TCHAIKOVSKY Ludmila Berlinskaia Arthur Ancelle PIANO

Piotr Ilitch Tchaïkovsky(1840-1893)

Francesca da Rimini Fantaisie symphonique d'après Dante op.32
Casse-noisette op.71a

Paul Pabst(1854-1897)
Paraphrase de Concert sur l'opéra Eugène Onéguine op.81

Transcriptions pour deux pianos

LUDMILA BERLINSKAIA, piano
ARTHUR ANCELLE, piano

Hasard de dates de sortie ...après un précédent disque du moment avec un duo piano voix, à découvrir ce disque d'un duo piano / piano qui sort chez le label Saphir Productions, et qui est le premier du duo formé par les pianistes Ludmila Berlinskaia et Arthur Ancelle, duo musical et couple marié depuis peu de temps. Ludmila Berlinskaia, fille du violoniste Valentin Berlinsky, fondateur du Quatuor Borodine, a fait ses études musicales à l'institut Gnessine puis au Conservatoire de Moscou et a eu la très grande chance de travailler avec Sviatoslav Richter, celui-ci a été un guide attentif à la liberté artistique et à l'affirmation de la personnalité de Ludmila Berlinskaia, elle a joué avec lui à quatre mains, et été une pianiste privilégiée des productions qu'il dirigeait. A la chute de l'URSS elle a choisi de s'installer en France, où ses qualités de chambristes sont vite reconnues. Outre son activité de concertiste, elle est enseignante, Arthur Ancelle a obtenu précisément son diplôme de concertiste dans la classe de... Ludmila Berlinskaia, dont l'enseignement a été pour lui une révélation, tant il correspond par son intelligence, son universalité, sa créativité, à ce qu'Arthur Ancelle recherchait depuis des années. Celle-ci a trouvé en lui un étudiant absolument ouvert à ce qu'elle avait à transmettre, leur travail commun a nécessairement pris des proportions dépassant largement le cadre strict d'un simple cours de piano...
C'est ainsi qu'est créé ce duo de pianos, peu avant qu'ils ne deviennent mari et femme. Une histoire romantique tel le design du disque réalisé par la société : "mon amour" ;-)) .... qui a choisi d'illustrer le livret de photographies du couple en promenade amoureuse dans les bois ! (voir quelques une plus bas), un joli cadre qui n'a certes rien à voir avec l'enfer décrit dans Francesca da Rimini de Dante qui débute leur disque, dont le propos est inspiré par l'ouvrage de Dante : "Alighieri, la Divine Comédie", où au cinquième chant de l'Enfer, l'héroïne tombe amoureuse du frère de son mari. L'époux délaissé les surprend et les tue tous les deux, et dont Tchaikovsky réalisa une "fantaisie symphonique" que le pianiste Arthur Ancelle a choisi de partager en écrivant sa propre transcription pour piano à quatre mains, expliquant : "On se demande pourquoi les pianistes, qui possèdent de loin le répertoire le plus vaste de tous les instruments, semblent ne pas s'en satisfaire et continuent de « piquer » dans le répertoire des autres par le biais de transcriptions. En ce qui me concerne, comme je ne suis pas chef d'orchestre, s'il y a une oeuvre que j'aime particulièrement, que j'ai envie de jouer et que je n'ai d'autre solution que de la transcrire pour piano, et si je pense que le fait de la jouer au piano pourra lui apporter quelque chose, alors j'écris cette transcription sans plus me poser de question. Il faut que la transcription soit fidèle à l'original, mais je privilégie toujours l'esprit : je préfèrerai alléger l'écriture tout en respectant la sonorité générale pour conserver l'allure plutôt que tenter de tout mettre et risquer l'enlisement. Il faut savoir respecter les intentions du compositeur d'abord, que ce soit en terme de nuances, d'équilibre, de rythme etc. et le piano doit aussi apporter son côté percussif, dynamique qui permettra dans certaines oeuvres de révéler des intentions musicales parfois un peu cachées. C'est peut-être le cas dans Francesca da Rimini, oeuvre peu programmée par les orchestres, où deux pianos peuvent mettre en valeur l'extraordinaire dynamique des tourbillons de l'enfer et les lignes entrecroisées des thèmes de l'héroïne." Il existe déjà un arrangement pour le piano à deux mains réalisé par un élève de Liszt mais quatre mains ne semblent pas de trop pour faire rendre l'intensité d'une tempête telle celle rendu par les deux pianistes en fin de cette oeuvre !
C'est par contre une transcription déjà existante qu'ont choisi de jouer ensuite les deux pianistes : celle du ballet Casse noisette de Tchaïkovsky, réalisée par le compositeur chypriote Nicolas Economou, une oeuvre inspirée d'un conte, beaucoup plus paisible et même féérique : le soir de Noël, Clara reçoit de son oncle un casse-noisette. Pendant la nuit, une merveilleuse féerie commence : dans le salon, les jouets s'animent et le Casse-noisette se transforme en prince... , et cette fois c'est la pianiste Ludmila Berlinskaia qui explique ce choix : "Jouer les transcriptions d'oeuvres symphoniques à quatre mains ou à deux pianos est une longue tradition qui s'explique facilement : quand on n'a pas d'orchestre sous la main pour interpréter vos oeuvres favorites, le piano est une alternative plus commode. Ainsi faisaient tous les grands musiciens ; qu'il s'agisse des salons du XIXe siècle où l'on faisait profiter le public de réductions de symphonies et d'opéras, ou que celles-ci soient dévoilées par les compositeurs eux-mêmes aux étudiants et aux critiques dans des cadres plus didactiques, la plupart des oeuvres symphoniques avait leur transcription pour piano. Il peut y avoir de toutes autres raisons : ainsi Dmitri Chostakovitch en visite à Paris n'eut que le temps d'une nuit pour transcrire une symphonie entière d'Honegger afin de la rapporter à Moscou. Les compositeurs aiment également transcrire leur propre musique de ballet pour piano, tels Glinka avec ses scènes de danses de Ruslan et Ludmila, Prokofiev avec Cendrillon et Roméo et Juliette, ou encore Chostakovitch avec Le Boulon ou Le Ruisseau Limpide.
La musique du ballet Casse-Noisette est tellement connue et aimée de tous que nous oublions facilement que grâce au génie de Tchaikovsky, cette musique a dépassé de loin le cadre du ballet. C'est pourquoi il nous fut possible et nécessaire de jouer ces pièces brillantes par leur force visuelle, leur humour, leur générosité et leur grâce. Pour notre enregistrement de cette suite, nous tenions avant tout à transmettre le caractère russe de cette musique, et son ambiance de conte
".
C'est avec un premier rôle de star de cinéma que la pianiste Ludmila Berlinskaia s'est d'abord fait connaître dès l'âge de 13 ans (elle a joué un des rôles principaux du film "Le Grand Voyage cosmique", qui connut un succès phénoménal et devint l'emblème de la génération des années 60-voir un extrait plus bas dans cette page) , l'interprétation qu'offre le couple comme dans les photographies suggestives en relève certes le romantisme et l'humour, et l'on imagine que les deux pianistes pourrait en réaliser un clip musical tout aussi humoristique mais leu jeu au piano suffit en lui-même dans un humour non dénué de grâce... ainsi vous pourrez écouter plus bas dans cette page : "Marche"pour apprécier ces caractéristiques dominantes, une marche aux pieds très légers dénués d'escarpins d'ailleurs tout à fait inappropriés pour une balade en forêt !
Quant à la troisième oeuvre de ce programme Lucas Dupont qui a écrit une partie du livret rapporte : "C'est en mars 1879, au théâtre Maly, que fut créé par des étudiants du Conservatoire de Moscou Eugène Onéguine, premier grand succès de Tchaikovsky dans le genre opératique. Dans le public de cette création se trouvait Paul Pabst, un jeune pianiste au talent déjà reconnu qui devait publier l'année suivante sa Paraphrase de concert sur l'opéra Eugène Onéguine, op. 81. Pabst, ancien enfant prodige âgé de 25 ans, qualifié par Tchaikovsky de « pianiste béni de Dieu » et futur dédicataire de sa Polacca de concert, op. 72 n°7, avait accédé en 1878 au poste de professeur au Conservatoire et allait devenir le mentor de maint apôtre de l'école pianistique russe. Le genre de la paraphrase ou fantaisie sur des thèmes d'opéras célèbres devait sa popularité au goût de l'époque pour le tour de force virtuose et improvisatoire, en des temps où l'accès domestique à l'intégralité d'un ouvrage lyrique relevait de l'utopie. Les principaux éléments empruntés par Pabst à l'oeuvre originale sont issus de l'introduction orchestrale, de la valse du deuxième acte et de l'arioso de Lensky &- acte I. Le compositeur combine les trois tempéraments invoqués &- affliction, gaieté , transport amoureux &- en les exacerbant, soit par la surenchère ornementale, soit à travers la virtuosité paroxystique des développements. La pièce, dont le dessein exhibitionniste n'exclut pas un certain brio dramaturgique, s'achève sur une apothéose où l'explosion de la passion embrasse la jouissance chorégraphique &- manière de rendre hommage, par l'esprit plutôt que par la lettre, au père de ces bouleversantes mélodies. "...par contre rien n'est précisé au sujet d'un certain A. Jaroszewski qui a lui-même réalisé une transcription pour quatre mains de celle de Paul Pabst et est celle choisie par les deux pianistes, il est vrai que son rôle se limite à celui de "transcripteur de transcripteur", cependant il est probable que lui aussi contribue à l'intensité avec laquelle les deux pianistes offrent le "transport amoureux" final !
Ludmila Berlinskaia, piano
Le destin de Ludmila Berlinskaia est hors norme. Elevée parmi l'élite moscovite, son père étant le violoncelliste Valentin Berlinsky, fondateur du Quatuor Borodine, elle accède à la célébrité à 13 ans avec un premier rôle star au cinéma. Mais c'est bien à la musique qu'elle se consacre, accomplissant de brillantes études à l'institut Gnessine puis au Conservatoire de Moscou.
Sa rencontre avec Sviatoslav Richter est déterminante ; outre la chance de faire partie d'un cercle extrêmement restreint autour de cet immense artiste, celui-ci sera un guide attentif à la liberté artistique et à l'affirmation de la personnalité de Ludmila Berlinskaia. Jouant avec lui à quatre mains, pianiste privilégiée des productions qu'il dirige(tel Le tour d'Ecrou de Britten), elle est marquée par sa vision unique de la musique, libérée des contraintes dogmatiques ou traditionnelles du milieu musical.
A la chute de l'URSS, Ludmila Berlinskaia abandonne sa notoriété liée aux frontières du bloc soviétique pour s'installer en France, où ses qualités de chambristes sont vite reconnues ; ses partenaires réguliers sont entre autres M. Rostropovitch, Youri Bashmet, le Quatuor Borodine, ou Victor Tretiakov.
Passionnée par de nouvelles rencontres, son répertoire gigantesque ne cesse de s'agrandir à l'occasion de concerts avec Paul Meyer, Ivry Gitlis, Gérard Caussé, Gautier Capuçon, Henri Demarquette, Jean-Jacques Kantorow,Alain Meunier...
Considérée comme spécialiste de Chostakovich, elle a joué toute sa musique de chambre avec piano, y compris les oeuvres les plus obscures ou inédites. Ludmila Berlinskaia explore les répertoires à l'aune de son développement artistique et des événements qui marquent sa vie. Elle ne joue pas Schubert ou Brahms par hasard, n'associe pas les oeuvres sans nécessité artistique. Que ce soit sur scène ou par son enseignement, les messages qu'elle veut faire passer sont prioritaires. De la Grande Salle du Conservatoire de Moscou au Théâtre des Champs Elysées, des classes de l'Ecole Normale de Musique de Paris où elle est professeur aux master class en Asie, Ludmila veut transmettre la même chose : peu importe ce que l'on joue, ni où ni quand, il faut y croire et vivre chaque instant comme s'il était le plus important.
Parallèlement à son activité pédagogique et de concertiste, Ludmila Berlinskaia, passionnée par la mise en relations des arts entre eux, développe plusieurs actions :elle fonde une association, l'Association Berlinsky, dédiée à la sauvegarde de patrimoines artistiques, à la mise en valeur d'oeuvres oubliées, à l'échange entre artistes ; elle dirige aussi des festivals, et en crée un : le « Printemps Musical à Paris » qui, durant plusieurs années, tient une place importante dans les événements musicaux de la capitale, et, fait peu commun, est réparti dans plusieurs des plus
prestigieuses salles de la ville, comme la Salle Gaveau ou Radio France. Elle y programme entre autres la première version d'Aubade de Poulenc en version complète chorégraphiée depuis sa création, la première parisienne de Prométhée de Scriabine avec un clavier à lumières.
Aujourd'hui, elle démarre une nouvelle aventure en ayant formé avec le pianiste Arthur Ancelle un duo de piano né d'une nécessité : la rencontre de deux pianistes qui partagent la même compréhension de la musique et les mêmes idéaux artistiques.
Arthur Ancelle, piano
Petit fils et arrière petit fils de cantatrice, c'est dans la logique de perpétrer une tradition musicale qu'Arthur Ancelle est mis au piano à l'âge de trois ans.
Dès lors la musique occupe une place essentielle dans sa vie. A sept ans, Arthur étudie déjà l'harmonie à l'Ecole Normale de Musique de Paris et s'est produit de nombreuses fois en public.
Mais, ne considérant pas que la musique puisse être un métier comme un autre, il garde ses distances avec le milieu de l'enseignement musical et ses parcours bien établis, pour ne valoriser que les contacts personnels.
Pourtant déjà lauréat de nombreux concours, Arthur Ancelle se découvre une ambition professionnelle tardivement, soutenue par la rencontre avec Mira Yevtich, ambassadrice du Conservatoire de Saint-Pétersbourg, qui décèle son talent et lui ouvre de nombreuses portes, notamment grâce à un travail acharné où rigueur, professionnalisme et intégrité sont les maîtres mots.
Ponctuées de nombreux voyages, coupures, rencontres, les études d'Arthur se poursuivent, portant la marque de son but véritable qu'aucune facilité ni ambition de carrière n'a pu altérer : découvrir la musique, se découvrir soi.
Il obtient ainsi son diplôme Supérieur d'Exécution à L'Ecole Normale de Musique de Paris dans la classe de Ramzi Yassa, puis son Diplôme de Concertiste dans la classe de Ludmila Berlinskaia, dont l'enseignement est une révélation, tant il correspond par son intelligence, son universalité, sa créativité, à ce qu'Arthur recherchait depuis des années.
Au cours de ces études, récompensées de très nombreux prix en concours internationaux, de concerts prestigieux de Carnegie Hall à la Philharmonie de Moscou, Arthur Ancelle affirme sa personnalité et sa différence. Il ne se sent pas proche de compositeurs en particulier, mais d'oeuvres particulières, des baroques au XXIe siècle. Persuadé que tout musicien doit ressentir le besoin permanent de créer, il nourrit son art du quotidien, de l'envie, la culture, la spontanéité.
C'est ainsi qu'il en vient naturellement à écrire des transcriptions pour piano, dont la première, l'Apprenti Sorcier de Paul Dukas, lui vaut d'être invité à la jouer au Kennedy Center de Washington. Très attaché à la musique contemporaine, il travaille avec de jeunes compositeurs, et d'autres plus renommés, jouant notamment Dutilleux, Hersant ou Mantovani aux USA, en Russie, en Australie.
Ce dernier projet en date, la création d'un duo de piano avec Ludmila Berlinskaia est une nouvelle volonté d'accomplissement musical dans la plus parfaite complicité entre deux musiciens.

Pour écouter
Tchaikovsky
Casse noisette
Ludmila Berlinskaia, piano
Arthur Ancelle, piano
avec l'aimable autorisation
du label
Saphir Productions
cliquez sur le triangle du lecteur
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A voir une vidéo du pianiste Arthur Ancelle seul
Chopin Etude 4 opus 10
A voir Scriabin Sonata n° 9 - Ludmila Berlinskaia
Concert Salle Cortot 1999 in Paris
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