Le Bal défendu Michel Morcrette

Michel Morcrette
Le Bal défendu

Isolée en Bretagne, une pianiste concertiste, Clara Pradier, revient sur sa vie , qui a été , tel un "bal défendu", vécue comme une éternelle attente, jusqu'à cette journée du 29 septembre 1935 où elle prit la liberté d'annuler son concert à la dernière minute. Michel Morcrette, éditeur et écrivain, lui prête sa plume sensible et mélancolique, pour une biographie intime qu'elle n'aurait jamais voulu, à raison, dévoiler à un (e) journaliste. Si le personnage central est fictif, bien que s'inspirant probablement de pianistes, Michel Morcrette fait également entrer dans ce roman nombreux musiciens réels de cette époque : Satie, Ravel, Debussy, Cortot, Busoni, Auric, Nadia Boulanger... et leur attribuent des propos dont s'ils ne sont vrais pourraient être authentiques... Et même si l'histoire se déroule au début du vingtième siècle, dans ce livre où règnent la liberté et l'amour, le romantisme est assurément au rendez-vous comme le montre aussi les deux prénoms choisis par l'auteur pour ses héros : Clara et Robert.
"Voyageuse sans but, d'aucun temps et aucun lieu" , Clara Pradier est une interprète qui n'a pas su choisir, mais pourquoi le faudrait-il, entre deux amours : celui de la musique classique et d'un peintre d'origine russe, Robert. Ce n'est là qu'un aspect de l'incertitude permanente dans laquelle elle mène sa vie et qui est omniprésente dans ce roman à l'atmosphère dramatique. Un doute qui paradoxalement emprisonne la musicienne rêveuse et éprise de liberté depuis son enfance, ainsi, enfant, imagine-t-elle que :"Le clavier lui-même était une immense échelle avec ses barreaux noirs que j'empruntais pour sauter dans les nuages" alors que le conservatoire " ressemble à une maison de correction"...

Liberté qu'elle veut naturellement avoir dans ses interprétations ainsi Busoni, qu'elle a également quelque temps pour professeur lui reprochera :"Je vous observe depuis des semaines et je ne comprends pas l'obstination que vous mettez à déverser vos états d'âmes dans la partition . Comme tous les Français[...]On en vous demande pas d'interpréter à votre guise mais de jouer ce qui est écrit". Elle sympathisera plus avec Debussy, Ravel et surtout l'excentrique Satie qui lui conseillera :" Tu dois aller jusqu'au bout du doute pour être au commencement de la musique. Après tu sors par la porte que tu veux. Si tu rates, tant pis.". Erik Satie dont elle aime les partitions car "la musique d'Erik se moquait aussi des traités de composition et s'abandonnait à la brièveté des formes, à la bizarrerie des indications sur la partition -"comme un souffle de vent", " "sans trop y croire". Elle menait à cette plage où l'interprète va d'un pas égal avec le compositeur".
Liberté qui devrait la conduire, tel Glenn Gould, à fuir les concerts, non seulement pour rester aux côtés de son amant, mais pour fuir un public qu'elle ne semble pas vraiment porter dans son cœur :"A chaque concert je sais qu'il va falloir tricher, marquer les cadences, appuyer les crescendos et les diminuendos, noyer la couleur des accords. Trahir l'idée que l'on se fait d'une œuvre, ce n'est pas rien.,[...] J'ai toujours détesté au fond le temps du concert. Comme Schumann. Ce temps imparti d'écoute et d'examen. Ce rite immuable des applaudissements, des entractes, des raclements de gorge. La musique est toujours à recomposer. Dans un concert on la décompose". Mais son impresario, Volia, saura(presque) toujours la mener au devant des scènes, ainsi dira-t-il :" Si elle ne m'écoutait pas,enfin un tout petit peu, elle se cloîtrerait dans un studio d'enregistrement pour reprendre Debussy et Ravel à l'infini...". Pourtant ne ferait-elle pas mieux de le faire ?
L'atmosphère dramatique naît non seulement de cette incertitude et quête de la liberté, de l'absolu dans la musique, mais aussi de la mort qui rôde dans les pages de ce roman, tel l'Ankou dans les contes bretons qu'elle aime écouter : mort de sa jeune sœur, mort de Satie, de Ravel, mort du père de Robert, ...pour n'en citer que quelques-unes. Son propre père n'est pas mort, mais, sans doute pire encore, l'a abandonnée dans son enfance, un abandon dont elle se juge responsable et qu'elle aura du mal à accepter jusqu'à la découverte tardive des lettres qu'il lui avait adressées mais cachées par sa mère. Elle a trouvé en Robert un double : il a fui la Russie, de retour du front , vivant ..."il se sentait aussi heureux que s'il était mort", et est tout autant en quête d'absolu dans son art qu'elle dans la musique. Une recherche d'absolu qui peut l'avoir conduit à un geste suicidaire mais il vous faudra lire le roman pour en avoir la clef car les mystères n'ont pas de réponses, c'est peut-être là le charme du doute dans la littérature, de laisser la liberté au lecteur de faire sa propre conclusion...
A écouter : une émission littéraire sur France Culture au sujet du livre de Michel Morcrette :'Le bal défendu' Cliquez ici

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