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Berlioz Liszt Symphonie fantastique Roger Muraro piano
Berlioz / Liszt
Symphonie fantastique
Roger Muraro , piano
Le pianiste Roger
Muraro célèbre l'année du bicentenaire
de Liszt avec la sortie de ce disque à paraître le
17 janvier 2011 et un concert, avec également au programme
Berlioz/ Liszt, à Paris le 10 février .
uvre rare en concert comme en disque, la « Symphonie
fantastique » de Berlioz, transcrite au piano par Franz
Liszt fait partie de ces partitions parmi les plus complexes du
point de vue technique et les plus riches en sonorités.
Dans son nouvel opus, Roger Muraro relève le défi
et nous offre une étonnante leçon de piano en déployant
un jeu sonore à la fois puissant et visuel annonce le label
Decca dans un communiqué.
" Cela a été un travail passionnant"
déclare le pianiste dans la vidéo du making off
(voir plus bas) ajoutant : "La motivation musicale est
tellement forte que l'on prend tous les risques" et en
même temps il trouve amusant de jouer cette symphonie parce
que le pianiste est né à 40 kilomètres de
l'endroit où Berlioz lui-même est né et a
vécu sur la Côte Saint André.
En complément de ce programme, les trois extraits des Années
de pèlerinage (la Suisse) retenus par Roger Muraro sont
une évocation très forte dimpressions visuelles
et sonores chères au compositeur : Chapelle de Guillaume
Tell, Au bord d'une source, Vallée d'Obermann.
L'éloge du romantisme flamboyant
Les années 1830 jouent, pour la culture occidentale,
le rôle d'une véritable révolution copernicienne.
Le Romantisme naissant lutte en effet contre les tenants d'un
classicisme académique. Comme Théophile Gautier
à la tête des Gilets rouges lors de la célèbre
bataille d'Hernani de Hugo au Théâtre Français,
Hector Berlioz part lui aussi en guerre contre les perruques et
les vieux classiques. Il décide alors après cette
mémorable soirée du 25 février 1830, de concevoir
un projet révolutionnaire " par une immense composition
instrumentale d'un genre nouveau ". Dans ce climat favorable
aux créations de l'esprit, Franz Liszt développe
un art qui, au-delà de la pure virtuosité, s'abreuve
aussi aux sources des cercles intellectuels en quête de
vérité et de transformation esthétique ou
politique. Le 5 décembre 1830, dans la Salle du Conservatoire,
il assiste à la création de la Symphonie fantastique
de Berlioz et s'enthousiasme au point d'inviter le soir même
le jeune Prix de Rome encore inconnu. Il scelle ainsi une amitié
qui ne se démentira pas : Liszt fut même le seul
collègue que le " bouillant Hector " s'autorisait
à tutoyer. Malgré leurs divergences esthétiques
au sujet de Wagner et de la musique de l'avenir, Berlioz écrira
encore à Liszt le 25 juin 1855 : " Nous avons beaucoup
parlé de toi avec Wagner, tu peux penser avec quelle affection,
car, ma parole d'honneur, je crois qu'il t'aime autant que je
t'aime moi-même ". Sans doute l'uvre fulgurante
de Berlioz transforma-t-elle les conceptions pianistiques du Hongrois
qui déclarait dans une lettre de 1838 publiée par
la Gazette musicale : " Le piano tient à mes yeux
le premier rang dans la hiérarchie des instruments
Il le doit en partie à la puissance harmonique qu'il possède
exclusivement ; et par suite de cette puissance, a la faculté
de concentrer l'art tout entier. Dans l'espace de sept octaves,
il embrasse l'étendue d'un orchestre ; et les dix doigts
d'un seul homme suffisent à rendre les harmonies produites
par le concours de plus de cent instruments concertants ".
Si l'influence de Paganini et de sa technique violonistique diabolique
marquèrent profondément Liszt (Etudes d'après
les Caprices de Paganini de 1838, Etudes d'exécution transcendante
de 1839), Berlioz, pourtant peu sensible aux sortilèges
du clavier, fut sans doute celui qui, sans en être conscient,
ouvrit au Hongrois les portes d'un nouveau monde pianistique.
L'instrument, devenu roi, devient dès lors " un orchestre
avec ses mille voix, ses crescendos progressifs, ses smorzandos
gradués, ses murmures lointains et ses mugissements formidables
" (Théophile Gautier).
Trois extraits des Années de pèlerinage (la Suisse)
: une exploration musicale dans le royaume de la littérature.
Le cycle des Années de pèlerinage tient du genre
du poème symphonique pour piano inspiré de paysages,
d'uvres d'art ou d'impressions littéraires. Doté
d'une immense culture, Liszt est tout à fait à l'aise
dans un genre où le pèlerin profane peut dessiner
musicalement un journal intime. Commencé à 24 ans
en 1835, le Premier Livre du recueil intitulé Album d'un
voyageur contient des pages descriptives et a pour cadre les paysages
suisses dont Liszt aimait les contrastes, la grandeur et les calmes
visions. C'est pendant un séjour amoureux en Suisse en
compagnie de la comtesse Marie d'Agoult - rencontrée un
soir de décembre 1832 à Paris chez la marquise Le
Vayer - qu'il entreprend la Première Année de pèlerinage.
Leurs promenades romantiques au sein d'une nature idéalisée
joignent à l'élément descriptif et narratif
tout un substrat psychologique affectif et émotif qui permet
une évasion quasi métaphysique au-delà du
monde réel. Liszt remettra sans cesse son ouvrage sur le
métier jusqu'à la parution du Premier Cahier en
1855 comprenant neuf pièces, tandis que les deux autres
Années, plus tardives, correspondront aux séjours
en Italie. Pour la publication (chez l'éditeur Schott à
Mayence), il rédige la préface suivante : "
Ayant parcouru en ces temps bien des pays nouveaux, bien des sites
divers, bien des lieux consacrés par l'histoire et la poésie
; ayant senti que les aspects de la nature et les scènes
qui s'y rattachaient ne passaient pas devant mes yeux comme de
vaines images, mais qu'elles remuaient dans mon âme des
émotions profondes, qu'il s'établissait entre elles
et moi une relation vague mais immédiate, un rapport indéfini
mais réel, une communication inexplicable mais certaine,
j'ai essayé de rendre en musique quelques-unes de mes sensations
les plus fortes, de mes plus vives perceptions ". Les trois
extraits retenus par Roger Muraro sont une évocation très
forte d'impressions visuelles et sonores où l'imprégnation
de la littérature se fait l'écho des propres pensées
et des propres aspirations du compositeur.
La Chapelle de Guillaume Tell (en ut majeur, lento) qui ouvre
le Premier Cahier ne se limite pas à la seule citation
du poème de Schiller. Elle offre un portrait héroïque
du héros helvétique, sorte de portail hymnique d'une
solennité impressionnante entretenue par de nombreux effets
orchestraux et la puissance dramatique de l'allegro vivace conclusif
aux sonorités de fanfare.
Au bord d'une source, quatrième pièce de la série
(en la bémol majeur allegretto grazioso ma non troppo)
évoque la fraîcheur de l'eau qui dévale le
long des rochers. Toute la magie d'une écriture subtile
et délicate est rendue par des arpèges souples et
des harmonies cristallines d'allure impressionniste. Liszt utilise
un thème unique répété au sein d'un
flux continu de doubles-croches décrivant le miroitement
aquatique.
La vaste fresque intitulée Vallée d'Obermann constitue
la sixième pièce du recueil d'après le roman
autobiographique d'Etienne de Senancour publié en 1804.
Liszt a parfaitement saisi la charge de l'un des plus grands poèmes
de l'époque décrivant un paysage escarpé
de haute montagne, à la fois menaçant et sinistre,
propre à la méditation et à l'interrogation
sur sa propre existence. Dès les premières notes,
le récitatif crée un climat d'une tristesse infinie
puis expose un large chant désespéré annonçant
dans le " Recitativo " le futur leitmotiv de Tristan
et Isolde. A l'accablement succède la colère "
Tempestuoso " : la succession d'octaves alternées,
les traits sur fond de trémolos, les silences dramatiques
conduisent à une cadence angélique (dolce armonioso).
Des harmonies hardies et une colère déchaînée
emportent tout sur l'étendue du clavier avant de faire
place à une mélancolie heureusement apaisée
au sein d'un panthéisme prégnant.
La
Symphonie fantastique (arrangement de Franz Liszt) : un art de
la transmutation pianistique.
En des temps où n'existaient ni la radio ni le disque,
les transcriptions et les arrangements permettaient d'accéder
à une diffusion musicale de partitions méconnues.
La transcription de la Symphonie fantastique réalisée
en 1834 par Liszt à partir d'une révision effectuée
par Berlioz en 1832 fit connaître cette uvre révolutionnaire
à travers l'Europe. Ce n'est qu'en 1845 que Berlioz disposa
enfin des fonds nécessaires pour faire graver la partition
d'orchestre de sa symphonie qui fut éditée précédemment
aux frais de Liszt dans sa version pour piano sous le titre :
" Episode de la vie d'un artiste. Grande Symphonie fantastique,
Partition de piano ". Le quatrième mouvement (Marche
au supplice) sera l'objet d'une nouvelle transcription en 1864-1865.
Liszt note sur la partition autographe Marche du supplice et non
au supplice. S'agit-il d'une faute d'impression ou d'une volonté
délibérée du transcripteur au demeurant parfait
francophone ? Dans ses récitals, Liszt exécuta d'abord
cette page spectaculaire judicieusement jumelée avec la
Symphonie " pastorale " de Beethoven arrangée
également pour piano. Si " charité bien ordonnée
commence par soi-même ", malgré les difficultés
d'une partie pianistique qu'il était le seul à pouvoir
exécuter, le compositeur hongrois ne fait pas moins bénéficier
ses contemporains de son travail de réduction de la partition.
Robert Schumann ne prit connaissance de la " fantastique
" que dans la version pour piano qui indiquait les entrées
des instruments de l'orchestre. En 1841, à partir de ces
éléments, il rédigea un éloge enthousiaste
: " De quelle main hardie tout cela est exécuté,
en sorte que rien absolument ne se puisse ajouter et effacer,
sans enlever à la pensée son acuité d'expression,
sa force ". Schumann considérait cette uvre
à la fois traditionnelle et moderne comme la première
grande symphonie après la Neuvième de Beethoven.
En cinq mouvements comme la Symphonie " pastorale ",
elle magnifie les forces et les beautés de la nature ainsi
que les passions humaines. Son programme déplaisait à
Schumann, mais Berlioz le jugeait " indispensable à
l'intelligence complète du plan dramatique de l'ouvrage
". Il publie dans le Figaro, le 21 mai 1830, ses intentions
en la matière : " Le compositeur a eu pour but de
développer, dans ce qu'elles ont de musical, différentes
situations de la vie d'un artiste Le programme suivant doit
donc être considéré comme le texte parlé
d'un opéra servant à amener des morceaux de musique,
dont il motive le caractère et l'expression ". On
sait que Berlioz (âgé à l'époque de
27 ans) est en proie à une passion dévorante non
partagée pour l'actrice irlandaise Harriet Smithson, entendue
à Paris en 1827 dans le rôle d'Ophélie d'Hamlet
de Shakespeare. Ses infortunes de cur vont être à
l'origine de la composition de la Symphonie fantastique, "
épisode de la vie d'un artiste " op. 14.
Rêveries et passions (Largo - Allegro agitato e appassionato
assai) incarne la femme aimée dont songe le jeune musicien.
Etre idéal, elle apparaît sous ses multiples visages
: on entend un coup de foudre au milieu de l'orage annonçant
fugitivement " l'idée fixe " qui servira de fil
conducteur à l'uvre tout entière " avec
ses mouvements de fureur, de jalousie, ses retours de tendresse,
ses larmes, ses consolations religieuses ".
Un bal (Allegro non troppo) est une valse irréelle au
milieu d'une fête troublée par le retour de l'image
de la bien-aimée qui jette un trouble profond dans l'âme
du héros.
Scènes aux champs (Adagio) se présente comme un
duo pastoral annoncé au cor anglais où Schumann
reconnaît les chalumeaux et les cors des Alpes qui se répondent
tandis que s'éloigne le tonnerre. De sombres pressentiments
envahissent le musicien.
Marche au supplice (Allegretto non troppo, feroce) offre une vision
psychédélique où l'artiste, sous l'emprise
de l'opium, croit assister à sa propre exécution
sur l'échafaud. La marche s'arrête avant l'apparition
de l'idée fixe, " dernière pensée d'amour
interrompue par le coup fatal ".
Le Songe d'une nuit de Sabbat (Larghetto - Allegro - Dies irae
burlesque - Ronde du sabbat (fugato, meno allegro) - Ronde du
sabbat et Dies irae ensemble) aux épisodes mouvementés
et terrifiants annonce une conception nouvelle de la notion de
l'espace, de la couleur orchestrale et du mariage des timbres.
Le héros se voit au milieu d'une orgie diabolique dans
une danse macabre organisée pour ses propres funérailles.
Au milieu de la parodie burlesque du Dies irae, la mélodie
de la femme adorée réapparaît tandis que sonne
onze fois le glas funèbre annonçant une ronde de
sorcières dans un capharnaüm de bruit et de fureur.
Liszt procède à une réinterprétation
dans son arrangement pour piano pourtant assez proche de la version
originale. Le traitement en noir et blanc, donc plus monochrome
qu'à l'orchestre, pourrait se révéler étique,
mais Liszt, en véritable sorcier des sons multiplie les
difficultés, les successions de glissandi en tierces et
en sixtes, les écarts de dixièmes que ses grandes
mains peuvent exécuter. Les trémolandos et autres
artifices sont destinés à mieux dégager la
substantifique moelle du riche matériau symphonique. Il
recourt à des traitements typiquement pianistiques très
différents de la texture originelle afin de rendre le moindre
détail de l'orchestration (renforcement des basses, écartement
des sixtes pour les harpes d'Un bal). La question se pose parfois
du transfert au piano du son de l'orchestre là où
la transcription sonne mal et rend partiellement compte de la
dimension de la symphonie ; pourtant, chez Liszt, l'imagination
est toujours présente ainsi que le contrôle extraordinaire
du clavier. " Il n'écrit jamais pour deux mains mais
pour dix doigts " (Daniel Barenboïm). Cette propension
à se projeter au-delà de l'instrument, à
servir l'architecture par une construction de la pensée
est digne d'un organisateur hors pair. Dans la Symphonie fantastique
comme dans les autres arrangements (en particulier des neuf Symphonies
de Beethoven), il s'adonne à une véritable alchimie,
transformant le plomb en or. " Il s'agit d'une transsubstantiation
miraculeuse, changeant l'hydromel orchestral en pain et vin pianistiques
pour déchaîner orages et sabbats, spleen bucolique
et griserie citadine. " (Gilles Macassar).
Texte de Michel Le Naour
Franz Liszt (1811-1886)
Les Années de pèlerinage - Première année
: Suisse, S. 160 (1855)
[1] Chapelle de Guillaume Tell Hector Berlioz
Symphonie Fantastique, opus 14
Partition de piano par Franz Liszt
Titre original : Épisode de la vie d'un artiste, grande
symphonie fantastique, en cinq parties
[2] Rêveries - Passions (Première partie)
[3] Un Bal (Deuxième Partie)
[4] Scène aux champs (Troisième partie)
[5] Marche au supplice (Quatrième partie, première
partie de la vision)
[6] Songe d'une nuit du Sabbat (Cinquième partie, deuxième
partie de la vision)Franz Liszt
Les Années de pèlerinage
Première année : Suisse, S. 160
[7] Au bord d'une source
[8] Vallée d'Obermann
Roger Muraro sera en
Concert le 10 février 2011
THEATRE DES CHAMPS-ELYSEES
15, avenue Montaigne
75008 PARIS Paris FR
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