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Paris Sketches Franck Avitabile
Paris
Sketches
Franck Avitabile, piano
Manu Katché, batterie
Pino Palladino, basse
Après deux récents disques en piano solo, le pianiste
Franck Avitabile revient de nouveau dans un enregistrement en
trio. Formation qu'il avait déjà expérimentée
dans ses disques plus anciens mais il est cette fois entouré
de deux musiciens autant habitués des scènes de
la pop musique que du jazz. Ainsi Manu Katché certes réputé
pour dénicher les Nouvelles Stars... mais surtout pour
ces talents de batteur dont l'énergie et a finesse de jeu
sont fort appréciées. Qualités qui s'associent
en bon équilibre avec la sonorité chaleureuse du
bassiste Pino Palladino qui lui a notamment travaillé avec
Elton John, Eric Clapton... Avec cette rythmique solide et discrète
à la fois Franck Avitabile offre ici un album fort original,
où domine cette belle couleur "avitabiléenne",
couleur unique nuancées de multiples voix, qu'il tient
en partie de son travail sur... la musique classique confiait-il
dans un précédent interview. Couleur exaltée
par cette nouvelle rencontre avec des musiciens d'un monde moderne,
ainsi d'une vivacité triplée dans un très
remarquable "Three colours" ou d'une beauté
lumineuse dans une splendide "Sun Waltz" qui
fait merveilleusement danser la lumière des rayons du soleil
dans la tête des auditeurs ... Franck Avitabile a bien voulu
livrer une part des secrets de ce nouvel enregistrement en répondant
à quelques questions :
Pourquoi avez-vous choisi denregistrer
votre disque avec Pino Palladino et Manu Katché plutôt
quavec Aldo Romano et Diego Imbert avec lesquels vous donnerez
les 16, 17 et 18 avril une série de concerts au Sunside
à Paris autour de vos mêmes compositions ?
Ce sont deux projets différents et je ne choisis pas
entre papa et maman : lidée est dessayer de
trouver une manière de jouer mes compositions que seul
Manu et Pino peuvent réaliser en studio et la même
chose pour Aldo et Diego, en concert.
Laventure avec Aldo Romano a débuté en 2007,
et on nen est quau début. Avec Aldo, on ne
répète pas, on ne joue jamais deux fois la même
chose, et on na jamais enregistré quoi que ce soit.
Avec Manu, on sest rencontré en 2004, on a arrangé
puis joué son répertoire une centaine de fois, et
jai ré-écouté chaque concert. Ces deux
conceptions totalement opposées mont permis davancer.
Pendant
les séances avec Pino et Manu, aucun arrangement nétait
prévu, ni la forme des solos, ni même les grilles.
Je suis resté parfois proche, parfois non, des thèmes,
selon la façon dont Pino et Manu ont entendu mes compositions.
Il est important décrire des choses que lon
entend et pas uniquement que lon conçoit. Force est
de constater que si le jazz et la musique contemporaine (qui se
rejoignent de plus en plus) ont parfois un aspect opaque, cest
à cause de cela. Les concerts que jai fait avec Wynton
Marsalis dune part et Jan Garbarek dautre part, mont
fait comprendre quil fallait aussi travailler méticuleusement
le phrasé et linterpretation pour être «
entendu ».
Jai choisi volontairement un studio où je ne voyais
pas visuellement ni Manu ni Pino, et dans lequel on était
dans des pièces séparées pour ne pas avoir
de conflit de puissance sonore entre le steinway, la basse électrique
et la batterie. Jai ainsi pu jouer sur la profondeur du
steinway, et la dynamique exceptionnelle de Pino et Manu. Je nai
ainsi absolument pas réalisé durant ces séances
que javais joué avec un bassiste électrique
ni sil manquait ici où là du fender, de lorgue,
ou du Nordlead.
Dautre part, jétais ravi de voir que Pino
partageait cette conception quune fois un morceau «enregistré»
en studio, « the song is dead », il ny a plus
aucun interêt à le jouer en concert, le travail de
création est terminé.
Qu'est-ce que cela vous a apporté
de jouer ainsi avec différents
partenaires musicaux ?
Depuis que je fais des disques (1996 avec Tribute to Bud Powell),
soit je change les arrangements des morceaux déjà
enregistrés pour retrouver lenvie de les jouer, ce
que je faisais avec le contrebassiste Louis Petrucciani, soit
jimprovise les arrangements en concert ce que jai
appris à faire par la suite en changeant souvent de musiciens.
Cest ce qui rend chaque concert unique, et plus excitant
que de jouer des « dead songs » puisque chaque musicien
va entendre mes compositions de manière différentes.
Cela implique aussi daccepter de « rater » des
morceaux, si lon a bifurqué au mauvais endroit où
au mauvais moment, ou si lon se perd, ce qui arrive aussi.
Cest Dré Pallemærts (mon batteur de Bemsha
Swing) qui ma initié à la culture organique
(pour simplifier tout ce qui se joue en tempo et qui ne sécrit
vraiment pas), à Paul Motian, qui ma permis de découvrir
et dapprécier le jeu dAldo Romano, et qui ma
aussi poussé à aller faire ce premier concert avec
Pino et Manu à Maubeuge en 2004. Je crois lavoir
oublié dans les remerciements de lalbum...
Quelles sont vos certitudes qui ont ainsi
pu être bouleversées par ces différentes rencontres
?
Je pensais naïvement que les jazzmen étaient meilleurs
que tout le monde ; et jai découvert en 2004 avec
Pino et Manu une culture rythmique autre, tout aussi complexe
que celle du « jazz » ainsi quune culture des
chansons dans la manière décrire (rapidement
dit : couplet refrain à la place du sempiternelle AABA
des jazzmen). Idem après ma création avec le Quatuor
à corde Modigliani. Mes deux albums solo Just Play et Short
Stories en sont dailleurs fortement imprégné.
La certitude que mes compositions ne pouvaient sonner que dans
un contexte strictement jazz be bop ou contemporain...mais j'ai
aussi une certitude qui na pas été bouleversée
: que les mystères de la création restent entiers...
Vous deux précédents disques
étaient en solo, trouvez-vous plus difficile de composer
pour un trio ou au contraire plus facile ?
Je ne compose ni pour solo, ni pour trio, jécris
de la musique à la volée généralement
tout en même temps (mélodie & harmonie). Et je
veille ensuite à la cohérence du morceau, et enfin
je rentre les partitions dans lordinateur et je chiffre
les accords en dernier. Jarrange ensuite le morceau juste
avant de le jouer, le jour du concert, ou en studio. Parallèlement
à cela, jimprovise des heures et des heures au steinway,
et je fais beaucoup de transcription sur papier de musique que
je ne joue pas au steinway.
Manu Katché et Pino Palladino sont
connus comme musiciens appartenant tout autant au monde de la
pop que le jazz, la musique pop vous inspire-t-elle aussi , quels
musiciens de ce monde écoutez-vous ?
Tout ce que jai écouté en étant adolescent
puisque lon ma offert mon premier disque de jazz à
17 ans, et à cette époque, la dream-team était
Pino Palladino et Manu katché (Tears for Fears, Elton John,
Sting, ... ) les grands que je redécouvre petite à
petit, les chanteuses de jazz daujourdhui, la musique
folk américaine incroyablement passionnante, les choses
que mes enfants écoutent...
Une des pièces de votre disque
(Mockin bird) a aussi été jouée par
le Quatuor Modigliani, qu'avez-vous appris dans ce genre de partage
? Préférez-vous la version pour trio ou avec le
quatuor ?
C'est Arièle Butaux qui m'a commandé l'oeuvre
et le concert avec les Modigliani. J'ai d'abord dit non, j'ai
réflechi, j'ai rappelé et ai dit oui. J'ai joué
aussi un mouvement du Quintet de Schumann avec eux.. et j'étais
mort de trac !
La version en trio est superbe, Manu joue de manière incroyable
! Tous les batteurs de jazz qui lont écouté
sont « verts » en écoutant ce morceau ! La
version en Quatuor a un placement rythmique originale puisquil
ny a pas de batterie et que la figure principale du thème
de MockinBird nest pas dans la culture des Modigliani
et le mélange avec le placement du steinway est sur le
fil du rasoir, et le résultat est superbe bien que mon
écriture ne soit pas suffisamment au point pour linstant,
mais je ne lâcherai pas !
Outre les musiciens jazz auxquels vous
faites référence(Michel Pettruciani, Parker, MCCoy
Tiner...)vos sources dinspiration pour ce disque sont nombreuses
et variées : des souvenirs denfance, le cinéma,
les photographies, la peinture, voire même les zones
« totalement invisibles » , comment se déclenche
votre envie de composer à partir de ces « booster
» , la musique vous vient-elle naturellement à lesprit
en lien avec lémotion quils provoquent ou bien
est-ce plus long à mûrir ?
Cela dépend complètement des morceaux, certains
sont écrits en grande partie en très peu de temps,
dautres me prennent plusieurs mois. Dès que je change
de projet, je passe une semaine au cinéma, je vais voir
toutes les expos, et quand jobserve la production dun
peintre, je me dis que jai encore beaucoup de progrès
à faire et beaucoup de chose à écrire et
des territoires à explorer ! J'ai lu le portrait d'Alexandre
tharaud dans télérama et je suis également
un adepte du changement de lieu pour travailler mon piano. J'avais
accès à toutes les salles du CNSM de Lyon à
partir de l'âge de 10 ans grâce a mme Cocherau qui
m'avait obtenu l'autorisation.
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Nouveau à vir : un joli clip vidéo
sur l'enregistrement du disque
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