CHOPIN Préludes SCRIABINE Sonate Beatrice Rana PIANO
Frédéric
Chopin (1810-1849)
24 préludes op.28
Prélude en la bémol majeur op. posthume
Prélude en do dièse mineur op.45
Alexandre Scriabine (1871-1915)
Sonate n°2 en sol dièse mineur " sonate -fantaisie"
Beatrice Rana, piano
La pianiste italienne Beatrice
Rana est la plus jeune lauréate du prestigieux Concours Musical
International de Montréal dont elle a remporté en 2011,
à l'âge de 18 ans seulement, le Premier Prix ainsi que
tous les prix spéciaux... ce qui confie-t-elle à l'occasion
d'un petit entretien exclusif en anglais (voir ci-dessous sa traduction)
a été pour elle un "grand choc" qui a
changé sa vie. Effectivement on peut constater que depuis la
jeune fille timide que l'on pouvait voir déclarer dans sa vidéo
de présentation à ce concours en 2012 qu'elle attendrait
la fin du monde mais en espérant que la prédilection maya
soit fausse et en profitant de la musique... a grandement mûri,
éblouissant le jury du concours et la presse canadienne lors
des épreuves puis depuis grâce à ce prix qui lui
a permis aussi de donner nombreux concerts qui lui ont aussi valu nombreux
éloges, dont certains en France. De même avec ce disque
qui parait sous le label canadien Atma, l'une des autres récompenses
de ce concours qui nous permet de découvrir la sensibilité
de cette pianiste qui a bien l'intention de nous faire partager sa passion
pour la musique encore de longues années : son agenda de concerts
de 2013 est déjà bien rempli alors qu'elle continuera
en parallèle de se perfectionner à la Hochschuhle de Hanovre
!
Beatrice Rana a choisi d'enregistrer les Préludes de Chopin
et la 2e Sonate de Scriabine, regroupement original mais qui s'explique
par le fait que Scriabine est un compositeur dont les premières
oeuvres découlent directement de celles de Chopin... ainsi Irène
Brisson professeure, musicologue, commentatrice française d'origine
russe, installée au Québec, auteur du livret de ce disque,
indique "Toute sa jeunesse est nourrie d'une grande admiration
pour Chopin qui lui sert d'inspiration pour ses Mazurkas opus 3. Sa
carrière de concertiste est toutefois temporairement interrompue
par la paralysie de sa main droite, ce qui l'incite à se consacrer
sérieusement à la composition jusqu'à sa guérison,
en 1896. De cette période datent de nombreux recueils de Préludes
(op. 11, 13 à 17), les Études opus 8 ainsi que les Sonates
opus 6 et 19". Cette sonate , qui ne comprend que deux mouvements
contrastés aurait été inspirée à
Scriabine par des séjours au bord de la mer dont un en Italie
: "son Andante initial de forme-sonate commence de façon
mystérieuse, à la manière d'une ballade de Chopin...
Le Presto, un bref mouvement perpétuel de type rondo pourrait
évoquer les vagues qui s'écrasent sur les rochers durant
une tempête. De son rythme frénétique émerge
peu à peu un chant dont le thème rappelle celui de l'Andante"...Vous
pourrez écouter plus bas dans cette page ce deuxième mouvement
dont Beatrice Rana nous offre tous ces aspects tant fougueux que chantant
dans un jeu fort dynamique !
Du mystère aussi dans les Préludes dont les sources
d'inspiration sont parfois discutées... ainsi ce n'est pas la
mer mais selon George Sand des « gouttes de pluie qui résonnaient
sur les tuiles sonores de la Chartreuse » à Majorque,
où il séjourna avec l'écrivain l'hiver 1838-1839
dans l'espoir d'améliorer son état , qui pourraient avoir
inspiré deux des Préludes, et les accents lugubres du
deuxième Prélude ou du sombre cortège en do dièse
mineur qui s'empare du quinzième, cadrent bien avec les «
visions de moines trépassés et l'audition de chants funèbres
qui assiégeaient Chopin », aussi relatées par
George Sand indique encore l'auteur du livret. Mais les multiples inspirations
de Chopin pour ces Préludes sont parfois contestées ainsi
selon son élève Camille O'Meara (future Madame Dubois),
l'idée du Prélude n° 17 lui était venue «
d'un carillon qui sonne la onzième heure d'un château
», d'où le profond la bémol qui résonne dans
les dernières mesures... c'est le Prélude de prédilection
de Beatrice Rana qui quant à elle, confie-t-elle, a adopté
le titre que lui donna Alfred Cortot :"Elle m'a dit Je
t'aime" ... et nous fait partager dans un même élan
sensible l'opus qu'elle considère comme un pièce unique
la variété d'émotions qui le traverse car ainsi
l'explique en Irene Brisson, : "sur le plan musical, le magnifique
opus 28 est un microcosme de l'art pianistique de Chopin : une étude
de moins d'une minute ouvre le recueil, avec la rigueur du célèbre
Prélude en do majeur (BWV 846) de Bach ; une fiévreuse
rhapsodie en ré mineur, rappelant l'effervescence révolutionnaire
de 1831, le clôt en déboulant six octaves jusqu'aux trois
ré graves, assénés fortissimo. Les pièces
de virtuosité exploitant toute l'étendue du clavier occupent
une place de choix : mouvements perpétuels concentrés
autour d'une seule difficulté technique (no 1, 3, 5, 8, 10, 19,
23), bourrasques passionnées et tourmentées, dignes des
fantaisies tumultueuses de Schumann et des farouches galops de Liszt(no12,
14, 16, 18, 22, 24). D'autres pages, au contraire, sont de tendres romances
sans paroles(no17 et 21), une langoureuse mazurka de seize mesures(no7),
des nocturnes parfois plaintifs (nº 4, 6, 13), des chorals processionnels
(n°9 et 20)."
Ce
premier enregistrement est une suite de votre prix au concours de Montréal
: comment avez-vous vécu cette compétition et les mois
qui ont suivi ?
Cette victoire au Concours de Montréal a été
un grand "choc" pour moi et je ne peux que dire que cela a
totalement changé ma vie. J'ai, comme beaucoup d'autres musiciens
de mon âge, rêvé d'une carrière internationale,
et ce concours rend ce rêve réel : après seulement
un an, j'ai la chance de jouer et de partager ma musique avec beaucoup
de gens et un grand public, d'apprendre par ces nouvelles expériences
et les merveilleux musiciens avec qui j'ai maintenant la chance de travailler.
Comment avez vous vécu cette première
session d'enregistrement ?
Les sessions d'enregistrement sont ce genre d'expériences tout
à fait uniques et intenses. Je suis allé au Canada en
2012 Avril pour enregistrer le CD et j'ai passé trois jours dans
un endroit merveilleux dans Charlevoix. La nature extraordinaire est
le cadre idéal pour une telle expérience intense! J'ai
profité de tout le temps que j'ai eu pour la jouer et pour essayer
de faire de mon mieux pour mes débuts discographiques: l'approche
avec un micro est totalement différente de celle avec le grand
public, et ce qu'il manque, c'est essentiellement ce contact avec le
public. Mais j'ai eu la chance d'avoir comme mentor Mme Johanne Goyette
(le propriétaire et producteur de ATMA Classique) qui m'a fait
laissée totalement libre de faire ce que je voulais réaliser.
J'ai beaucoup appris durant ces journées.
Que représente pour vous la musique de
Chopin et celle de Scriabine ?
Je me sens très proche des Préludes de Chopin : il avait
presque mon âge quand il a commencé à écrire
l'opus 28, même s'il a pris du temps pour leur donner une forme
définitive. J'ai travaillé pour la première fois
les Préludes quand j'avais quinze ans, et je me souviens très
bien le sentiment de défi qui m'a accompagné dans les
jours précédant le début: la possibilité
de faire des 24 préludes une énorme pièce unitaire,
selon un point personnelle de point de vue est ce que je trouve vraiment
extraordinaire dans ce travail, bien que la structure soit rhapsodique
et souvent aphoristique. Avoir la possibilité d'enregistrer l'intégrale
des Préludes et de partager ma vision personnelle d'eux est l'accomplissement
d'un rêve.
Que pensez-vous de l'affirmation de George Sand
des préludes ont été inspirés par des gouttes
de pluies et un prélude par des visions de moines morts et les
chants funèbres qui assaillent Chopin ?
Les Préludes de Chopin, comme toutes les autres musiques du
possible, sont le résultat d'expériences personnelles
et les sentiments du compositeur. La période pendant laquelle
Chopin a composé les Préludes n'était pas une période
facile pour lui : il avait des visions terribles pendant les nuits et
était obsédé par la mort. D'autre part, il éprouvait
une merveilleuse histoire d'amour avec George Sand qui lui ont apporté
des moments de vrai bonheur. C'est à partir de cette dualité
que les préludes ont été créés: le
contraste jour-nuit, la tristesse, le bonheur est sur la base de la
composition totale.
Y a-t-il un Prélude que vous préférez
?
C'est une question assez difficile. J'aime tous les Préludes,
et plus je les joue en concert, plus je pense que ce ne sont pas 24
pièces, mais seulement une seule. Pourtant, j'ai une prédilection
particulière pour le numéro 17 en la bémol majeur:
Cortot a nommé ce prélude «Elle m'a dit Je t'aime"
je pense que c'est un titre parfait pour exprimer l'état d'esprit
de cette pièce.
Pourquoi avez-vous choisi d'enregistrer ensemble
les préludes de Chopin et la Deuxième Sonate de Scriabine
?
Je pense que Préludes de Chopin et la Deuxième Sonate
de Scriabine s'accorde merveilleusement ensemble. La Sonate a été
écrit par Scriabine quand il était très jeune,
et c'est en quelque sorte un hommage à Chopin: en fait, plusieurs
citations de Chopin sont dans la sonate, la première période
artistique de Scriabine a été caractérisée
par un véritable respect pour Chopin.
Quels sont vos prochains concerts et avez-vous
encore d'autres projets ?
Dans un avenir proche, je vais poursuivre mes études en Allemagne
et en même temps beaucoup voyager car je donnerai plusieurs concerts
en Europe, en Amérique et en Asie, à la fois comme soliste
et chambriste.
Dans dix ans, je voudrais continuer à faire ce que j'ai maintenant
la chance d'expérimenter : jouer pour un public nombreux, profiter
de mon temps libre avec ma famille et mes amis et, si possible, passer
une semaine chaque année sur les magnifiques plages du sud de
l'Italie !
Pour écouter
Alexandre Scriabine (1871-1915)
Sonate n°2 "sonate -fantaisie" -
Finale : Presto
Beatrice Rana, piano
avec l'aimable autorisation du label
Atma
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