est d'ailleurs le seul titre complètement improvisé sur le moment.
Avez-vous aussi participé à son projet de musique de film de René Clair, dans l'affirmatif que pensez de ce film et qu'est précisément la musique de ce projet par rapport à celle de l'album Wind ?
Oui en fait l'album et la musique de ce film sont identiques. On a joué la musique lors d'une projection du film « La proie du vent » à la cinémathèque. En plus des compositions correspondant à des scènes en particulier, on a aussi improvisé sur le moment, c'était très inspirant pour l'enregistrement qui a suivi plus tard.
Le film de René Clair est donc un film muet des années 20. Un film très mystérieux justement. Difficile de faire court mais, en gros, un aviateur tombe du ciel avec son avion lors d'une tempête (« wind ») et se retrouve dans un château dans un pays imaginaire (« la Libanie »... ). Dans ce château, il tombe amoureux d'une jeune femme qui y est tenue prisonnière et il tente de s'enfuir avec elle. A voir !
Ibrahim Maalouf dédie cet album à Miles Davis dont le génie a complètement inspiré ses compositions et notamment celle du film "Ascenseur pour l'échaffaud ". C'est le pianiste René Urtreger qui était aux côté de Miles Davis dans cet enregistrement, que pensez-vous de cette musique et de manière générale de celle de René Urtreger ? Ces deux jazzmen sont-ils pour vous des jazzmen de référence ?
Miles Davis est une référence incontournable pour tout jazzman je pense. Il a été souvent à la tête du développement de cette musique et à toujours su s'entourer des meilleurs talents du moment, ce qui fait que ses groupes restent vraiment des références de leur époque.
J'aime beaucoup comment joue René Urtreger sur l'album Ascenseur pour l'échafaud ! Il y a beaucoup d'espaces. Ca respire !
Un trio américain s'est joint à vous deux pour l'enregistrement, aviez-vous déjà eu l'occasion de jouer avec un ou plusieurs de ces musiciens et comment avez-vous vécu cet enregistrement ?
Non, je connaissais Mark Turner car on a des amis musiciens en commun. Larry Grenadier et Clarence Penn, on ne les connaissait que par des enregistrements et puis on les avait vus en concerts.
L'enregistrement a été fait en une journée, ce qui veut dire beaucoup déjà. En fait, l'alchimie a fonctionné tout de suite. Ce sont tous des merveilleux musiciens capables de rendre vivante une musique qu'ils voient sur papier et qu'on n'a répétée qu'une fois la veille !
Pour écouter des extraits
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Ibrahim Maalouf
Wind
Ibrahim Maalouf, trompette
Frank Woeste, piano
Larry Grenadier, basse
Clarence Penn, batterie
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